Question de Mme HERZOG Christine (Moselle - NI) publiée le 11/02/2021

Mme Christine Herzog rappelle à M. le ministre de l'intérieur les termes de sa question n°18192 posée le 15/10/2020 sous le titre : " Litiges liés à l'utilisation de moyens de vidéosurveillance privés ", qui n'a pas obtenu de réponse à ce jour. Elle s'étonne tout particulièrement de ce retard important et elle souhaiterait qu'il lui indique les raisons d'une telle carence.

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 21/04/2022

Les particuliers ont la possibilité d'installer un système de vidéosurveillance au sein de leur propriété, sous réserve que ce dispositif ne filme ni la voie publique, ni les passants, ni la propriété de leurs voisins. En effet, s'agissant tout d'abord des dispositifs de vidéoprotection filmant la voie publique, les personnes compétentes pour les mettre en œuvre sont limitativement énumérées aux articles L. 223-1 et L. 251-2 du code de la sécurité intérieure (CSI). Or ces articles n'autorisent pas les particuliers à enregistrer des images prises sur la voie publique. En dehors des autorités publiques compétentes, seules y sont autorisés, d'une part, les personnes morales « pour la protection des abords immédiats de leurs bâtiments et installations […] dans les lieux susceptibles d'être exposés à des actes de terrorisme  » (article L. 223-1 du CSI) et, d'autre part, les commerçants pour des finalités restreintes à « la protection des abords immédiats de leurs bâtiments et installations, dans les lieux particulièrement exposés à des risques d'agression ou de vol  » (dernier alinéa de l'article L. 251-2 du CSI). S'agissant des particuliers, les dispositifs de vidéosurveillance ne peuvent donc filmer que l'intérieur de leur propriété (par exemple, l'intérieur de la maison ou de l'appartement, le jardin, le chemin d'accès privé), et non la voie publique, y compris pour assurer la sécurité de leur véhicule garé devant leur domicile. Par ailleurs, tout dispositif de vidéosurveillance installé par un particulier qui filme la propriété de ses voisins, dans le cas d'espèce une partie du jardin, pourrait être considéré comme portant atteinte à la vie privée et serait donc contraire à l'article 9 du code civil qui dispose que « chacun a droit au respect de sa vie privée  ». S'agissant des éventuels litiges, il est possible pour un particulier d'obtenir les mesures préventives et curatives prévues par l'article 9 du code civil si deux conditions cumulatives sont réunies : une immixtion dans sa sphère privée, d'une part, et une atteinte non consentie, d'autre part. Ainsi, le juge pourra prescrire, en référé si l'urgence est caractérisée, « toutes mesures, telles que séquestre, saisie et autres, propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l'intimité de la vie privée ». Il pourra notamment ordonner la suppression du matériel de vidéosurveillance installé. En outre, le juge pourra assurer la réparation du trouble causé par l'octroi de dommages et intérêts à la victime de l'atteinte. A ce titre, la jurisprudence considère que « le seul constat de l'atteinte à la vie privée ouvre droit à réparation » (Civ, 5 novembre 1996). Sur le plan pénal, l'article 226-1 réprime d'un an d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende « le fait, au moyen d'un procédé quelconque, volontairement de porter atteinte à l'intimité de la vie privée d'autrui […] 2° en fixant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de celle-ci, l'image d'une personne se trouvant dans un lieu privé ». Un particulier qui filmerait son voisin dans sa propriété privée, à son insu, est donc susceptible d'être pénalement poursuivi. Par ailleurs, s'il estime qu'un dispositif de vidéosurveillance ne respecte pas ses droits en matière de protection des données à caractère personnel, un particulier peut saisir la Commission nationale de l'informatique et des libertés, par voie postale ou électronique, d'une plainte relative au système de vidéosurveillance mis en place par son voisin. En tout état de cause, le maire ne dispose pas de pouvoir de police pour intervenir en la matière. En outre, le dispositif n'est pas soumis à une autorisation administrative préalable et, enfin, il est utilisé exclusivement dans un cadre privé. Le maire n'est ainsi tenu qu'au signalement des infractions dont il aurait connaissance dans l'exercice de ses missions, sur le fondement de l'article 40, alinéa 2 du code de procédure pénale, comme rappelé par l'article L. 132-2 du code de la sécurité intérieure.

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