Question de Mme COHEN Laurence (Val-de-Marne - CRCE) publiée le 04/02/2021

Mme Laurence Cohen interroge M. le ministre des solidarités et de la santé sur les menaces qui pèsent sur le service de chirurgie cardiaque de l'hôpital Henri-Mondor, situé à Créteil (94).
En effet, le directeur de l'assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP) a indiqué, dans un courrier à l'agence de biomédecine, qu'il ne serait plus pratiqué de transplantation cardiaque au sein de cet établissement, et que cet acte serait transféré à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière (75).
Cette décision, prise sans concertation, si elle était confirmée, serait un nouveau coup porté à cet hôpital de renommée, après le transfert de la greffe hépatique en 2018.
De plus, cette suppression affaiblirait considérablement les autres actes de chirurgie cardiaque et de cardiologie interventionnelle, tout comme l'enseignement, la recherche et de fait porterait un coup à l'attractivité générale de cet établissement.
Par ailleurs, cette disparition constituerait une contradiction et une gabegie financière puisqu'un nouveau bâtiment de réanimation, blocs, intervention avec vingt et une salles vient d'ouvrir ses portes, pour un coût de 70 millions d'euros de travaux.
Enfin, cette décision est contraire au projet régional de santé 2018-2022, qui comprend bien le maintien de tous les sites de chirurgie cardiaque en Île-de-France.
Les explications données par le directeur de l'AP-HP, à savoir la création d'un projet « bi-site » avec un partenariat entre Mondor et la Pitié-Salpêtrière, ne convainquent guère, tant il n'existe aucune garantie sur l'autonomie propre de l'hôpital Henri-Mondor ou sur le développement de ce pôle cardiologique pour les années à venir. Qui plus est, se servir de la pandémie, qui a entraîné des déprogrammations d'opérations dans tous les établissements hospitaliers de France, pour attaquer le peu d'activité de ce service, est particulièrement fallacieux.
Depuis des années, les hôpitaux publics sont victimes de restructurations, qui, sous prétexte de modernité, réduisent considérablement l'offre de soins. À Créteil, élus, syndicalistes, usagers, en lien avec la coordination de vigilance du groupement hospitalier universitaire de Mondor, se mobilisent pour s'opposer à ce projet de transfert, qui avait déjà été tenté il y a dix ans.
Aussi, elle lui demande d'intervenir pour que la direction de l'AP-HP renonce à cette suppression, et pour que l'hôpital Henri-Mondor puisse conserver son service de greffe cardiaque et ainsi renforcer ses activités qui en font aujourd'hui un établissement de pointe, situé en petite couronne.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur - Citoyenneté publiée le 10/03/2021

Réponse apportée en séance publique le 09/03/2021

Mme le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, auteure de la question n° 1500, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.

Mme Laurence Cohen. Cette question s'adressait au ministre des solidarités et de la santé. Malgré vos compétences, madame la ministre, je regrette de ne pas pouvoir échanger directement avec votre collègue sur une question d'importance pour le Val-de-Marne et, au-delà, pour l'Île-de-France.

Le projet en question consiste tout de même à supprimer les transplantations cardiaques à l'hôpital Henri-Mondor, dans le Val-de-Marne, pour les transférer à l'hôpital de La Pitié-Salpêtrière, à Paris.

Cette décision de Martin Hirsch, directeur de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), a été rendue publique via un courrier adressé à l'Agence de la biomédecine, sans aucune concertation.

Elle est dénoncée par une partie de la communauté médicale, la Coordination de vigilance du groupe hospitalier universitaire (GHU), dans laquelle se retrouvent usagers, syndicalistes, élus de toutes sensibilités politiques, y compris de la majorité présidentielle.

Face aux inquiétudes de tous les parlementaires de ce département et à ma demande de rencontre, M. Véran nous a répondu, le 5 mars dernier, en motivant ce transfert par des raisons de sécurité.

Utiliser le nombre de transplantations en baisse sans tenir compte de la situation pandémique est plus que fallacieux ! Ce transfert est un vieux serpent de mer, puisque nous avons déjà dû mener une bataille d'ampleur voilà dix ans pour nous y opposer. Nous avions d'ailleurs gagné cette bataille grâce à la mobilisation des Val-de-Marnaises et des Val-de-Marnais, sous la houlette notamment du président du conseil départemental, Christian Favier, et de la Coordination de vigilance.

Madame la ministre, le Gouvernement est-il prêt aujourd'hui à tout mettre en œuvre pour abandonner ce transfert ?

Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté. Madame la sénatrice Laurence Cohen, nous partageons toutes et tous le même souci d'un meilleur accès aux soins pour l'ensemble des Français. C'est une question essentielle.

Le ministre des solidarités et de la santé, Olivier Véran, m'a chargée de vous répondre.

Celui-ci souhaite porter à votre connaissance le fait que près de 500 patients reçoivent une greffe cardiaque chaque année en France. C'est l'un des domaines d'excellence de nos hôpitaux, dans lequel notre pays ne cesse de se perfectionner et d'innover.

Les opérations de greffe cardiaque sont des opérations lourdes, techniques, risquées pour la vie des patients. Elles nécessitent des hospitalisations longues.

Au premier semestre 2019, plusieurs opérations de greffe cardiaque réalisées à l'hôpital Henri-Mondor n'ont malheureusement pas permis de sauver la vie de leurs receveurs. Cela a conduit les équipes de cet hôpital et de l'hôpital de La Pitié-Salpêtrière, qui font tous deux partie de l'AP-HP, à engager une réflexion commune, avec un seul objectif : la meilleure qualité des soins et l'accès de tous aux meilleures pratiques.

Cette démarche a abouti à une organisation coordonnée des activités de cardiologie entre les deux sites. Les opérations de greffe cardiaque sont désormais concentrées sur le site de La Pitié-Salpêtrière. Cette organisation doit bénéficier à l'ensemble des patients en attente d'une greffe cardiaque en France, tout particulièrement les patients du Val-de-Marne et du sud de l'Île-de-France.

Dans cette organisation, le pôle de cardiologie de Mondor est, lui, bien maintenu. Le Gouvernement et le ministre des solidarités et de la santé, par ma voix, en prennent l'engagement. Ce pôle doit poursuivre ses activités en dehors des opérations de greffe, avec une ambition universitaire très forte – vous savez que c'est important sur ce site.

Au-delà de la cardiologie, les activités d'Henri-Mondor se développent, notamment les services de soins critiques, tellement sollicités depuis un an, avec la création d'un nouveau bâtiment spécifiquement dédié à ce type de soins.

L'AP-HP a pris des engagements. Nous nous assurerons qu'ils seront respectés, pour le bien de tous les patients devant recourir à des services de cardiologie de qualité.

Mme le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour la réplique.

Mme Laurence Cohen. Madame la ministre, les éléments que vous m'avez communiqués peuvent éventuellement nous rassurer, mais j'insiste sur les inquiétudes des élus, des syndicalistes et des usagers.

En effet, si jamais ce transfert était confirmé, ce serait un nouveau coup porté à l'hôpital Mondor, après le transfert de la greffe hépatique effectué en 2018 malgré l'opposition de la communauté médicale.

De plus, ce transfert affaiblirait la cardiologie interventionnelle, tout comme l'enseignement et la recherche, et porterait atteinte à l'attractivité générale de cet établissement. Il est très important de prendre cet élément en compte.

Au reste, si cette décision était confirmée, elle irait à l'encontre du projet régional de santé 2018-2022, qui prévoit le maintien de tous les sites de chirurgie cardiaque en Île-de-France.

Enfin, comme vous l'avez précisé, cet hôpital fait l'objet d'investissements très forts. Des travaux ont été réalisés : 70 millions d'euros viennent d'être dépensés pour ouvrir 21 salles, blocs et services de réanimation. Il y a d'autres possibilités à faire valoir !

Vraiment, madame la ministre, j'insiste pour que ce projet mortifère soit abandonné et pour que nous soyons reçus afin d'examiner les modalités concrètes ensemble. Je vous en remercie d'avance.

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