Question de M. GROSDIDIER François (Moselle - Les Républicains) publiée le 14/11/2018

Question posée en séance publique le 13/11/2018

M. François Grosdidier. Monsieur le Premier ministre, aujourd'hui, j'ai le cœur gros, comme tous les policiers qui pleurent Maggy Biskupski, présidente de la mobilisation des policiers en colère. Maggy s'est suicidée hier, quelques jours après un gendarme – chez vous, à Matignon – et un policier de la police aux frontières.

Cela ne s'arrête pas, malgré toutes les mesures de prévention des risques psychosociaux. Cela ne s'arrête pas parce que les raisons de cette situation sont beaucoup plus profondes et que le Gouvernement n'a pas voulu les voir.

Ces raisons, anciennes ou récentes, notre commission d'enquête les a décrites et analysées. Nous avons fait trente-deux propositions concrètes et réalistes ; vous avez refusé de les prendre en considération, et même de nous en donner acte dans cet hémicycle, lors de la séance du 5 juillet dernier.

N'esquivez plus ! Ne répondez plus à la marge, quand le problème est au fond : policiers et gendarmes consacrent les deux tiers de leur temps aux tâches procédurales, ils prennent toujours plus de risques et ce, au bout du compte, pour rien, en l'absence de réponse pénale adaptée. Ils se posent la question du sens de leur mission et de leur vie.

Maggy était venue au Sénat, le 7 février dernier, avec son collègue Guillaume Lebeau, nous expliquer cette réalité. Sincère, franche, courageuse, généreuse, lucide, mais tellement déçue, elle gardait pourtant la foi en sa mission et un sens du devoir intact. Nous l'avions écoutée avec gravité, au contraire de vous : vous l'avez fait entendre par l'Inspection générale de la police nationale, l'IGPN, pour atteinte à l'image de la police…

Monsieur le Premier ministre, allez-vous écouter et comprendre les policiers ? Allez-vous entendre, à titre posthume, le cri de détresse de Maggy ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 14/11/2018

Réponse apportée en séance publique le 13/11/2018

M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur Grosdidier, vous m'interpellez sur un événement tragique, la mort d'une femme gardienne de la paix, engagée pour défendre la cause des policiers. Attendons les résultats de l'enquête qui a été diligentée pour connaître les raisons de son geste avant de commenter celles-ci.

Au-delà, vous m'interrogez sur le mal-être dans la police. Ce mal-être est réel, nous le savons, et je ne vous opposerai pas le fait que le nombre de suicides dans la police est en forte baisse cette année par rapport à l'année précédente.

Il y a quelques jours, j'étais avec Laurent Nunez à Viry-Châtillon, d'où est parti ce cri de colère que Maggy Biskupski a su incarner, voulant défendre les forces de police. Une quinzaine de jeunes y avaient attaqué deux véhicules de police, tentant d'empêcher leurs occupants d'en sortir et lançant des cocktails Molotov pour les faire mourir brûlés vifs. Ce fut un véritable acte de guerre.

J'ai rencontré Vincent, l'une des victimes, qui se reconstruit lentement, difficilement. Il m'a parlé de la nécessaire reconquête du territoire. Avec Laurent Nunez, nous avons aussi rencontré l'ensemble des forces de l'ordre qui étaient présentes sur site. Elles sont intervenues très vite pour porter secours et ont ensuite mené une enquête remarquable : aujourd'hui, treize des jeunes responsables présumés de l'attaque sont en prison. (Murmures sur des travées du groupe Les Républicains.)

J'ai également rencontré deux maires de couleurs politiques très différentes, qui prônent avec force la reconquête républicaine de ce quartier. En deux ans, des moyens ont été mis en œuvre sur place. À l'époque des faits, M. Cazeneuve avait dépêché immédiatement une centaine de policiers pour ne laisser aucun espace à ceux qui voudraient faire reculer la République.

Monsieur le sénateur, il est aujourd'hui nécessaire de renforcer les moyens. C'est ainsi que le budget augmente de plus d'un milliard d'euros en deux ans, que 300 millions d'euros sont investis dans l'immobilier et que l'équipement en véhicules atteint un niveau jamais vu auparavant. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre !

M. Christophe Castaner, ministre. En outre, Mme la garde des sceaux vous a présenté la semaine dernière un projet de réforme de la procédure pénale visant à éviter que les policiers y consacrent trop de temps et à permettre qu'ils puissent ainsi être davantage sur le terrain, comme ils le souhaitent. J'ai vu aussi, monsieur le sénateur, quels choix politiques ont été faits dans cette assemblée… (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. François-Noël Buffet. C'est n'importe quoi !

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