Question de Mme VERMEILLET Sylvie (Jura - UC) publiée le 04/10/2018

Mme Sylvie Vermeillet attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la situation très préoccupante des agriculteurs.
Assujettis à la météorologie, les agriculteurs subissent de plus en plus et de façon répétée des phénomènes climatiques qui ont un impact direct sur leurs productions : gel, grêle, ou encore sécheresse. Les conséquences économiques sont significatives, voire catastrophiques.
Dans ce contexte, l'activité d'élevage notamment pourrait à court terme être condamnée dans le département du Jura, avec toutes les conséquences sur les services que cette activité peut rendre à la collectivité.
Il paraît ainsi nécessaire que l'État accompagne administrativement et financièrement les projets qui permettraient de mieux appréhender notamment la gestion de l'eau : création de retenues collinaires, réserves, systèmes d'irrigation en plein champ ou sous serre, etc…
Compte tenu de ces aléas, elle lui demande s'il est possible de soutenir les agriculteurs en leur permettant d'avoir une véritable épargne de précaution sans charges sociales et fiscales les bonnes années, afin de mieux appréhender financièrement les mauvaises, notamment dans la prochaine réforme de la politique agricole commune.

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Transmise au Ministère de l'agriculture et de l'alimentation


Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 31/01/2019

L'activité agricole est confrontée à la multiplication d'événements climatiques défavorables (sécheresse de 2015, inondations et pluviométrie record en 2016, gel du printemps 2017, excès d'eau, gel et épisodes de grêle des derniers mois…) et de crises sanitaires (fièvre catarrhale ovine, influenza aviaire…) qui touchent de nombreuses filières et régions. L'agriculture européenne est également plus que jamais ouverte sur le monde et donc de plus en plus fortement soumise à la volatilité des marchés. Dans ce contexte, il est nécessaire de renforcer la capacité de résilience du secteur agricole. À cette fin, le conseil, la formation et la communication sur la gestion des risques sont indispensables. Il convient de même de renforcer les démarches préventives, qu'il s'agisse de protection des systèmes ou d'adaptations des pratiques, des productions ou des activités, autant d'actions qui peuvent être soutenues dans le cadre de la politique agricole commune (PAC). Les questions relatives au stockage de l'eau et à l'irrigation peuvent également s'inscrire dans le cadre de ces démarches préventives. Les orientations du Gouvernement en matière de gestion durable de l'eau, exprimées à l'occasion de la communication du 9 août 2017, s'articulent autour de deux objectifs : encourager la sobriété des usages et réguler en amont la ressource ; faire émerger, dans l'ensemble des territoires, des solutions adaptées aux besoins et aux contextes locaux. Il s'agit, pour l'agriculture, de rechercher les solutions pour limiter la consommation d'eau et mobiliser l'innovation agronomique et technique (choix des assolements, amélioration de l'efficience de l'irrigation, sélection génétique). Cela passe également par la réalisation, là où c'est utile et durable, de projets de stockage hivernal de l'eau afin de réduire les prélèvements en période sèche et d'éviter l'augmentation des prélèvements estivaux dans les zones menacées par le changement climatique. Le Gouvernement a installé fin 2017 une cellule d'expertise sur l'eau regroupant un représentant de l'assemblée permanente des chambres d'agriculture, de France nature environnement et des experts des ministères de la transition écologique et solidaire et de l'agriculture et de l'alimentation. L'objectif de cette cellule était de passer en revue les projets de gestion et de stockage d'eau et d'identifier les freins ou obstacles à leur réalisation. Le rapport de la cellule d'expertise, publié le 26 septembre 2018, souligne l'apport de la démarche de projet de territoire pour la gestion de l'eau comme outil de médiation sur les économies et la gestion partagée de l'eau et recommande de faire évoluer le cadre d'action actuel afin de le rendre plus efficace. Sur la base de ces recommandations, le Gouvernement a décidé d'encourager le recours à la démarche de projet de territoire pour la gestion de l'eau. Une instruction sera transmise aux préfets pour dynamiser ces projets et remobiliser les acteurs. Un certain nombre d'actions concrètes, telles que l'élaboration d'un guide pratique ou la mise en place d'un centre de ressources, sont également initiées avec l'implication du comité national de l'eau, de l'agence française pour la biodiversité, de l'institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture, afin d'accompagner les acteurs, en particulier les porteurs de projet, en ce sens. Le second volet des assises de l'eau, qui a débuté en novembre 2018, permettra de conforter cette démarche. En matière de financement, dans le cadre de la PAC et dans les régions qui l'ont choisi, le matériel d'irrigation et les infrastructures de stockage et de transport de l'eau peuvent être subventionnés par le fonds européen agricole pour le développement rural, dont les régions sont autorités de gestion depuis 2014, dans certaines conditions (état des masses d'eau affectées et d'efficience des investissements concernés dans l'utilisation de l'eau). Des subventions complémentaires peuvent être octroyées, notamment par les collectivités territoriales et par les agences de l'eau, en fonction de critères qui leur sont propres. Il est en outre nécessaire de favoriser une stratégie d'ensemble de gestion des risques en articulant les différents outils de manière cohérente en fonction de l'intensité des aléas et de leur impact prévisionnel sur le revenu et en anticipant l'évolution du contexte climatique, sanitaire, environnemental et économique de l'activité agricole. La gestion privée des risques de faible ampleur par les entreprises agricoles et les filières doivent être renforcées. Ainsi, afin de mettre à la disposition des exploitants agricoles un outil efficace et aisément mobilisable de prévention et de gestion des risques et des aléas, un dispositif fiscal a été adopté par l'assemblée nationale dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2019. Ce nouveau dispositif de déduction pour épargne de précaution a pour objectif d'inciter les exploitants à constituer une épargne destinée à leur permettre de surmonter les éventuelles crises et difficultés auxquelles ils pourraient être confrontés dans leurs exploitations au cours des années suivantes. Elle se substitue aux actuelles déductions pour investissement et déductions pour aléas et permet aux exploitants agricoles de déduire annuellement de leur résultat imposable une somme devant donner lieu à la constitution d'une épargne sur un compte bancaire d'un montant au moins égal à 50 % de la déduction pratiquée. Cette condition est réputée respectée sous forme de stocks à rotation lente (cela concerne particulièrement la viticulture et l'élevage), ou bien lorsque l'exploitant met des sommes à disposition d'une coopérative ou d'une organisation de producteurs commerciale, dans le cadre d'un contrat de lissage des prix. En contrepartie, l'exploitant peut mobiliser cette épargne et reprendre la somme déduite, à tout moment et sans condition pendant une période de dix ans. Le dispositif vise donc à instaurer un outil simple, souple et efficace tout en responsabilisant pleinement les exploitants agricoles dans la gestion de leurs risques. Cette nouvelle déduction s'accompagne d'un mécanisme visant à prévenir les comportements de surinvestissement qu'elle pourrait susciter au travers d'un cumul d'avantages fiscaux. Les risques d'ampleur intermédiaire peuvent être mutualisés (assurance ou fonds de mutualisation) et ces dispositifs de mutualisation méritent d'être soutenus. C'est pourquoi l'État encourage, depuis le début des années 2000, le développement d'outils de gestion des risques de production (climatiques et sanitaires). S'agissant plus particulièrement des risques climatiques mentionnés, il est indispensable que les exploitants agricoles puissent assurer plus largement leurs productions à travers le dispositif d'assurance récolte contre les risques climatiques, soutenu par l'État dans le cadre du second pilier de la PAC et qui inclut les inondations, la grêle ou le gel. Ce soutien prend la forme d'une prise en charge partielle des primes ou cotisations d'assurance payées par les exploitants agricoles, pouvant aller jusqu'à 65 %. Les producteurs ont la possibilité de réduire le taux de franchise ou bien encore le seuil de déclenchement, afin de disposer d'un contrat d'assurance adapté à leurs besoins. Pour la campagne 2019, le Gouvernement s'engage pour la quatrième campagne consécutive à garantir un taux de subvention de 65 % des primes d'assurance pour le premier niveau de garantie (niveau socle) et de 45 % pour le deuxième niveau (garanties complémentaires optionnelles), quel que soit le nombre total de souscriptions. Cet outil a vocation à être maintenu et amélioré dans le cadre de la prochaine programmation de la PAC.

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