Question de M. REICHARDT André (Bas-Rhin - Les Républicains-A) publiée le 28/01/2021

M. André Reichardt attire l'attention de Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales concernant les dispositions du décret n° 2019-717 du 5 mars 2019 relatif aux aires de grand passage.
En effet, ce décret impose de nouvelles normes aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) chargés de l'aménagement et de la gestion des aires pour gens du voyage, y compris pour les collectivités locales ayant déjà rempli leur obligation en créant une aire de grand passage sur leur territoire. Ainsi, la mise en place d'une norme de superficie équivalente à quatre hectares est particulièrement problématique dans le contexte de tension foncière de certains départements, dont celui du Bas-Rhin qu'il représente au Sénat.
Il est regrettable de déplorer sur ce point l'absence de concertation en amont de la publication de ce décret avec les associations d'élus, qui attendaient depuis un moment ce texte.
Cette superficie, désapprouvée par les représentants locaux des gens du voyage siégeant à la commission départementale consultative, est d'ailleurs de nature à favoriser la constitution de groupes dont la taille entraînera régulièrement des difficultés de gestion et de cohabitation.
Or, à défaut d'une mise aux normes rapide, et difficile considérant la réalité des aménagements, les collectivités territoriales concernées risquent d'être impactées négativement par des occupations sauvages, dans la mesure où elles ne seront plus conformes à la réglementation.
Ensuite, bien entendu, ces exigences nouvelles augmentent à due proportion la charge financière des EPCI, sans compensation. En effet, les aires de grand passage ne bénéficient d'aucune aide en fonctionnement et les seules aides à l'investissement n'interviennent qu'à travers la dotation d'équipements des territoires ruraux (DETR).
Aussi, il souhaite savoir quelles aides l'État peut apporter aux EPCI pour résoudre ces difficultés : s'il est envisageable d'apporter une modification au décret concerné ; et, sinon, le cas échéant, quels accompagnements financiers peuvent être mobilisés pour aider les EPCI à faire face aux charges nouvelles tout autant en termes d'investissement que de fonctionnement.
Il faut donner les moyens à nos élus de terrain de mettre en œuvre des mesures parfois prises sans connaissance, ni considération de leurs besoins !

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Transmise au Ministère auprès de la ministre de la transition écologique - Logement


Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre de la transition écologique, chargé de la biodiversité publiée le 10/03/2021

Réponse apportée en séance publique le 09/03/2021

Mme le président. La parole est à M. André Reichardt, auteur de la question n° 1487, transmise à Mme la ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement.

M. André Reichardt. Madame la secrétaire d'État, je souhaite appeler l'attention du Gouvernement sur les dispositions du décret n° 2019-171 du 5 mars 2019 relatif aux aires de grand passage destinées aux gens du voyage. En effet, ce décret impose de nouvelles normes aux EPCI chargés de l'aménagement et de la gestion de ces aires, y compris à ceux qui ont déjà rempli leurs obligations en créant une aire de grand passage sur leur territoire.

Ainsi, la mise en place d'une norme de superficie de 4 hectares – excusez du peu ! – est particulièrement problématique dans le contexte de tension foncière de certains départements, dont celui du Bas-Rhin, qui est le mien. Cette superficie, d'ailleurs désapprouvée en son temps par les représentants locaux des gens du voyage siégeant à la commission départementale consultative, est de nature à favoriser la constitution de groupes dont la taille entraînera inévitablement des difficultés de gestion et de cohabitation.

À défaut d'une mise aux normes rapide et naturellement difficile eu égard aux aménagements à réaliser, les collectivités territoriales concernées risquent d'être impactées négativement par des occupations sauvages dans la mesure où elles ne seront plus en conformité avec la réglementation, ce que ne manquerait pas de relever tout tribunal.

Bien entendu, ces exigences nouvelles augmentent à due proportion la charge financière des EPCI, sans compensation. Vous le savez, les aires de grand passage ne bénéficient d'aucune aide en fonctionnement et les seules aides à l'investissement n'interviennent qu'à travers la DETR. En conséquence, quelles aides l'État peut-il apporter aux EPCI pour résoudre ces difficultés ? Est-il envisageable d'apporter une modification au décret concerné ? À défaut, quels accompagnements financiers pourraient-ils être mobilisés pour aider les EPCI à faire face aux charges nouvelles, en termes aussi bien d'investissement que de fonctionnement ?

Mme le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Reichardt, vous avez souhaité appeler l'attention de la ministre du logement sur la portée des normes issues du décret n° 2019-171 du 5 mars 2019 relatif aux aires de grand passage.

Ce décret répond à l'objectif général visé par le législateur depuis 2000 de permettre l'accueil temporaire des gens du voyage. Il s'appuie aussi sur des constats partagés lors de plusieurs concertations avec des collectivités territoriales, leurs associations et des représentants des usagers, ainsi que des travaux techniques de la Commission nationale consultative des gens du voyage.

Ce décret fixe des conditions minimales d'accueil, formule des recommandations et laisse aux communes et aux EPCI le soin d'adapter ces dispositions aux réalités locales, par exemple concernant le règlement du droit d'usage et de la tarification des prestations qui peut faire l'objet d'un forfait. Il prévoit également des dérogations pour tenir compte des disponibilités foncières, des spécificités topographiques ou des besoins particuliers définis par le schéma départemental.

L'expérience montre que, lorsque les aires de grand passage prévues par le schéma départemental ont été réalisées, la majorité des installations se déroulent dans des conditions sereines et les stationnements illicites sont moindres. C'est précisément l'un des objectifs prioritaires du schéma départemental du Bas-Rhin 2019-2024. Sur les quatre aires de grand passage initialement prévues, deux seulement sont en service. Le schéma prescrit donc la réalisation de ces deux aires afin d'améliorer l'accueil. Il prévoit également un diagnostic spécifique sur les grands passages dans le cadre d'une concertation avec les EPCI concernés et des propositions d'aménagement.

Des possibilités de financement existent pour les EPCI répondant aux critères d'éligibilité. Dans le Bas-Rhin, une subvention d'aide à l'investissement au titre de la DETR a été octroyée à la communauté de communes du Pays Rhénan à hauteur de 273 735 euros pour un coût prévisionnel de l'opération porté à 475 392 euros, soit un taux d'aide de près de 60 %.

Cet équipement, qui avait été prescrit par le précédent schéma, est par ailleurs cofinancé par la communauté de communes du Pays de Niederbronn-les-Bains. D'autres financements peuvent être accordés tels que la dotation de soutien à l'investissement local, la DSIL, ou le Fonds européen de développement régional, le Feder. Un cofinancement de plusieurs collectivités peut également être envisagé pour un équipement en gestion mutualisée.

Nous avons un certain recul sur ce décret, qui comprend des dispositions pragmatiques et s'appuie sur des pratiques mises en œuvre à partir de 2001. Il devrait contribuer à développer les équipements restant à réaliser au regard des prescriptions des schémas départementaux, soit la moitié des aires de grand passage prescrites, et à réduire les stationnements illicites que ce déficit d'accueil peut entretenir.

Mme le président. La parole est à M. André Reichardt, pour la réplique.

M. André Reichardt. Cette réponse ne me satisfait pas, car il n'y a pas eu de concertation en amont sur l'aire de grand passage que je viens d'évoquer, sans quoi je ne poserais pas une telle question aujourd'hui. Au contraire, les représentants des résidents concernés ont émis un avis défavorable.

Il est de l'intérêt de tous, comme Mme la secrétaire d'État l'a souligné, de faire en sorte que ces aires de grand passage soient réalisées et qu'elles fonctionnent pour éviter les occupations illicites et sauvages.

Mme le président. Merci de conclure !

M. André Reichardt. Bref, les moyens n'ont pas été accordés et la décision n'est absolument pas concertée.

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