Question de M. FOUCHÉ Alain (Vienne - Les Indépendants) publiée le 13/09/2018

M. Alain Fouché attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur le malaise des élus locaux et en particulier des maires des petites communes. Cette situation est perceptible dans toute la France et elle s'aggrave avec les choix du Gouvernement envers les territoires. En témoigne le nombre de maires ayant quitté leur fonction depuis 2014 qui est en hausse de 55 % par rapport à la précédente mandature. Cette hausse est le résultat du manque de moyens des élus locaux qui, submergés par les contraintes administratives et les responsabilités, se voient transférer de plus en plus de compétences sans disposer de moyens financiers permettant de les assumer à cause notamment de la baisse des dotations. Le temps dévolu par un élu local à ses missions est souvent équivalent à un plein temps. Les contraintes toujours plus importantes et notamment financières ne leur permettent plus de recruter du personnel. Ils doivent souvent faire eux-mêmes la mission d'un agent municipal. Concilier le mandat avec l'exercice d'une activité professionnelle est en outre particulièrement difficile. Les collectivités locales ne sont plus écoutées, elles n'ont plus de visibilité notamment quant à la fiscalité locale, leur indépendance financière est remise en cause. Par ailleurs, alors qu'un élu sur deux en France bénéficie d'une indemnité mensuelle inférieure à 360 euros, le changement de la fiscalité sur celles-ci leur fait subir une augmentation conséquente de leur impôt sur le revenu. Les maires assument une tâche difficile et indispensable à la vie de nos territoires et à la démocratie. La loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République n'a fait qu'augmenter les difficultés des communes et particulièrement dans la ruralité. Face à ces situations, le découragement est perceptible. Ainsi, il voudrait savoir quelles sont les mesures qu'il compte prendre pour résoudre cette crise, et en particulier s'il entend lancer ce véritable chantier du statut de l'élu local.

- page 4647


Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'intérieur publiée le 21/11/2018

Réponse apportée en séance publique le 20/11/2018

M. Alain Fouché. Monsieur le secrétaire d'État, le Congrès annuel des maires de France s'ouvre sur fond de malaise des élus locaux. Depuis 2014, le nombre de maires ayant quitté leur poste est en hausse de 55 % par rapport à la précédente mandature ; un dernier sondage prévoit 50 % d'abandons en 2020.

Alors que 68 % des Français leur font confiance, les maires sont usés. Ils sont usés par la recentralisation, la métropolisation, les fractures territoriales qui augmentent. Ils sont usés par des moyens financiers qui diminuent alors que les charges augmentent. La baisse des dotations entraîne des difficultés sans précédent et leur indépendance financière est remise en cause. Ils sont usés par l'accroissement des contraintes administratives. Certaines de ces tracasseries ne datent pas d'aujourd'hui. Ils sont usés par les faibles revenus qu'ils perçoivent : un maire sur deux bénéficie d'une indemnité mensuelle inférieure à 360 euros. La décision du Gouvernement de modifier leur fiscalité va entraîner une augmentation de l'impôt sur le revenu.

Les maires assument une tâche difficile et indispensable à la vie de nos territoires. Elle est peu conciliable avec une activité professionnelle. Un vrai statut de l'élu est attendu depuis longtemps, et c'est votre engagement ! Le Sénat a soumis des propositions en octobre dernier, je crois savoir que certaines d'entre elles seraient reprises.

Je lance aujourd'hui un cri d'alarme, monsieur le secrétaire d'État. Quelles mesures entendez-vous prendre pour résoudre cette crise et pouvez-vous nous indiquer les grandes lignes de ce futur statut de l'élu ? Je vous remercie de nous rassurer.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, le Gouvernement n'ignore pas les difficultés que peuvent rencontrer les élus locaux, qui consacrent leur temps et mettent toute leur énergie, toutes leurs compétences, au service de leurs concitoyens.

Toutefois, permettez-moi de relativiser les chiffres évoqués dans votre question. Le nombre de démissions de maires a très peu augmenté par rapport à la mandature précédente. Il est d'ailleurs davantage lié à des raisons de santé, professionnelles ou familiales, à des raisons mécaniques, comme la constitution de communes nouvelles, ou à la fin du cumul des mandats qu'à des raisons de départs volontaires pour motifs politiques ou par lassitude.

M. François Bonhomme. Ça reste à voir…

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État. Néanmoins, nous sommes bien entendu très attentifs à ce point. D'ailleurs, lors de son discours prononcé à l'occasion du 100e Congrès des maires de France du 23 novembre 2017, le Président de la République a fait part de son attachement à la place des élus locaux et a exprimé toute sa considération pour leur engagement et leurs convictions. Conformément à ce qu'il avait annoncé alors, plusieurs mesures sont mises en œuvre pour traduire concrètement cette reconnaissance de l'État.

Tout d'abord, il s'agit de réduire le poids des normes pesant sur les collectivités locales. La circulaire du Premier ministre en date du 20 octobre 2017 prescrit que toute norme réglementaire nouvelle doit s'accompagner de deux mesures d'abrogation ou, à défaut, de simplification. La circulaire du 8 novembre 2017 relative à l'accord de méthode entre l'État et les collectivités territoriales élaboré dans le cadre de la Conférence nationale des territoires, demande au ministre, dans la sphère des compétences décentralisées, de laisser le champ le plus large possible au pouvoir réglementaire local.

D'une manière plus générale et dans le cadre du même accord de méthode, le Gouvernement s'est engagé à ce qu'aucune décision concernant les collectivités territoriales ne soit prise sans que ces dernières aient été préalablement consultées.

Enfin, conformément à la circulaire du Premier ministre du 12 janvier 2018, chaque projet de loi sectoriel devra intégrer un volet de mesures de simplification des normes législatives en vigueur. Les dispositions relatives aux collectivités territoriales sont évidemment comprises dans ce champ.

Les propositions de la mission d'évaluation et d'allégement des normes applicables aux collectivités territoriales, dirigée par Alain Lambert, ancien ministre et président du Conseil national d'évaluation des normes, et par Jean-Claude Boulard, ancien maire du Mans, décédé en juin dernier, font également l'objet d'un examen très attentif par le Gouvernement.

Mme la présidente. Il faut conclure.

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État. Par ailleurs, un chantier est dédié aux conditions d'exercice des mandats locaux dans le cadre de la Conférence nationale des territoires. Il pourra se nourrir des travaux engagés sur ces questions par la délégation du Sénat aux collectivités territoriales puisque celle-ci a constitué un groupe de travail chargé de mener une réflexion sur le statut des élus locaux.

Mme la présidente. Il faut vraiment conclure, monsieur le secrétaire d'État.

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État. Dans ces conditions, c'est un véritable pacte de confiance que le Gouvernement propose aux élus de la République, de nature à leur permettre un exercice serein et accompli de leur mandat.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Fouché, pour répondre à M. le secrétaire d'État, en quarante-trois secondes.

M. Alain Fouché. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de vos précisions sur les normes. Je connais bien le texte sur les simplifications puisque j'en ai été le rapporteur au Sénat. Néanmoins, et c'est un problème, l'administration ne suit pas toujours ce que décide le politique.

Quoi qu'il en soit, vous ne m'avez pas répondu sur le statut de l'élu. Il est pourtant très important et très attendu. Vous n'avez pas non plus évoqué les dotations. Certes, leur niveau global reste le même, mais de nombreuses communes ont vu leurs dotations baisser. Dans mon seul département, la Vienne, 155 communes sur 280 communes ont enregistré une diminution de leurs dotations. De plus, les régions aident de moins en moins les petites communes. Telles sont nos difficultés. J'ai noté certaines de vos annonces, mais les maires sont las et le Gouvernement doit s'engager à faire plus.

Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Alain Fouché. J'ai terminé, madame la présidente.

- page 15819

Page mise à jour le