Question de M. KERROUCHE Éric (Landes - SOCR) publiée le 18/10/2018

M. Éric Kerrouche appelle l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur l'augmentation injuste de la fiscalité sur le service public local de gestion des déchets.
Le Gouvernement a présenté une feuille de route pour l'économie circulaire qui a surpris les collectivités territoriales.
En effet, elle prévoit une hausse générale de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) qui constitue aujourd'hui une véritable inquiétude pour les collectivités et syndicats en charge du service public local de la gestion des déchets.
Cette nouvelle hausse semble malheureusement être prévue pour assurer une nouvelle ressource fiscale à l'État, puisque la TGAP passerait de 450 millions d'euros en 2017 à 1,4 milliard d'euros à l'échéance 2025, en pénalisant encore les collectivités locales.
Pourtant, cette hausse est à la fois injuste et n'apporte pas de garantie d'efficacité.
Même si la volonté de contribuer au développement de l'économie circulaire en augmentant le coût de l'élimination par rapport au recyclage est louable, elle méconnaît la réalité du terrain. Il faut être conscient qu'un tiers des déchets ménagers sont à l'heure actuelle impossibles à recycler ce qui contraint les collectivités à les éliminer.
Une hausse de la TGAP impacterait les gestionnaires alors qu'ils n'ont pas d'influence sur la « production » des déchets ni sur les consommateurs.
Cette augmentation de la TGAP, dont les recettes sont aujourd'hui versées au budget de l'État, n'agirait donc pas sur la diminution des déchets non recyclables.
Il serait souhaitable de mettre en place des mesures incitatives pour encourager les collectivités qui mettent en œuvre des politiques de réduction des déchets résiduels, notamment en prévoyant un taux de TGAP lié à un niveau de performance sur ce problème.
Aussi, il lui demande d'engager une réflexion en concertation avec les collectivités locales sur la question de la hausse de la TGAP.

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Réponse du Ministère de la transition écologique et solidaire publiée le 10/01/2019

La feuille de route de l'économie circulaire, présentée le 23 avril dernier après plus de six mois de concertation avec l'ensemble des parties prenantes, comporte 50 mesures pour atteindre deux objectifs principaux : la division par deux de la mise en décharge des déchets et le recyclage de 100 % des plastiques d'ici 2025. Ces mesures et l'engagement de chacun des acteurs n'auront toutefois un effet que si les logiques économiques et financières sous-jacentes sont cohérentes. Or aujourd'hui, les signaux économiques ne sont pas au bon niveau pour atteindre nos objectifs. Les taxes sur la mise en décharge et l'incinération ont fait l'objet d'une réforme en 2016, mais celle-ci reste en-deçà de ce qui est nécessaire pour avoir un réel effet sur les investissements et bien en-deçà de la fiscalité pratiquée par nos partenaires européens. Si nous n'allons pas plus loin, la mise en décharge, dont l'acceptabilité environnementale et sociétale devient de plus en plus limitée, restera plus compétitive que le recyclage. Dans ce contexte, le Gouvernement a proposé, dans le cadre de la loi de finances pour 2019, une réforme globale de la fiscalité déchets visant à rendre le recyclage des déchets économiquement plus attractif que leur mise en décharge ou leur incinération, conformément aux engagements de campagne du président de la République. Ces propositions sont le fruit de discussions engagées à l'automne 2017, d'abord dans le cadre d'un atelier d'élaboration de la feuille de route de l'économie circulaire dédié aux instruments économiques et financiers, puis dans un cadre bilatéral avec des élus et les associations de collectivités à la suite de la présentation de la feuille de route en conférence nationale des territoires en mai dernier. Elles s'inscrivent dans un équilibre global qui permet de répartir la pression fiscale de façon cohérente avec les objectifs visés, comme beaucoup de nos partenaires européens l'ont fait avec succès, et de donner le temps aux acteurs de s'y adapter. Cette réforme repose ainsi sur une trajectoire de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) revue à partir de 2021 telle que le coût moyen de l'élimination des déchets devienne supérieur au coût moyen de leur recyclage. En parallèle, la proposition prévoit de donner de nouvelles capacités financières aux collectivités pour investir et pour s'adapter en allégeant la pression fiscale sur les activités de tri, de recyclage et de prévention des déchets : - le taux de la TVA pour les opérations de prévention, de collecte, de tri et de valorisation matière effectuées dans le cadre du service public de gestion des déchets sera réduit à 5,5 % à compter de 2021 ; - pour accompagner les collectivités locales dans le déploiement de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) incitative, les frais de gestion perçus par l'État seront diminués de 8 % à 3 % pendant cinq ans pour les collectivités qui mettent en place la TEOM incitative. En effet, selon le rapport de 2015 du comité interministériel de modernisation de l'action publique sur la gestion des déchets par les collectivités locales, cette mesure permettrait à elle seule de diminuer de près de 6 % la production de déchets ménagers et assimilés en 2025 par rapport à 2011, dont une baisse de près de 14 % des ordures ménagères résiduelles. En complément, d'autres mesures de la feuille de route pour l'économie circulaire, de nature non fiscale, visent à réduire la quantité de déchets que les collectivités doivent prendre en charge. En particulier, la création de nouvelles filières à responsabilité élargie du producteur (REP), que le Gouvernement souhaite mettre en place dès 2020, aura pour effet d'étendre le principe pollueur-payeur à de nouveaux produits et de transférer la charge de certains déchets des collectivités vers les producteurs de ces produits. De même, la refondation du système REP permettra d'améliorer l'éco-conception des produits grâce à un système d'éco-modulation pouvant atteindre plus de 10 % du prix du produit, et de diminuer les quantités de produits non recyclables mis sur le marché français. Les éco-organismes seront pilotés de façon resserrée sur la base d'objectifs de collecte, de réutilisation et de recyclage, assortis de sanctions financières significatives en cas de non atteinte. La mise en œuvre d'abattements complémentaires de la TGAP pour la valorisation énergétique à haut rendement des refus de tri provenant de centres de tri performants pourra également être examinée lors des débats parlementaires. Pour les collectivités, l'impact financier de cette réforme de la fiscalité dépendra des performances et des efforts en matière de gestion des déchets. L'objectif du Gouvernement est que les collectivités qui s'engagent dans une démarche ambitieuse en faveur de l'économie circulaire voient leurs charges baisser. Le Gouvernement remettra chaque année à partir de 2022 un rapport au Parlement sur l'évolution des charges des collectivités liées à la mise en œuvre de la feuille de route économie circulaire (en prenant en compte l'ensemble des mesures, fiscales et non fiscales) et ajustera en conséquence les moyens affectés par l'État au soutien à des projets en faveur de l'économie circulaire en cas de hausse.

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