Question de Mme GUILLOTIN Véronique (Meurthe-et-Moselle - RDSE) publiée le 18/10/2018

Mme Véronique Guillotin appelle l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la situation des anciens salariés de la société Lorraine Tubes, aujourd'hui privés de retraite supplémentaire en raison de la mise en liquidation judiciaire de leur entreprise en juillet 2014. La société avait en effet adhéré en 1990 à l'accord Institution retraite Usinor Sacilor (IRUS), qui garantissait aux salariés une retraite pouvant aller jusqu'à 62 % de leur dernier salaire brut, à la faveur d'une allocation supplémentaire. Malgré une reprise rapide par le groupe Arcelor Mittal, qui fait de confortables bénéfices et dont l'État était actionnaire à l'époque, la liquidation judiciaire a entraîné l'impossibilité pour le mandataire de verser les sommes prévues aux anciens salariés (environ 120 d'entre eux sont concernés). Contrairement à leurs engagements, les dirigeants de l'entreprise n'avaient en effet pas provisionné les retraites. S'agissant d'une question soulevée à plusieurs reprises par des parlementaires ces dernières années et compte tenu du risque de perte de confiance de toutes celles et ceux qui cotisent en complément des régimes obligatoires, elle souhaite connaître les intentions du Gouvernement pour remédier à cette situation.

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Transmise au Ministère de l'action et des comptes publics


Réponse du Ministère de l'action et des comptes publics publiée le 21/03/2019

En 1990, le groupe industriel Usinor Sacilor a entrepris d'harmoniser les dispositifs de retraite supplémentaire d'entreprise, que certaines de ses filiales avaient mis en place, en créant un régime unique sur la base d'un accord collectif. Pour gérer ce régime, une institution, dénommée Institution de retraite Usinor Sacilor, a été mise en place. Par cet accord collectif, les employeurs se sont engagés à verser à leurs salariés une rente viagère en complément des retraites obligatoires de base et complémentaires, dont le montant devait correspondre à un pourcentage du salaire de référence du salarié et être plafonné à 62 %. Ces rentes sont financées intégralement par l'employeur et versées sous condition d'ancienneté et de présence dans l'entreprise au moment du départ à la retraite. Le Gouvernement a entamé, en 1995, un processus d'obligation d'externalisation des engagements de retraite supplémentaire auprès des organismes assureurs, afin de sécuriser les droits des salariés. C'est dans ce cadre que, conformément à la loi n° 94-678 du 8 août 1994 dite « Veil », l'institution de retraite Usinor Sacilor (IRUS) s'est transformée en institution de retraite supplémentaire (IRS) gérée par les partenaires sociaux. Cette loi imposait aux IRS un provisionnement intégral des engagements de retraite nés après la publication de la loi, soit à compter de 1994. Puis, conformément à la faculté ouverte par la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, les partenaires sociaux ont opté pour une transformation de l'IRS en institution de gestion de retraite supplémentaire (IGRS), structure paritaire n'assurant que la gestion administrative des prestations de retraite et ne pouvant porter d'engagements financiers. Cette transformation a été effective en 2009 et ne s'est pas accompagnée d'une externalisation des provisions constituées auprès d'un organisme assureur, alors même que l'article 116-VI de la loi du 21 août 2003 précitée le prévoyait expressément. Par ailleurs, afin de dissuader le maintien de régimes gérés directement par les entreprises (notamment pour les engagements nés avant 1994), des mesures de taxation ont été adoptées par le législateur. L'article 115 de la loi du 21 août 2003 précitée a ainsi instauré une contribution spécifique à la charge de l'employeur sur les régimes de retraite conditionnant la constitution de droits à prestations à l'achèvement de la carrière du bénéficiaire dans l'entreprise (article L. 137-11 du code de la sécurité sociale). Cette contribution spécifique est assise, sur option de l'employeur, soit sur les rentes versées, soit sur le financement du régime. Pour cette dernière option, la contribution est assise sur les primes versées à l'organisme assureur en cas de régime externalisé et sur la dotation aux provisions ou le montant mentionné en annexe au bilan de l'entreprise en cas de régime géré directement par cette dernière. Cette contribution a été portée à 24 % pour les régimes externalisés, contre 48 % pour les régimes gérés en interne. Il est à noter que le rapport au Parlement remis par le Gouvernement en octobre 2010 relève que la quasi-totalité (environ 97 %) des entreprises ont externalisé leur régime de retraite supplémentaire auprès d'un organisme assureur. Enfin, pour la sécurisation des retraites déjà liquidées, l'ordonnance du 9 juillet 2015 relative à la sécurisation des rentes versées dans le cadre des régimes de retraite mentionnés à l'article L. 137-11 du code de la sécurité sociale, prévoit la sécurisation des droits à hauteur d'au moins 50 %, au moyen d'une garantie des engagements par un ou plusieurs contrats souscrits auprès d'un organisme assureur, une ou plusieurs fiducies ou une ou plusieurs sûretés réelles ou personnelles. Ainsi, en prévoyant l'externalisation des engagements de retraite en cours d'acquisition et le provisionnement progressif des droits liquidés, le Gouvernement a entendu sécuriser les droits à retraite supplémentaire des salariés.

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