Question de M. MAUREY Hervé (Eure - UC) publiée le 18/02/2021

M. Hervé Maurey attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique sur les pouvoirs des élus en matière d'implantation d'infrastructures de production d'énergie.
Les projets de construction d'infrastructures de production d'énergie renouvelable se multiplient sur le territoire français. Les politiques publiques visant à accélérer le développement des énergies renouvelables favorisent cette dynamique.
La programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) prévoit ainsi de parvenir à un objectif de 33 % d'énergies renouvelables en 2030. En particulier, elle vise un doublement de la production d'électricité d'éolienne d'ici à 2028, ce qui conduira à faire passer le parc éolien de 8 000 mâts fin 2018 à environ 14 500 en 2028.
L'impact de ces installations nécessite que leur implantation se fasse en concertation avec les habitants et les élus des territoires concernés, au premier rang desquels les maires. Aujourd'hui, les projets d'infrastructures de production d'énergie peuvent être décidés et aboutir sans l'approbation des élus des zones d'implantation.
Or, ces équipements, notamment les éoliennes et les méthaniseurs, peuvent avoir des effets indésirés pour un territoire et ses habitants. Cette situation conduit à réduire leur acceptabilité au sein de la population et risque de créer l'effet inverse de celui recherché en ralentissant le développement de ces modes de production d'énergie.
Le Président de la République a lui-même indiqué, s'agissant des éoliennes, le 14 janvier 2020 que « le consensus autour de l'éolien est en train de nettement s'affaiblir dans notre pays ».
Dans ce contexte, il semble indispensable d'envisager de donner au maire le pouvoir de s'opposer à la construction de ce type d'infrastructures ou a minima leur conférer un droit de regard sur leur lieu d'implantation.
Aussi, il souhaite connaître ses intentions en la matière.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre de la transition écologique, chargé de la biodiversité publiée le 10/03/2021

Réponse apportée en séance publique le 09/03/2021

Mme le président. La parole est à M. Hervé Maurey, auteur de la question n° 1530, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.

M. Hervé Maurey. Madame la secrétaire d'État, les projets d'installation de production d'énergie renouvelable se multiplient sur le territoire français. Si l'objectif consistant à développer de telles énergies est largement partagé, il n'en demeure pas moins que les modes de production de celles-ci ne sont pas sans impact pour les populations environnantes – nuisances esthétiques, sanitaires ou encore olfactives – et qu'ils sont préjudiciables à la population et à l'attractivité du territoire. Cela fait donc naître, très souvent, des mouvements d'opposition à l'implantation de ces installations. En outre, ces structures ont aussi des conséquences – il ne faut pas le nier – sur la valeur des biens situés à proximité.

Il est donc nécessaire que ces installations soient réalisées en accord avec les habitants et les élus des territoires concernés, au premier rang desquels figurent les maires. Ce n'est malheureusement pas le cas ; très souvent, ces projets sont menés sans l'accord des élus concernés.

Les tensions vont s'accroître, puisque l'accélération du développement des énergies renouvelables est inscrite dans la programmation pluriannuelle de l'énergie, avec, d'ici à 2028, le doublement de la production d'électricité éolienne et la création de 7 000 mâts supplémentaires. Cette implantation à marche forcée a d'ailleurs conduit le Président de la République lui-même à affirmer, en janvier 2020, que « le consensus sur l'éolien est en train de nettement s'affaiblir dans notre pays », sans tirer, malheureusement, les conséquences de ce constat.

Des projets d'installation de méthaniseurs sont également source d'une inquiétude réelle dans nos territoires.

Dans ce contexte, il semble donc indispensable de donner la capacité aux élus municipaux de s'opposer à de telles réalisations ; c'est ce que j'ai préconisé au travers de la proposition de loi que j'ai déposée l'été dernier.

Par conséquent, je souhaite connaître, madame la secrétaire d'État, la position du Gouvernement sur la proposition consistant à doter les élus locaux du pouvoir de s'opposer à l'implantation d'équipements qui peuvent nuire à la qualité de vie sur leur territoire.

Mme le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Maurey, le Parlement a effectivement adopté des objectifs ambitieux de développement des énergies renouvelables, et je l'en félicite. Ainsi, d'ici à 2030, 40 % de notre électricité et 10 % du gaz consommé en France devront être d'origine renouvelable.

Pour atteindre ces objectifs, nous avons besoin de développer ces énergies renouvelables et, en particulier, l'éolien. Les études montrent que l'énergie éolienne est efficace. D'abord, elle est bonne pour le climat, puisque, en 2019, elle a permis d'éviter l'équivalent des émissions de près de 8 millions de véhicules, tout en couvrant plus de 7 % de la consommation électrique française. Ensuite, la filière a permis de créer plus de 20 000 emplois directs ou indirects en France.

Vous souhaitez, et je vous rejoins en cela, que les élus participent, avec plus de pouvoir, à la planification du développement de l'éolien et de la méthanisation, en ayant un droit de regard sur ces projets. L'implication des collectivités territoriales dans le développement des énergies renouvelables est absolument indispensable et le Gouvernement propose, dans le cadre du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, qui est en cours d'examen, une déclinaison par région des objectifs d'énergies renouvelables de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE).

Cette nouvelle disposition permettra, en concertation avec les régions et les collectivités, de répartir les objectifs de développement de chaque énergie renouvelable, y compris l'éolien et la méthanisation, en fonction des potentiels et des spécificités de chaque territoire et de chaque région. Avec la définition de tels objectifs régionalisés de développement de ces énergies, les territoires disposeront d'une plus grande visibilité, à leur échelle, pour ce qui concerne tant les besoins que les possibilités de développement de ces énergies.

En outre, la réglementation garantit déjà l'implication des élus locaux lors du processus d'autorisation d'une installation éolienne ; leur avis est systématiquement demandé lors de l'enquête publique. La loi du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique, dite ASAP, dispose que les développeurs éoliens doivent transmettre au maire de la commune d'implantation le résumé non technique de l'étude d'impact, au moins un mois avant le dépôt de la demande d'autorisation.

Nous travaillons également, avec la filière, à l'élaboration d'une charte, pour associer encore plus les collectivités aux phases préliminaires de ces projets.

Enfin, je souligne que les documents locaux d'urbanisme qui sont à la main des élus locaux, tels que les schémas de cohérence territoriale et les plans locaux d'urbanisme, concourent aussi à cette implication locale que vous demandez et que nous souhaitons également.

Mme le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour la réplique.

M. Hervé Maurey. Je prends acte de votre non-réponse, madame la secrétaire d'État…

J'ai posé une question très simple : le Gouvernement est-il disposé à ce que les élus locaux puissent avoir un droit de veto – c'est très clair – sur l'installation d'équipements qui posent un problème en matière de qualité de vie de leurs habitants et d'attractivité de leur commune ? Vous n'avez pas répondu à cette question. Vous m'avez rappelé la réglementation et l'intérêt des énergies renouvelables ; c'est très bien, mais là n'est pas la question.

Je crains donc de comprendre : le Gouvernement ne compte pas donner suite à la proposition que j'ai formulée. Je le regrette, parce que l'on demande de plus en plus aux élus, qui sont de plus en plus impliqués.

Mme le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Hervé Maurey. Sur des sujets aussi fondamentaux, on peut faire sans leur autorisation ; ce n'est pas acceptable.

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