Question de M. PANUNZI Jean-Jacques (Corse-du-Sud - Les Républicains-A) publiée le 25/03/2021

M. Jean-Jacques Panunzi attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur les difficultés rencontrées dans le monde économique concernant l'application du crédit d'impôt sur les investissements en Corse dans le cadre des investissements hôteliers.

Il a déposé un amendement en première partie du projet de loi de finances pour 2021 afin de ne pas pénaliser l'hôtellerie de plein air par rapport à l'hôtellerie classique dans l'éligibilité au crédit d'impôt alors que les prestations offertes sont identiques.

Cet amendement de précision permettait de clarifier l'éligibilité des investissements ouvrant droit à la mobilisation du crédit d'impôt.
Les travaux parlementaires à l'origine de l'article 244 quater E du code général des impôts (CGI) et la position du Gouvernement lors de l'élaboration de ce dispositif ont entendu retenir une position non restrictive des investissements hôteliers, je cite : « la notion d'investissement hôtelier doit être entendue au sens large : elle comprend les investissements nécessaires aux prestations d'hébergement fournies par les hôtels classés de tourisme proprement dits, mais également les centres classés, les villages de vacances, les résidences de tourisme ainsi que les installations fixes en dure des terrains de campements » (extrait du Journal officiel de l'Assemblée nationale du 17 mai 2001).
Or dans les faits, la direction générale des finances publiques (DGFiP) exclut les exploitants de camping du dispositif. Une rupture d'égalité que je vous propose de corriger pour ne pas que l'interprétation restrictive de l'administration fiscale finisse par prévaloir sur la loi. Les meublés de tourisme ne pouvant désormais plus mobiliser le crédit d'impôt pour investissement en Corse (CIIC), il faut tout de même permettre aux professionnels de l'hôtellerie d'y être pleinement éligibles quel que soit le type d'hébergement ou d'hôtellerie.

L'amendement a été retiré en séance, parce que le Gouvernement a considéré qu'il était satisfait et qu'il s'agissait plus d'une question d'interprétation par les services fiscaux que d'une contrainte législative, allant même jusqu'à indiquer que « la doctrine administrative allait être adaptée suite à l'adoption et la promulgation de la loi de finances. »

Le texte a été promulgué le 28 décembre 2020. Depuis, il n'a de cesse de solliciter le cabinet du ministre pour savoir quelle forme prendrait cette évolution (circulaire, instruction fiscale, etc..), sans réponse à ce jour, tout comme sa saisine écrite en date du 18 février 2021.

À l'inverse de l'objectif visé, les services fiscaux exercent depuis une lecture plus restrictive à l'endroit de l'hôtellerie de plein air. Les demandes sont désormais rejetées et il est précisé oralement aux porteurs de projet que les refus émanent de Bercy, du ministère du budget.

Dans un contexte économique aussi morose, sa position attentiste s'avère intenable dans l'application du dispositif. C'est pourquoi il lui redemande de façon officielle quand et quelle forme prendra l'adaptation de la doctrine administrative concernant la mobilisation du crédit d'impôt sur les investissements en Corse pour les structures relevant de l'hôtellerie de plein air. Il lui remercie de bien vouloir lui apporter une réponse précise et une opérationnalité salutaire.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance - Comptes publics publiée le 04/06/2021

Réponse apportée en séance publique le 03/06/2021

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Panunzi, auteur de la question n° 1603, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance.

M. Jean-Jacques Panunzi. Monsieur le ministre, permettez-moi d'attirer votre attention sur les difficultés du monde économique s'agissant de l'application du crédit d'impôt sur les investissements en Corse dans le cadre des investissements hôteliers.

J'ai déposé un amendement en première partie du projet de loi de finances pour 2021 visant à ne pas pénaliser l'hôtellerie de plein air par rapport à l'hôtellerie classique dans l'éligibilité au crédit d'impôt alors que les prestations offertes sont identiques. Cet amendement de précision tendait à clarifier l'éligibilité des investissements ouvrant droit à la mobilisation du crédit d'impôt.

Lors des travaux à l'origine de l'article 244 quater E du code général des impôts, les parlementaires et le Gouvernement ont entendu retenir une position non restrictive des investissements hôteliers, comme en atteste le compte rendu des débats de l'Assemblée nationale publié au Journal officiel du 17 mai 2001 : « La notion d'investissement hôtelier doit être entendue au sens large : elle comprend les investissements nécessaires aux prestations d'hébergement fournies par les hôtels classés de tourisme proprement dits, mais également les centres classés, les villages de vacances, les résidences de tourisme, ainsi que les installations fixes en dur des terrains de campements ».

Or, dans les faits, la direction générale des finances publiques, la DGFiP, exclut les exploitants de camping du dispositif. Je vous propose donc de corriger cette rupture d'égalité, pour que l'interprétation restrictive de l'administration fiscale ne finisse pas par prévaloir sur la loi.

L'amendement a été retiré en séance, le Gouvernement ayant considéré qu'il était satisfait, que le problème était une question d'interprétation par les services fiscaux et qu'une contrainte législative n'était pas nécessaire. Il est même allé jusqu'à indiquer que « la doctrine administrative allait être adaptée à la suite de l'adoption et de la promulgation de la loi de finances. »

Le texte a été promulgué le 28 décembre 2020. Depuis lors, je ne cesse de solliciter le cabinet du ministre pour savoir quelle forme prendra cette évolution. Je n'ai reçu aucune réponse à ce jour, pas même à mon courrier en date du 18 février 2021.

Dans un contexte économique aussi morose, la position attentiste de la DGFiP est insoutenable.

Monsieur le ministre, je vous le redemande : quand sera adaptée la doctrine administrative concernant la mobilisation du crédit d'impôt en faveur des investissements en Corse pour les structures relevant de l'hôtellerie de plein air, et quelle forme cette adaptation prendra-t-elle ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Monsieur le sénateur Panunzi, comme vous le savez, les petites et moyennes entreprises corses peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des investissements exploités en Corse pour les besoins d'une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, sous certaines conditions.

Deux catégories d'investissements sont susceptibles d'ouvrir droit au crédit d'impôt. Il s'agit, d'une part, des biens d'équipement qui sont amortissables selon le mode dégressif, et, d'autre part, des agencements et installations de locaux commerciaux habituellement ouverts à la clientèle, créés ou acquis à l'état neuf.

Or l'interprétation de la notion d'investissements hôteliers a évolué dans la jurisprudence récente. Le Conseil d'État a jugé il y a quelques mois, en novembre 2020, que l'activité des campings ne pouvait être assimilée à de l'hôtellerie, si bien que les investissements réalisés par un exploitant de camping ne sont plus éligibles au régime de l'amortissement dégressif.

En revanche, la cour administrative d'appel de Marseille a jugé au même moment, pour le cas des cliniques, que les locaux dans lesquels étaient fournies des prestations d'hôtellerie pouvaient être considérés comme des locaux commerciaux habituellement ouverts à la clientèle, donc éligibles au crédit d'impôt pour les investissements réalisés en Corse.

Même si elle n'a pas jugé précisément du cas qui nous occupe, il semble que cette dernière jurisprudence soit transposable à certains investissements réalisés dans les campings, notamment aux habitations légères de loisirs.

En tout état de cause, de tels investissements ne peuvent être éligibles au crédit d'impôt pour des investissements réalisés en Corse que s'ils remplissent toutes les conditions posées par la loi et la jurisprudence. Cela implique notamment que les équipements soient acquis à l'état neuf et que la fourniture de prestations hôtelières permette de qualifier ces locaux de locaux commerciaux. Le respect de ces conditions, qui s'appliquent à tous les bénéficiaires du crédit d'impôt, est vérifié au cas par cas par les services fiscaux.

Dans ces circonstances, et afin de tenir compte de ces jurisprudences contradictoires, mes services travaillent actuellement à la mise à jour de la doctrine administrative relative au crédit d'impôt pour les investissements réalisés en Corse. Celle-ci devrait être publiée dans les toutes prochaines semaines.

Vous l'avez compris, monsieur le sénateur, la complexité de cette jurisprudence nous oblige à faire preuve de prudence et à effectuer ce travail préparatoire.

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