Question de M. RAMBAUD Didier (Isère - RDPI) publiée le 21/01/2021

Question posée en séance publique le 20/01/2021

M. le président. La parole est à M. Didier Rambaud, pour le groupe RDPI. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Didier Rambaud. Monsieur le ministre, alors que des discussions ont été ouvertes entre le québécois Couche-Tard et le groupe Carrefour en vue d'une fusion, vous avez mis fin à cette tentative de rapprochement au nom de la sécurité alimentaire de notre pays.

Nous ne pouvons que nous féliciter de ce retour du politique dans le domaine commercial. Vous avez su le rappeler : en temps de crise, l'État a plus que jamais son mot à dire dans les interventions d'investisseurs étrangers, surtout lorsqu'il s'agit du premier employeur privé de France.

C'est le sens de la disposition que nous avons adoptée dans la loi Pacte, qui a modernisé le dispositif de contrôle des investissements directs étrangers dans les secteurs stratégiques.

Au fond, de quoi est-il question ici ? D'un groupe de plus de 364 000 salariés, ce qui en fait, j'insiste sur ce point, le premier employeur privé français. Ce groupe était en passe d'être racheté par un géant canadien de la grande distribution, qui réalise plus de 70 % de son chiffre d'affaires dans les carburants.

Carrefour, c'est une entreprise qui rayonne, qui s'est installée sur tous les continents et dont les dernières performances économiques sont prometteuses, que ce soit en France ou dans le reste du monde. Autant dire, monsieur le ministre, que son rachat ne va pas de soi.

Il n'est d'ailleurs possible que pour une seule raison : parce que, depuis la crise de 2008, les indices boursiers ont doublé outre-Atlantique, tandis que les indices européens sont restés en deçà de leur niveau d'avant la crise. C'est donc bien une extraordinaire bulle financière qui permet à Couche-Tard d'envisager une telle opération, alors que son activité réelle reste inférieure à celle du géant français.

Pour toutes ces raisons, nous soutenons cette décision courageuse, mais certaines questions restent en suspens, notamment le développement de l'e-commerce, que Carrefour devra désormais financer seul.

Et que dire de l'image de la France, qui doit rester une terre d'investissements et une nation attractive ? C'est tout l'engagement du Président de la République et de la majorité présidentielle.

Aussi, pourriez-vous, monsieur le ministre, nous préciser les raisons qui vous ont conduit à prendre cette décision courageuse (Marques d'ironie sur les travées du groupe Les Républicains.) et rassurer les investisseurs étrangers sur la position de la France et son attractivité ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)


Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la relance publiée le 21/01/2021

Réponse apportée en séance publique le 20/01/2021

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance.

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la relance. Monsieur le sénateur Rambaud, je pense que vous avez parfaitement résumé les choses. (Nouvelles marques d'ironie sur les travées du groupe Les Républicains.)

Une grande entreprise étrangère veut racheter le premier employeur privé de France, Carrefour. Si certains ici veulent laisser à une grande entreprise étrangère la liberté de racheter sans coup férir le premier employeur privé de France, garant de notre sécurité alimentaire et représentant 20 % de la distribution alimentaire de notre pays, grand bien leur fasse ! Pour ma part, je pense que la responsabilité de l'État est de garantir la sécurité alimentaire des Français et de les protéger en sécurisant les approvisionnements. C'est ce que nous avons fait. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Si c'était à refaire, nous reprendrions exactement la même décision, qui, je le rappelle, est conforme au texte de loi que vous avez voté, puisque nous avons prévu, au titre des décrets sur les investissements étrangers en France, de contrôler les investissements dans la distribution alimentaire. Le règlement européen le prévoit également : il établit de manière très claire que la distribution alimentaire est un enjeu absolument stratégique.

Il l'est encore plus au lendemain d'une pandémie qui nous a appris que des produits agricoles pouvaient ne plus circuler. Notre responsabilité est donc de garantir la sécurité alimentaire des Français d'un bout à l'autre de la chaîne, de la production agricole jusqu'à la distribution alimentaire, en passant par la transformation via l'industrie agroalimentaire, qui fait notre fierté.

Cela remet-il en cause l'attractivité de notre pays ? Tous ceux qui nous donnent des leçons feraient mieux d'être fiers que la France soit devenue, sous l'autorité du Président de la République et à la suite des décisions qui ont été prises par le Gouvernement et la majorité, la première terre d'investissements étrangers en Europe. Nous sommes le pays le plus attractif sur le continent (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) et nous le resterons, car nous maintiendrons la même politique de soutien aux entreprises et d'ouverture aux investissements étrangers. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

- page 264

Page mise à jour le