Question de Mme BILLON Annick (Vendée - UC) publiée le 15/11/2018

Mme Annick Billon attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur la question du harcèlement à l'école.
Le fonds des Nations unies pour l'enfance (UNICEF), qui a publié en novembre 2018 les résultats de sa consultation sur le harcèlement scolaire, révèle qu'un tiers des enfants interrogés déclarent subir régulièrement des attaques verbales ou physiques de la part d'autres enfants au sein de leur établissement scolaire. Il est par ailleurs particulièrement inquiétant de constater que le harcèlement scolaire peut intervenir très précocement, puisque, toujours selon l'UNICEF, 47 % des enfants en cours préparatoire en font l'expérience.
Il est bien connu que les conséquences du harcèlement scolaire peuvent être très graves sur nos enfants et laisser des séquelles à vie. La violence à l'école, qu'elle prenne la forme du harcèlement, du harcèlement sexuel ou du châtiment corporel, est malheureusement tellement répandue qu'elle semble inévitable. Or, aucun enfant ne devrait avoir peur d'aller à l'école et il est indispensable que l'école puisse être un espace où chaque élève apprend et grandit en sécurité.
Aussi souhaiterait-elle savoir quelles sont les politiques publiques mises en place par le Gouvernement pour lutter contre ce fléau, et quel est le cadre d'accueil médical et psychologique prévu au sein des établissements scolaires pour prendre en charge les enfants victimes.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse publiée le 05/12/2018

Réponse apportée en séance publique le 04/12/2018

Mme Annick Billon. Selon les statistiques ministérielles, 700 000 jeunes disent avoir fait l'expérience du harcèlement à l'école. Ils représentent 4 % des élèves du primaire, 12 % des collégiens et de 2 % à 3 % des lycéens. Ce phénomène toucherait un élève sur dix et, parmi eux, 5 % subiraient un harcèlement sévère ou très sévère. Fait particulièrement inquiétant, le harcèlement scolaire peut intervenir très précocement puisque, selon l'UNICEF, 47 % des enfants en classe de cours préparatoire en font l'expérience.

S'il ne s'agit pas d'un phénomène nouveau, le harcèlement à l'école prend cependant une ampleur inédite, plus continue et à plus grande échelle, avec l'avènement des réseaux sociaux et du cyber-harcèlement, qui touche particulièrement les filles.

Par ailleurs, nous savons bien que la problématique du harcèlement, c'est l'isolement. Les enfants victimes ont trop souvent tendance à se replier sur eux-mêmes et à se sentir coupables. C'est précisément contre ce repli qu'il faut lutter, afin de permettre aux enfants victimes de trouver au sein de leur établissement scolaire un soutien et une écoute.

Si l'éducation nationale a, sur son site internet, mis à disposition des outils à destination des enseignants afin qu'ils puissent mettre en place des actions préventives contre le harcèlement, rien n'est prévu dans leur formation pour leur permettre d'en détecter les signes et d'y répondre de manière adaptée.

Aussi souhaiterais-je savoir, monsieur le secrétaire d'État, quelles politiques publiques seront mises en place par le Gouvernement pour lutter contre ce fléau et quel cadre d'accueil médical et psychologique est aujourd'hui prévu au sein des établissements pour recevoir les enfants victimes.

Je le rappelle, les conséquences du harcèlement scolaire peuvent être dramatiques pour nos enfants et laisser des séquelles à vie, voire, dans les cas les plus extrêmes, mener au suicide. Aucun enfant ne devrait avoir peur d'aller à l'école. Il est indispensable que nos établissements scolaires puissent être des espaces où chaque élève apprend et grandit en sécurité.

M. Roland Courteau. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Madame la sénatrice Annick Billon, la lutte contre le harcèlement est, pour le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse, une priorité de tous les jours. Je vous remercie de me permettre, par votre question, de rappeler les mesures mises en place et les perspectives.

Nous avons la volonté de ne pas laisser les victimes et leurs familles seules face à ce type de situation. L'école doit être avant tout le lieu de la confiance, du respect d'autrui et du bien-être.

Le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse a une action centrale ; les académies, les écoles et les établissements sont mobilisés contre toutes les formes de harcèlement. Cette politique se décline selon quatre axes.

Premièrement, il s'agit d'informer et de sensibiliser les élèves, les familles et l'ensemble des partenaires, afin d'interpeller et de mobiliser largement. À cet égard, une journée nationale de mobilisation contre le harcèlement est programmée chaque année le premier jeudi de novembre – je me suis rendu au collège Simone-Veil de Pontoise le 8 novembre dernier et j'ai pu mesurer l'engagement de la communauté éducative. Par ailleurs, un site dédié intitulé « Non au harcèlement » est en ligne.

Deuxièmement, il s'agit de prévenir le harcèlement en développant différentes actions : dans le cadre des apprentissages au cœur de la classe, l'enseignement moral et civique et l'éducation aux médias et à l'information ; sur l'initiative et sous le pilotage d'instances telles que le comité d'éducation à la santé et à la citoyenneté, la mise en place de conseils de la vie collégienne et de conseils des délégués pour la vie lycéenne dans les établissements.

Troisièmement, il s'agit de former les personnels – vous l'avez rappelé, madame la sénatrice, c'est un enjeu fondamental – et les élèves pour mieux repérer et prendre en charge les cas de harcèlement. Nous avons mis en place 310 référents académiques et départementaux, qui coordonnent la formation continue et 1 500 formateurs sont mobilisés dans les académies. Une réforme de la formation des enseignants interviendra dans les prochains mois ; il s'agira bien évidemment de faire le point sur ce sujet et de voir les adaptations possibles.

Quatrièmement, il s'agit de prendre en charge chaque situation, plus précocement et plus efficacement, par une professionnalisation des acteurs de terrain aidés des 310 référents académiques, la mobilisation des référents académiques et départementaux qui prennent contact avec la victime, sa famille et avec l'établissement concerné pour résoudre la situation, la mise en place dans chaque école et dans chaque établissement de protocoles de prise en charge et celle d'un numéro, le 30 20, dédié à l'écoute, au conseil et à l'aide aux victimes, aux familles, aux témoins et aux professionnels. Les associations participent aussi à ces actions. Je tiens ici à leur rendre hommage, notamment à l'association Net Écoute, qui obtient le retrait des contenus liés à un harcèlement en quelques heures seulement lorsqu'elle est alertée par le jeune ou sa famille.

Madame la sénatrice, la sérénité à l'école est une exigence républicaine en vue de garantir la qualité de l'éducation pour tous les élèves de France. Il est fondamental de lutter contre un fléau qui, vous l'avez rappelé, peut mener à des situations dramatiques. Le ministère est pleinement mobilisé sur cette question.

M. le président. Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, j'insiste sur la nécessité de respecter les temps de parole impartis.

La parole est à Mme Annick Billon, qui dispose de dix-neuf secondes pour répondre à M. le secrétaire d'État.

Mme Annick Billon. Monsieur le secrétaire d'État, vous avez parlé d'une journée nationale. C'est bien, mais c'est de la communication. Moi, je veux des actes.

Prévoir 310 référents académiques me semble être une mesure de portée assez limitée. Si l'on doit compter sur les associations pour lutter contre le harcèlement, j'espère que celles-ci seront mieux traitées et disposeront de moyens pérennes pour exercer leur mission, contrairement à celles qui interviennent en matière de lutte contre les violences faites aux femmes.

M. Roland Courteau. Très bien !

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