Question de M. LEFÈVRE Antoine (Aisne - Les Républicains) publiée le 11/02/2021

M. Antoine Lefèvre attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur le malaise croissant vécu par les employés de l'office national des forêts (ONF) compte tenu des réductions drastiques d'effectifs qui y sont menées.
Les baisses d'effectifs doivent s'ajouter à une invasion de scolytes, insecte ravageur creusant des galeries dans les épicéas afin d'y pondre leurs œufs, dans les étendues forestières des Hauts-de-France et de la région Grand-Est. L'accroissement de la masse de travail occasionné par la gestion de cette invasion, dévastatrice pour l'équilibre des faunes et flores forestières, donne lieu à une surcharge intenable pour les 8 000 agents forestiers plutôt que d'être contré par un renforcement des effectifs. Dans l'Aisne, les 144 000 hectares de surface forestière doivent être entretenues et gérées par seulement 36 agents, qui doivent en conséquence rationaliser leurs journées au détriment de la qualité du travail voire de leur propre santé. Entre 2005 et 2020, 51 agents de l'ONF ont ainsi mis fin à leurs jours, une donnée particulièrement alarmante.
Les constats de recours croissant à des offres privées de personnel afin d'assurer des missions de police forestière posent notamment question sur le regard porté par l'État sur sa mission de protection des patrimoines forestiers, et laissent entrevoir un désengagement progressif qui serait lourdement préjudiciable à la santé des forêts et du patrimoine naturel.
Déjà à l'origine d'une question adressée en 2012 sur cette même problématique, il aimerait ainsi obtenir des précisions auprès de Monsieur le Ministre sur les velléités, avérées ou non, de privatisation progressive des opérateurs de gestion et d'entretien de nos forêts.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 18/03/2021

Le Gouvernement est attaché à la pérennité de l'office national des forêts (ONF) et entend conserver l'unité de gestion des forêts publiques, domaniales et communales, par l'ONF. Pour mener une politique forestière ambitieuse et de développement des usages du bois, l'État a besoin d'un ONF fort et performant, au regard des défis que rencontre la forêt face au changement climatique et du potentiel qu'elle représente par la valorisation des matériaux bois dans l'atténuation du changement climatique. L'ONF est plus que jamais un outil précieux. Il s'agit de maintenir les différents services que les forêts publiques rendent, que ce soit les services économiques, environnementaux, climatiques ou sociétaux. La gestion durable et multifonctionnelle est au cœur du modèle de l'ONF et doit le rester. Ce principe sera au cœur du contrat entre l'État et l'ONF, qui prendra la suite du contrat d'objectifs et de performance (COP) 2016-2020. Pour autant, l'ONF connaît depuis maintenant plusieurs années une situation financière en déséquilibre, qui est à court terme aggravée par la crise des scolytes dans l'Est de la France et par la crise économique du fait de l'épidémie de covid-19. Le Gouvernement compte bien apporter des solutions, en ciblant les causes structurelles de la situation de l'établissement. Le début de l'année 2021 est consacré aux derniers ajustements du nouveau contrat État-ONF, en particulier au regard de l'évolution rapide des estimations des recettes des ventes de bois de l'ONF dans le contexte de crise mais aussi de la volonté du Gouvernement d'associer étroitement aux orientations les représentants des communes forestières nouvellement élus, qui ont également à engager de leur côté une convention avec l'ONF et de laisser se mener les réflexions en interne à l'ONF dans le cadre de son projet stratégique. Les conclusions de ces travaux sont attendues avant la fin du premier trimestre 2021. Elles se traduiront par la signature d'un nouveau contrat entre l'État et l'ONF, comportant un volet spécifique sur l'outre-mer, associé à une trajectoire financière 2021-2025 intégrant de nouveaux financements et un modèle économique rénové. Dans l'attente des derniers arbitrages, la loi de finances 2021 intègre d'ores et déjà une revalorisation substantielle des financements apportés par l'État sur les missions d'intérêt général confiées à l'ONF avec une augmentation de près de 10 millions d'euros, qui souligne le rôle central dévolu à l'ONF dans le cadre des politiques publiques de prévention des risques face au changement climatique ou encore de protection et préservation de la biodiversité. L'article L. 222-6 du code forestier pose le principe de l'emploi de personnel sous statut par l'office national des forêts. Compte tenu des besoins nouveaux auxquels l'ONF a été confronté depuis sa création, la part des salariés de droit privé s'est progressivement accrue et représente aujourd'hui environ 43 % du personnel de l'office. Le contrat d'objectif et de performance conclu entre l'État et l'établissement pour la période 2016-2020 a pris acte de cette évolution et appelé à amplifier le mouvement alors qu'un nombre important de personnels fonctionnaires partira à la retraite au cours de ces prochaines années. Le rapport inter-inspections remis aux tutelles de l'ONF en juillet 2019 propose, dans sa troisième recommandation, de donner à l'ONF la maîtrise de sa politique de ressources humaines. En outre, il s'agit d'un levier pour permettre une politique de gestion prévisionnelle des emplois et compétences plus efficiente, en répondant mieux aux mutations des métiers et à l'évolution de l'environnement économique et commercial. Dans ce contexte, la loi « accélération et simplification de l'action publique » vise à favoriser le recrutement de collaborateurs de droit privé au sein de l'office. Ce faisant, cette loi ne vise pas à modifier le statut actuel des fonctionnaires exerçant leur activité au sein de l'établissement, mais elle aura pour effet à moyen terme d'alléger le poids du compte d'affectation spécial, pension dans le modèle économique de l'office. En tout état de cause, les organisations représentatives des personnels de l'ONF seront consultées lors de l'élaboration de l'ordonnance correspondante.

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