Question de M. GAY Fabien (Seine-Saint-Denis - CRCE) publiée le 01/11/2018

M. Fabien Gay attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur l'autorisation préfectorale délivrée à Total pour des forages d'exploration au large des côtes guyanaises. Cette autorisation est incompréhensible et problématique à plus d'un titre.

D'une part, cette décision intervient après une consultation publique auprès de la population ayant réuni 7 173 avis défavorables, pour seulement deux avis favorables et huit non définis. La population s'est massivement exprimée contre ces forages dangereux pour l'environnement et son choix s'est donc trouvé totalement ignoré.

D'autre part, cette décision est en contradiction totale avec l'urgence environnementale et les discours du Gouvernement à ce sujet. Les forages comportent des risques majeurs pour l'environnement et les Guyanais ; marée noire irréversible qui pourrait atteindre la mangrove, destruction du récif de corail qui abrite de nombreuses espèces, etc. À une profondeur aussi conséquente (deux mille mètres), dans une zone de forts courants marins, ces risques sont considérables.

Un an après l'adoption de la loi n° 2017-1839 du 30 décembre 2017 mettant fin à la recherche ainsi qu'à l'exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l'énergie et à l'environnement, un an après les premières prolongations des autorisations d'exploration à Total dans cette zone, déjà en décalage à l'époque, il est difficile de comprendre la survenue de ce nouveau choix. Cette nouvelle autorisation entraîne nécessairement une grande inquiétude quant à la décision attendue au sujet du projet de mine d'or industrielle « montagne d'or », lui aussi porteur de conséquences désastreuses pour l'environnement. Une fois encore, la Guyane risque d'être sacrifiée aux intérêts financiers.

Outre la contradiction flagrante avec les accords de Paris sur le climat, ce choix, au lendemain de la parution du rapport du groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) en septembre 2018, n'a aucune justification qui ne tienne face à l'urgence vitale d'agir drastiquement et dès à présent pour sauver la planète, que soulignent les scientifiques.

Il souhaite donc savoir si le Gouvernement entend revenir sur cette décision et assumer une politique environnementale à la hauteur des enjeux vitaux sur lesquels les scientifiques ne cessent d'interpeller.

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Réponse du Ministère de la transition écologique et solidaire publiée le 09/05/2019

La loi n° 2017-1839 du 30 décembre 2017, mettant fin à la recherche ainsi qu'à l'exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l'énergie et à l'environnement, prévoit une fin progressive de la recherche et de l'exploitation des hydrocarbures sur le territoire national. Elle vise à mettre en cohérence notre droit avec notre engagement de lutte contre le changement climatique pris dans l'accord de Paris et avec l'objectif de limitation du réchauffement climatique de la planète en dessous de 1,5 °C-2 °C. Si la loi prévoit l'interdiction de l'attribution de nouveaux permis de recherche d'hydrocarbures liquides ou gazeux, et limite le renouvellement des concessions existantes à 2040, elle a aussi réaffirmé le principe de maintien des titres miniers accordés, en cours de validité, et de leur prolongation de droit. Le permis d'exploration d'hydrocarbures au large de la Guyane rentrait dans ce dernier cas. Il avait été initialement accordé en 2001, bien avant la promulgation de la loi hydrocarbures, et a bénéficié du droit à obtenir une toute dernière prolongation, qui expire le 1er juin 2019. S'agissant de l'autorisation préfectorale d'ouverture des travaux miniers, elle a été délivrée dans le respect du droit français, qui est l'un des plus avancés en matière de concertation avec le public et de protection de l'environnement. La sensibilité des milieux marins a fait l'objet d'une attention particulière tout au long de la procédure d'autorisation. Cette question a été abordée par l'autorité environnementale, lors de l'enquête publique et par les services de l'État. Le pétitionnaire y a apporté des réponses qui ont été jugées satisfaisantes par la commission d'enquête. L'étude d'impact du projet conclut que du fait d'un éloignement suffisant, l'impact sur les récifs visés (mésophotiques) est négligeable. Néanmoins, le préfet de Guyane a prescrit une surveillance supplémentaire et spécifique de la flore et de la faune dans son arrêté préfectoral d'autorisation. Les services de l'État ont mené des actions de contrôle tout au long de la phase de travaux afin de vérifier le respect de la réglementation en matière de sécurité et de protection de l'environnement. En tout état de cause, le 28 février 2019, le groupe Total a annoncé la fin des opérations de forage exploratoires débutées mi-décembre 2018 au large de la Guyane et l'abandon définitif du projet, faute de résultat. Total mène actuellement la procédure d'arrêt des travaux miniers conformément aux dispositions réglementaires en vigueur. Il n'y aura donc pas d'exploitation d'hydrocarbures en Guyane. La transition énérgétique et la croissance verte constituent un défi mais aussi une véritable chance pour la Guyane qui recèle un formidable potentiel de déploiement des énergies renouvelables. Le code de l'énergie prévoit l'autonomie énergétique de la Guyane en 2030. La première programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) de la Guyane prévoit que les énergies renouvelables représenteront 86 % de l'électricité produite en 2023 et des investissements de 1,2 milliard d'euros. Ces objectifs reposent sur le développement de projets hydroélectriques, biomasse ou photovoltaïques et des efforts en termes de maîtrise de la demande.

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