Question de Mme DELATTRE Nathalie (Gironde - RDSE) publiée le 26/07/2018

Mme Nathalie Delattre interroge M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur l'extension de la labellisation de l'Union européenne (UE) aux « transformateurs-acheteurs » de chênes. Mise en place par le décret n° 2015-1129 du 11 septembre 2015 relatif aux conditions pour se porter acquéreur des ventes des coupes de bois réalisées par l'office national des forêts (ONF), la labellisation UE visait à garantir un approvisionnement protégé en chênes issus des forêts domaniales. Mais, en réservant l'intégralité des ventes labellisées aux transformateurs français, ce dispositif a eu pour effet d'aggraver les difficultés de trésorerie et d'approvisionnement rencontrées par les petites scieries françaises. Or, par sa résolution n° 2018-08 du 28 juin 2018, le conseil d'administration de l'ONF s'est prononcé pour l'extension de la labellisation UE aux transformateurs-acheteurs. Inquiétant d'autant plus les petites scieries et les exploitants forestiers français, cette disposition présenterait aussi un véritable problème d'application pour les clients européens d'acheteurs labellisés français se voyant imposer des restrictions nationales. C'est pourquoi elle l'interroge sur la nécessaire suppression de l'article 4 de l'ancienne charte UE. Aussi, elle le sollicite sur les perspectives d'évolution de cette labellisation UE pour mettre en place un accès privilégié pour les petites scieries ainsi que des contrats de préférence pour les transformateurs français.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 23/08/2018

Face au développement des exportations de grumes de chêne en dehors de l'Union européenne (UE) au détriment de la filière européenne de transformation et de l'emploi dans nos territoires, en dialogue avec les organisations représentatives du secteur, en particulier la fédération nationale du bois, l'État, pour les forêts dont il est propriétaire, avec le soutien de la fédération nationale des communes forestières s'agissant des forêts des collectivités, a décidé par décret en Conseil d'État du 11 septembre 2015 que le droit de se porter acquéreur aux ventes publiques de l'office national des forêts (ONF) pouvait être subordonné à la présentation d'engagements permettant d'assurer la prise en compte effective des objectifs mentionnés à l'article L. 121-2-1 du code forestier. Ces objectifs sont notamment de renforcer le développement de la filière de production de récolte, de transformation et de commercialisation des produits forestiers, de fixer sur le territoire européen les capacités de transformation des produits forestiers et d'assurer le maintien de l'activité économique, notamment en zone rurale défavorisée. Sur cette base, l'ONF a mis en œuvre, par plusieurs résolutions de son conseil d'administration (CA), un dispositif « label UE » permettant de subordonner les ventes publiques de bois d'œuvre de chêne à un engagement de l'acheteur de transformation dans l'UE. Cet engagement porte depuis l'origine, sur l'ensemble de l'approvisionnement de l'acheteur. Il n'est en effet pas possible d'assurer la traçabilité des grumes acquises en forêt publique de celles acquises en forêt privée. Deux voies permettent aux acheteurs de prendre l'engagement de transformer dans l'UE et donc d'accéder aux ventes publiques de bois d'œuvre de chêne de l'ONF : soit un engagement direct auprès de l'ONF par signature d'un document récapitulant les engagements ; soit l'adhésion au cahier des charges porté par l'association pour l'emploi du chêne et des feuillus. Il s'agit là d'un dispositif volontaire : les acheteurs qui ne s'engagent pas dans ce dispositif, peuvent s'approvisionner soit auprès des propriétaires privés qui ne souhaitent pas subordonner la vente de leur bois à un engagement contractuel similaire soit auprès de l'ONF pour des lots minoritaires de bois d'œuvre de chêne ou des lots labellisés invendus en ventes publiques. Le dispositif a été prolongé jusqu'au 31 décembre 2017 lors du CA du 12 octobre 2016 puis jusqu'au 31 décembre 2018 lors du CA du 30 novembre 2017. Alors qu'un certain tassement des exportations de chêne vers la Chine a pu être observé en 2016, les exportations vers la Chine ont repris au dernier trimestre 2017 malgré le dispositif « label UE » tel qu'en place. Face à cette situation, un travail d'analyse conduit par l'ONF avec les représentants professionnels de la filière a permis d'identifier les failles du dispositif en place permettant un contournement de l'objectif initial. Ce travail a abouti à une modification des engagements pour accéder aux ventes de bois de l'ONF qui a été présentée et adoptée à l'unanimité lors du CA du 28 juin de l'ONF. Les améliorations apportées consistent notamment : à demander à chaque acheteur de déclarer les sociétés qui lui sont liées et de se porter garant qu'elles respecteront son engagement. Le contractant porte seul la responsabilité de l'engagement ; à exiger de chaque sous-acquéreur qu'il soit lui-même engagé dans la labellisation UE. Ainsi, un acheteur de bois d'œuvre de chêne de l'ONF ne peut revendre le bois qu'il ne transforme pas lui-même qu'à une entreprise s'engageant à transformer ou faire transformer, sur le territoire de l'UE, le bois d'œuvre de chêne ainsi acquis. Cette labellisation en cascade simplifie la traçabilité des flux et sécurise les contrôles en rendant les fraudes au label plus difficiles. Ce nouvel engagement de transformation dans l'UE s'applique dans les mêmes termes que le précédent, à savoir à tous les acheteurs de ventes publiques de chêne, qu'ils soient français, européens ou issus d'un pays tiers sans aucune discrimination. De même, il s'applique quelle que soit la qualité de l'acheteur, scieurs, négociants ou exploitants. Il ne modifie ainsi en rien le modèle du précédent engagement mais vient le conforter. Ce dispositif, ainsi rendu plus robuste, est la preuve de l'engagement résolu du Gouvernement dans nos territoires, de maintenir et développer la valeur ajoutée grâce à la transformation préférentielle du bois issu des forêts publiques (domaniales et communales) par l'outil industriel français et européen. Il doit permettre à la filière, pendant la durée de sa mise en œuvre, de s'organiser pour notamment déployer la contractualisation entre l'amont et l'aval et sécuriser ainsi durablement l'approvisionnement en chêne de nos entreprises face à la pression commerciale exercée aujourd'hui par les pays tiers sur les grumes de chêne issues des forêts françaises.

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