Question de M. GAY Fabien (Seine-Saint-Denis - CRCE) publiée le 31/01/2019

M. Fabien Gay attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la fusion Alstom-Siemens, et plus particulièrement sur le risque de disparition du savoir-faire français, ainsi que sur le risque de monopole que cette fusion pourrait engendrer.
L'autorité allemande de la concurrence s'était déjà prononcée contre cette fusion, et les autorités de la concurrence britannique, belge, néerlandaise et espagnole ont alerté la Commission européenne par une lettre commune sur des risques de perte de concurrence liés à cette fusion, ainsi que sur l'insuffisance des remèdes proposés par les deux groupes en réponse à ce risque.
Les deux entreprises, malgré le spectre agité du chinois CRRC, se portent bien, indépendamment l'une de l'autre. Avec l'accroissement de la mobilité, les collectivités auront, de plus en plus, besoin de trains et les commandes vont aller en augmentant.
Les syndicats n'ont eu de cesse d'alerter également sur cette fusion, mettant en lumière l'absence de projet industriel, mais également les risques pour l'emploi du fait notamment des synergies annoncées. Celles-ci pourraient en effet, d'après leurs projections, entraîner la suppression de quatre mille à sept mille postes.
La Commission européenne elle-même a exprimé des réserves, et doit rendre son avis d'ici au 18 février 2019. Le risque, en effet, est que cette fusion entraîne une hausse des prix et freine l'innovation au sein de l'Union européenne, notamment sur le secteur des trains à grande vitesse et sur certains secteurs de la signalisation ferroviaire.
Il semblerait donc qu'outre les deux groupes et leurs actionnaires, pour lesquels un milliards huit cent millions d'euros ont été prévus pour réaliser la fusion, seul le gouvernement français soit encore favorable à celle-ci, d'autant que le gouvernement allemand reste à présent discret sur la question.
Après la vente de la branche énergie d'Alstom à General Electric et les conséquences désastreuses constatées aujourd'hui malgré les garanties annoncées à l'époque, il semble que cette fusion, qui s'apparente en réalité davantage à une absorption d'Alstom par Siemens, emprunte la même voie.
Il souhaite savoir ce que le Gouvernement va faire suite aux révélations sur la vente d'Alstom à GE. Il souhaite également savoir ce que compte faire le Gouvernement, dans le cas où des mesures fortes susceptibles de mettre en péril le maintien de sites français d'Alstom seraient nécessaires vis-à-vis de la Commission européenne. Il souhaiterait également savoir ce que compte faire le Gouvernement, face aux synergies prévues dans le cadre de la fusion, et qui se traduiraient par d'importantes réductions de capacités industrielles et de conception en France. Enfin, il s'interroge sur la stratégie industrielle du pays prévue par le Gouvernement.

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Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 22/08/2019

Le projet de rapprochement d'Alstom et des activités ferroviaires du groupe Siemens n'a pas reçu l'aval de la Commission européenne. Les cessions d'actifs proposées par les deux industriels ont été jugées insuffisantes par les autorités européennes de la concurrence. Cette décision est regrettable car si ce projet s'était concrétisé, il aurait apporté une réelle valeur ajoutée au groupe Alstom face à la concurrence, notamment asiatique, au bénéfice de la pérennité du groupe et donc des emplois français. Cette décision n'empêche cependant pas Alstom d'afficher une santé historique, qui reflète à la fois les bonnes tendances du marché ferroviaire mondial et la compétitivité du groupe en Europe et à l'étranger. Pour preuve son carnet de commande, dépassant 40 milliards d'euros aujourd'hui pour un chiffre d'affaires en progression à environ 8 milliards d'euros sur l'année écoulée. Il faut considérer la montée en puissance des constructeurs asiatiques en Europe, qui ne faiblit pas et qui fait peser une menace sur les opérateurs européens dont Alstom. Il faut noter par exemple le gain d'un grand contrat de 213 tramways par un constructeur coréen en Pologne en février 2019. Ceci est d'autant plus problématique, que les marchés asiatiques sont pour leur part largement fermés aux constructeurs européens. Il est donc tout à fait justifié de prendre en considération la concurrence asiatique montante en Europe lorsque l'on examine la situation du marché. Pour répondre à ces enjeux, le Gouvernement a défini une politique industrielle ambitieuse pour la filière ferroviaire. Cette politique est redynamisée par la relance du Conseil national de l'industrie et des comités stratégiques de filière, dont le comité stratégique ferroviaire. Le contrat de filière ferroviaire, qui lie l'État, les industriels et les organisations syndicales autour de projets structurants pour la compétitivité de la filière, a été signé le 9 avril 2019. La mise en œuvre opérationnelle des projets qu'il contient, par exemple pour favoriser l'innovation, permettra à la filière française de maintenir son rang dans le marché mondial et de faire croitre ses emplois. Le Gouvernement reste convaincu du bien-fondé de la formation de groupes industriels européens de dimension mondiale. Toutes les options stratégiques, en la matière, continuent à être étudiées, avec le souci constant de la préservation sur le long terme des capacités industrielles et des emplois en France. À l'occasion de l'installation d'un nouveau Parlement européen et d'une nouvelle Commission, le gouvernement français souhaite une réflexion d'ampleur sur la politique industrielle européenne.

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