Question de M. AMIEL Michel (Bouches-du-Rhône - LaREM) publiée le 26/07/2018

M. Michel Amiel attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur le sujet des mineurs non accompagnés notamment sur la détermination de leur âge.

Un récent rapport de l'association « Human rights watch » (HRW) a révélé les problèmes au sein du dispositif d'évaluation des mineurs isolés étrangers (DEMIE) mis en place par la Croix-Rouge française mandatée par le département de Paris pour évaluer l'âge des enfants non accompagnés dans la capitale.

Outre le fait que certains affirment n'avoir même pas eu accès à la structure, l'incertitude du traitement de la situation de ces mineurs reste le plus problématique : des refus non notifiés par écrit (rendant impossible toute contestation judiciaire), des disparités dans la justification de l'évaluation de l'âge (certains donnant trop de détails sont jugés trop matures pour être mineurs, certains donnant peu de détails ou se trompant sur des dates sont considérés insincères), de recours controversés aux tests osseux etc.

Quand les décisions sont contestées, les retards pris lors de la reconnaissance officielle du statut de mineur peuvent également bloquer l'accès de ces enfants à un statut légal à leur majorité affectant l'éligibilité à un permis de séjour et à la citoyenneté française.

Enfin, la variabilité entre départements sur le taux d'acceptation, sur la reconnaissance mutuelle des décisions entre départements ne saurait être considérée comme satisfaisante.

Aussi, il lui demande quelles sont ses intentions pour harmoniser les procédures d'évaluation des mineurs non accompagnés demandant la protection de l'aide sociale à l'enfance des départements et quels moyens l'État s'apprête à confier à ces collectivités sur ce sujet.

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Transmise au Ministère de l'intérieur


Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 07/11/2019

Le flux de personnes se déclarant mineurs non accompagnés (MNA) a fortement augmenté ces trois dernières années. Le nombre d'évaluations de minorité effectuées par les départements a doublé en trois ans, passant de moins de 30 000 en 2015 à plus 60 000 contrôles en 2018 pour seulement 17 022 confirmations de minorité cette année. La quasi-totalité des départements ont ainsi fait part de la saturation de leurs dispositifs d'évaluation et de prise en charge, qui emporte des conséquences tant sur la qualité du service rendu que sur les équipes des services de la protection de l'enfance et les finances des départements. Alerté sur les difficultés engendrées par l'augmentation du flux de MNA, le Premier ministre a confirmé le 20 octobre 2017 que l'État renforcerait son accompagnement des départements pendant la phase d'évaluation de la minorité. Une mission bipartite composée de représentants des corps d'inspection de l'État et de conseils départementaux a rendu le 15 février 2018 un rapport étayé. Sur cette base, un accord est intervenu le 17 mai 2018 entre l'État et l'association des départements de France. Aux termes de cet accord, qui ne remet pas en cause la compétence des départements en matière de protection de l'enfance, l'État s'est engagé à renforcer son appui opérationnel et financier aux départements. Outre des efforts de régulation des flux (démantèlement des filières, fichier national, etc.), l'État a proposé une aide concentrée sur la phase d'accueil et d'évaluation, avec 500 euros par jeune à évaluer, plus 90 euros par jour pour l'hébergement pendant quatorze jours, puis 20 euros du 15ème au 23ème jour. Le décret n° 2019-57 du 30 janvier 2019 a créé un traitement de données pour mieux garantir la protection de l'enfance, dénommé « appui à l'évaluation de la minorité (AEM) ». Il permet d'accélérer et de fiabiliser le processus d'évaluation de la minorité et d'éviter le détournement de la protection de l'enfance par des majeurs et ainsi de mieux accueillir les mineurs en situation d'isolement. L'enrôlement des données biométriques des personnes se déclarant mineures dans un fichier national constituera un outil opérationnel pour identifier une personne déjà évaluée majeure et ainsi limiter les présentations successives dans plusieurs départements. Ce décret, pris en Conseil d'État, a été soumis au préalable à l'avis de la commission nationale de l'informatique et des libertés, qui a rendu un avis favorable, émettant quelques réserves qui ont pu être prises en compte. Il apporte toutes les garanties en matière de protection des données et des droits individuels. Le traitement de données permet d'accroître la robustesse de la procédure d'évaluation et de garantir que les personnes admises au bénéfice de l'aide sociale à l'enfance sont bien mineures. Le décret instituant ce traitement prévoit d'ailleurs que les données des personnes évaluées majeures sont reversées dans l'application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France, ce qui permet aux préfectures d'initier, le cas échéant, les procédures d'éloignement. S'agissant des personnes qui se révèlent être majeures après leur prise en charge, il est rappelé que l'établissement de la fraude fait obstacle à la délivrance d'un titre de séjour. Le recours au dispositif d'aide à l'évaluation mis en place par l'État est laissé à l'appréciation du conseil départemental. Au 1er octobre 2019, 61 collectivités l'utilisent et 15 autres ont exprimé le souhait d'en bénéficier. Une réduction des flux de présentation aux guichets des collectivités est constatée dans les départements qui emploient l'AEM. Enfin, les services de l'État sont mobilisés pour combattre les filières dans la mesure où elles constituent des rouages déterminants dans l'exploitation de cette catégorie d'êtres humains particulièrement vulnérables.

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