Question de M. DÉTRAIGNE Yves (Marne - UC) publiée le 28/01/2021

M. Yves Détraigne souhaite appeler l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la création d'un code de la copropriété.
Outre les modifications qu'elle a apportées au droit de la copropriété, la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018, dite ELAN, habilitait, en son article 215, le pouvoir exécutif à codifier le droit de la copropriété : « Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à procéder par voie d'ordonnance à l'adoption de la partie législative d'un code relatif à la copropriété des immeubles bâtis afin de regrouper et organiser l'ensemble des règles régissant le droit de la copropriété. Le Gouvernement peut, à ce titre, apporter les modifications qui seraient rendues nécessaires pour assurer le respect de la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes ainsi rassemblés, harmoniser l'état du droit, remédier aux éventuelles erreurs et abroger les dispositions devenues sans objet ».
Le même article 215 précisait que cette ordonnance de codification devrait être prise dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la loi, soit avant le 23 novembre 2020. Force est de constater qu'une telle ordonnance n'a pas vu le jour, au grand dam des praticiens.
Pourtant, la jurisprudence du Conseil constitutionnel fait de l'accessibilité et de l'intelligibilité de la loi un « objectif de valeur constitutionnelle » (décision n° 99-421 DC du 19 décembre 1999 à propos de l'habilitation donnée par le Parlement de procéder à la codification de textes, par voie d'ordonnance), faute de quoi l'adage « nul n'est censé ignorer la loi » est réduit à un vœu pieu.
En conséquence, il lui demande de lui indiquer pour quelles raisons le droit de la copropriété ne bénéficie toujours pas de l'apport d'une base cohérente et ordonnée, alors que l'effort de l'État en faveur de l'accessibilité du droit s'est traduit, depuis vingt ans, par la création de nombreux codes, tels que le code de la recherche en 2004, le code du cinéma et de l'image animée en 2009 ou encore le code minier en 2011.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 09/09/2021

La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018, dite loi ELAN, a habilité le Gouvernement à opérer une vaste réforme du droit de la copropriété des immeubles bâtis. Le Gouvernement s'est vu confier la mission, d'une part, de réformer par ordonnance le droit de la copropriété des immeubles bâtis, notamment afin de clarifier, simplifier, moderniser et adapter un grand nombre de règles affectant leur fonctionnement et les droits et obligations de leurs organes ainsi que ceux des copropriétaires, et d'autre part, de rassembler ce droit réformé en un code organisé et cohérent. Prise en application de cette loi, l'ordonnance n° 2019-2021 du 30 novembre 2019 portant réforme du droit de la copropriété des immeubles bâtis a procédé à un travail de simplification et de clarification afin d'améliorer la gestion des immeubles en copropriété et de réduire les litiges contentieux. Ainsi, les modalités de prise de décision ont été simplifiées et le rôle et les pouvoirs du conseil syndical renforcés. La gestion des petites copropriétés a aussi été simplifiée. De nombreuses règles issues de la jurisprudence ont également été consacrées dans la loi afin de rendre le droit de la copropriété plus intelligible et plus accessible. Des dispositions spécifiques ont été adoptées pour clarifier et sécuriser le régime juridique de certaines notions centrales du droit de la copropriété, telles que celles de parties communes générales et spéciales, de droit de jouissance privatif sur parties communes ou de servitudes sur parties communes. Enfin, les règles applicables au renouvellement et à la résiliation du contrat de syndic ont été précisées et rassemblées dans la loi du 10 juillet 1965. Cette réforme a été conduite dans le délai d'un an imparti par le Parlement. Dans le même temps, de nombreuses mesures d'application de la loi du 23 novembre 2018 ont été prises : le décret n° 2019-650 du 27 juin 2019 portant diverses mesures relatives au fonctionnement des copropriétés et à l'accès des huissiers de justice aux parties communes d'immeubles, les décrets du 23 mai 2019 n° 2019-502 relatif à la liste minimale des documents dématérialisés concernant la copropriété accessibles sur un espace sécurisé en ligne et n° 2019-503 fixant le montant minimal des pénalités applicables au syndic de copropriété en cas d'absence de communication des pièces au conseil syndical. Enfin, un arrêté du 2 juillet 2020 a fixé le modèle de formulaire de vote par correspondance aux assemblées générales de copropriétaires. En outre, le décret n° 2020-834 du 2 juillet 2020 a été pris pour l'application de l'ordonnance du 30 octobre 2019. Il a été suivi d'un arrêté du 20 août 2020 modifiant l'arrêté du 14 mars 2005 relatif aux comptes du syndicat des copropriétaires et d'un décret n° 2020-1229 du 7 octobre 2020 portant diverses mesures d'application, lequel a parachevé les travaux de réforme entrepris par le gouvernement. L'intégralité de cette réforme, qui touche à des problématiques affectant le quotidien de très nombreux français et qui était appelée de leurs vœux tant par les associations que par les professionnels du secteur, a été menée à son terme en moins de deux ans. Parallèlement, le Gouvernement a saisi la Commission supérieure de codification du projet de création d'un code de la copropriété des immeubles bâtis. Au terme de sa séance du 11 juin 2019, la Commission a émis un avis public favorable à ce projet tout en relevant la difficulté de réaliser une telle codification du droit de la copropriété concomitamment à une réforme d'ampleur de ce droit. En effet, il n'a pas été possible de réaliser la codification « à droit constant » prévue par l'article 215 de la loi ELAN alors que la réforme du droit de la copropriété rappelée ci-dessus n'était ni achevée ni stabilisée. L'ambition de réalisation d'un code de la copropriété n'est cependant pas abandonnée. Les services du ministère de la justice continuent d'y travailler même si elle nécessitera une nouvelle intervention du Parlement à cette fin.

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