Question de Mme ASSASSI Éliane (Seine-Saint-Denis - CRCE) publiée le 27/09/2018

Mme Éliane Assassi interroge Mme la secrétaire d'État, auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées à propos de la pénurie de places en instituts médico-pédagogiques du département de Seine-Saint-Denis et, plus généralement, de la prise en charge largement insuffisante des enfants, adolescents et adultes en situation de handicap.
Il n'existe que 1 800 places dans les instituts médico-éducatifs (IME), médico-professionnels (IMPRO) et thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques (ITEP), pour 3 400 enfants et adolescents orientés vers ces établissements. Les conséquences en sont la déscolarisation, une mauvaise orientation, le recours à des écoles privées hors-contrat dont le coût ne peut être pris en charge que partiellement par l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) et ses compléments, conséquences auxquelles on peut ajouter le désespoir des familles.
Concernant les adultes, 450 sont placés en Belgique quand 165 jeunes adultes de plus de 20 ans sont maintenus dans les établissements pour enfants et adolescents au titre de l'« amendement Creton » (Art. 6 de la loi n° 75-534 du 30 juin 1975 d'orientation en faveur des personnes handicapées). Selon le plan départemental Défi-handicap, 900 places sont manquantes dans les structures pour adultes.
De nombreux enfants du département sont privés de leurs droits fondamentaux à l'éducation ; ainsi de nombreuses personnes en situation de handicap sont privées de leur droit de vivre dignement et de bénéficier d'un accès suffisant aux soins.
L'agence régionale de santé semble être dans l'incapacité de constater la gravité de la situation quand l'Éducation nationale n'offre aucun débouché concret aux familles à part la déscolarisation.
Elle lui demande quelles mesures d'urgence seront prises pour permettre aux établissements et services de son département de répondre aux besoins.

- page 4845


Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé publiée le 21/11/2018

Réponse apportée en séance publique le 20/11/2018

Mme Éliane Assassi. Madame la secrétaire d'État, ma question porte sur la pénurie de places en instituts médico-pédagogiques dans le département de la Seine-Saint-Denis et, plus précisément, sur la prise en charge des enfants, adolescents et adultes en situation de handicap.

La maison départementale des personnes handicapée constatait, en 2016, qu'il n'existait que 1 800 places en instituts médico-éducatifs, en instituts médico-professionnels et en instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques pour les 3 400 enfants et adolescents orientés vers ces établissements.

Cela conduit à de nombreuses déscolarisations et à de mauvaises orientations pour des enfants et adolescents fragiles. Des parents sont contraints de quitter leur emploi ou de recourir à des écoles privées hors contrat, dont le coût n'est pris en charge que partiellement.

Concernant les adultes, 450 sont placés en Belgique, quand 165 jeunes adultes de plus de vingt ans sont maintenus dans des établissements pour enfants et adolescents au titre de « l'amendement Creton ».

Selon le plan départemental « Défi Handicap », 900 places manquent dans les structures pour adultes. En Seine-Saint-Denis, année après année, les institutions sont confrontées à des situations pour lesquelles il est impossible de trouver une solution, qu'il s'agisse d'enfants ou d'adultes.

La situation est grave. L'Agence régionale de santé, l'ARS, devrait s'en indigner, quand l'éducation nationale n'offre aucun débouché concret aux familles, à part la déscolarisation.

Le vice-président de la commission des droits et de l'autonomie des personnes en situation de handicap de la Seine-Saint-Denis, qui est présent ce matin dans les tribunes de notre hémicycle, appelle le Gouvernement, au nom des familles, à prendre des mesures d'urgence. Que lui répondez-vous, madame la secrétaire d'État ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice, je partage votre constat sur l'insuffisance de l'offre d'accompagnement des personnes, enfants ou adultes, en situation de handicap dans la région Île-de-France, particulièrement en Seine-Saint-Denis. Cette situation n'est pas acceptable.

Ce constat n'est malheureusement pas nouveau, puisqu'il rejoint celui, critique, qu'avait dressé la Cour des comptes dès 2012, dans un rapport sur les missions de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA, regrettant l'insuffisance du rééquilibrage de l'offre médico-sociale entre les territoires.

Les actions entreprises pour accélérer le rattrapage ont toutefois été lentes. Ainsi, la CNSA n'a revu qu'en 2017 sa méthode de répartition des crédits pour renforcer l'équité territoriale.

Aussi, Sophie Cluzel a pris, dès sa nomination, la décision de renoncer à l'emploi de la « réserve ministérielle », pratiquée par tous les gouvernements précédents, dont la Cour des comptes avait critiqué la pratique opaque et noté qu'elle était un frein au rééquilibrage.

L'intégralité des crédits nouveaux de 2018 a ainsi pu être répartie selon des critères prenant mieux en compte les dynamiques des besoins, qui sont très favorables à la région Île-de-France. D'ores et déjà bénéficiaire prioritaire de l'enveloppe de transformation de l'offre, dotée de 180 millions d'euros, la région Île-de-France a disposé, pour cette seule année, d'une enveloppe de plus de 18 millions d'euros pour développer et transformer son offre, améliorer l'accompagnement des personnes autistes et prévenir les départs non souhaités vers la Belgique.

Il y a urgence. Les tensions sur l'offre francilienne sont fortes, en particulier dans le département de la Seine-Saint-Denis.

C'est pourquoi l'Agence régionale de santé considère que ce département est prioritaire dans sa politique d'équipement. Elle a lancé un plan de développement de réponses inclusives, mobilisant, outre ses crédits, les moyens juridiques plus souples qui lui ont été accordés de manière dérogatoire par un décret du 29 décembre 2017.

Le premier appel à manifestation d'intérêt, lancé en juillet dernier, a rencontré un vif succès : 305 dossiers de candidature ont été déposés. Ces derniers incluent des projets répondant à la variété des besoins : appui à la scolarisation en milieu ordinaire, propositions d'habitat inclusif ou encore d'emploi accompagné.

Les premières autorisations seront délivrées avant la fin de l'année.

Les projets qui n'auraient pas pu être retenus dans le cadre de cette première vague pourront l'être dans celui d'un second appel à manifestation d'intérêt, mais aussi des contrats pluriannuels d'objectifs que l'ARS doit engager tout au long de l'année 2019.

Cette politique ne pourra porter pleinement ses fruits qu'en étroite coopération avec les départements, qui partagent la responsabilité de cette politique avec l'État, et grâce à un travail de concertation, lequel est déjà engagé.

Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour répondre à Mme la secrétaire d'État, en quarante-neuf secondes.

Mme Éliane Assassi. Madame la secrétaire d'État, vous admettrez que le fait que de nombreux enfants et adultes de notre département soient privés de leurs droits fondamentaux, tels le droit à l'éducation, le droit à vivre dignement et le droit à bénéficier d'un accès aux soins, est choquant dans un pays comme le nôtre. Ces personnes et leur famille ne sauraient attendre davantage aujourd'hui. Elles ont déjà trop attendu, et peu de réponses leur ont été données.

Il conviendrait que le Gouvernement ne se contente pas d'annonces générales et prenne des mesures d'urgence pour notre pays, bien évidemment, mais aussi pour la Seine-Saint-Denis en particulier.

Je le répète, il y a urgence, car c'est tout simplement une question d'humanité.

Mme Michelle Gréaume. Très bien !

- page 15800

Page mise à jour le