Question de Mme BRULIN Céline (Seine-Maritime - CRCE) publiée le 17/10/2018

Question posée en séance publique le 16/10/2018

Mme Céline Brulin. Monsieur le président, notre groupe s'associe pleinement au message de solidarité que vous avez adressé aux départements qui viennent d'être touchés par des intempéries meurtrières et au soutien que vous avez apporté à nos services publics mobilisés pour secourir et protéger nos concitoyens.

Monsieur le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, vous avez présenté hier devant le Conseil supérieur de l'éducation un texte portant sur l'avenir de l'école. Le rejet de vos orientations par cette instance traduit les nombreuses inquiétudes que suscite un projet construit sans concertation avec la communauté éducative et dont on peine à comprendre la cohérence.

Ces inquiétudes sont partagées dans nos territoires. Si l'abaissement de l'âge de la scolarité obligatoire à trois ans, prôné de longue date par notre groupe, est à saluer, nous nous inquiétons des moyens de sa mise en œuvre. En effet, les communes participeront au financement de cette mesure, y compris pour les écoles maternelles privées. Vos annonces sur la création d'un fonds de compensation ne dissipent pas les craintes qu'inspire à de nombreux maires la prise en charge de ces dépenses supplémentaires sur le long terme.

De même, les assistants d'éducation ne peuvent être, à nos yeux, que des soutiens aux enseignants titulaires. Leur permettre d'exercer des fonctions d'enseignement risque d'accroître les inégalités territoriales s'ils remplacent des enseignants de plein exercice dans les territoires ruraux ou les quartiers populaires, où les problématiques de recrutement sont le plus importantes.

Enfin, nous sommes nombreux à souhaiter que vous renonciez à ramener, qui plus est par ordonnance, le nombre d'académies à treize, ce qui éloignerait davantage encore ces instances des réalités du terrain. À cet égard, les résultats de l'expérimentation menée en Normandie devraient vous inviter à la prudence et au débat.

Monsieur le ministre, comptez-vous tenir compte de ces inquiétudes et de bien d'autres ayant émergé ces derniers jours au sein de la communauté éducative ? (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

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Réponse du Ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse publiée le 17/10/2018

Réponse apportée en séance publique le 16/10/2018

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Madame la sénatrice Brulin, je vous remercie de votre question, qui me permet d'évoquer le très important projet de loi qui sera soumis à l'examen du Sénat au début de l'année prochaine. J'ai souvent entendu les sénatrices et les sénateurs demander la tenue de débats de fond sur les questions d'éducation. Nous en avons déjà eu certains, mais la discussion de ce projet de loi représentera évidemment à cet égard une occasion toute particulière.

L'abaissement à trois ans de l'âge de la scolarisation n'est pas une mesure prise de façon inopinée : elle a été annoncée par le Président de la République voilà plusieurs mois, à l'occasion des assises de la maternelle. Son inspiration s'inscrit dans la grande ligne de l'histoire de la République. On ne change pas l'âge de la scolarité obligatoire tous les jours ; c'est la troisième fois que cela arrive. La France deviendra le pays du monde où l'instruction obligatoire commence le plus tôt.

Cette évolution devrait tous nous rassembler. D'ailleurs, madame la sénatrice, vous avez rappelé que votre groupe la proposait dans des programmes précédents.

Il faudrait se demander pourquoi les majorités successives n'avaient jusqu'à présent pas pris cette mesure, dont on parle pourtant depuis quinze ans. Il y a, certes, quelques petits obstacles, mais ils ne sont rien par rapport à l'objectif social fondamental de scolariser chaque année 20 000 élèves de plus. Entre trois à six ans, c'est un âge clé de la vie pour agir contre les inégalités sociales, qui se reflètent notamment dans la maîtrise du langage.

Vous devriez donc soutenir cette mesure sociale, qui sera accompagnée des dispositions techniques nécessaires. Bien entendu, nous respecterons la Constitution : il y aura des compensations pour les communes.

Quand Jules Ferry a instauré l'instruction obligatoire, il a dû lui aussi affronter de nombreuses oppositions, parce qu'il imposait aux communes une obligation. Mais quelle belle obligation c'était !

Travaillons ensemble sur cette mesure et sa compensation, qui sera effective. Il est dommage de cultiver des inquiétudes a priori, alors qu'il s'agira d'un très grand progrès démocratique. Nous aurons largement l'occasion d'en débattre, ce dont je me réjouis. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

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