Question de M. BONNE Bernard (Loire - Les Républicains) publiée le 21/06/2018

M. Bernard Bonne rappelle à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur les termes de sa question n°03181 posée le 08/02/2018 sous le titre : " Projets de réforme en matière de scrutins électoraux ", qui n'a pas obtenu de réponse à ce jour.

Il lui fait observer que plus de quatre mois se sont écoulés depuis le dépôt de cette question. Cette durée est en contradiction avec le règlement du Sénat et avec la circulaire n°5623/SG du 12 décembre 2012 relative aux relations avec les parlementaires dans laquelle le Premier ministre souligne que les questions écrites « constituent une modalité importante de l'exercice par le Parlement du contrôle de l'activité gouvernementale » et que les délais de réponse, un mois éventuellement prolongé d'un mois supplémentaire « doivent être strictement respectés ».


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Transmise au Ministère de l'intérieur


Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 26/12/2019

Si les machines à voter présentent des avantages indéniables en termes de facilitation du processus de dépouillement, leur usage a soulevé depuis une dizaine d'années des interrogations croissantes, tant du point de vue de la rationalisation de l'organisation du scrutin, de la sécurité et de la transparence du processus de vote, que de celui du respect de principes fondamentaux du droit électoral, non seulement en France, mais partout en Europe et dans d'autres pays démocratiques, où leur utilisation est en déclin. Ainsi, entre 2007 et 2012, 32 communes françaises y ont renoncé pour des raisons de coût, de complexité d'usage et de mauvaise acceptation des électeurs. Seulement 66 communes continuent aujourd'hui d'utiliser les machines à voter. Un travail approfondi sur l'usage des machines à voter associant en 2007 le Conseil d'État, des représentants des collectivités territoriales et des usagers, le ministère de l'intérieur et le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) a conduit le ministère de l'intérieur à instituer un moratoire ayant pour effet de figer le nombre de communes autorisées à se doter de machines à voter. Depuis, aucune nouvelle commune n'a été autorisée à utiliser les machines à voter, aucun nouveau modèle de machine n'a été agréé et l'État n'a plus versé la subvention de 400 euros pour l'acquisition d'un appareil. Plusieurs raisons ont justifié la mise en œuvre de ce moratoire. Elles tenaient notamment à l'allongement des temps d'attente dans les bureaux équipés, sources de contentieux et au coût que les machines à voter représentent pour les communes, évalué entre 4 000 et 6 000 euros en 2007 pour l'achat d'une machine, auxquels s'ajoutent les frais d'entretien, de stockage et de formation des utilisateurs. De ce fait, les éléments de simplicité n'ont pas été démontrés dans le cadre du bilan effectué en 2007. Le moratoire a été motivé par un problème de confiance de la part des citoyens devant l'impossibilité de procéder à un comptage physique des suffrages, comme l'avait relevé le Conseil constitutionnel dans ses observations sur les scrutins présidentiel et législatif de 2007. Ce dernier soulignait ainsi que « l'utilisation [des machines à voter], qui rompt le lien symbolique entre le citoyen et l'acte électoral que la pratique manuelle du vote et du dépouillement avait noué, se heurte aussi à une résistance psychologique qu'il convient de prendre en compte ». En ce sens la machine à voter ne permet pas de respecter un des principes fondamentaux du droit électoral qui est celui de permettre à chaque citoyen de contrôler directement les opérations de vote et de dépouillement. Ces raisons ont également été soulignées par les sénateurs Alain Anziani et Antoine Lefèvre, qui ont estimé, dans un rapport d'information sur le vote électronique remis en avril 2014, qu'il était nécessaire de proroger le moratoire, compte tenu des risques sur le secret du scrutin et sur sa sincérité associés à l'usage des machines à voter. D'après eux, ces dernières « ne peuvent garantir ni la conformité du choix de l'électeur, ni l'absence de dysfonctionnement dans l'enregistrement des suffrages. » Enfin, le niveau élevé de risques « cyber », tels que ceux qui ont récemment caractérisé les scrutins législatif et présidentiel de 2017, doit désormais être pris en compte dans l'appréhension des opérations de vote réalisées à l'aide de machines à voter, du fait, pour une part prépondérante du parc installé, de l'obsolescence technique des dispositifs, ainsi que de l'importance du risque inhérent attaché aux opérations de paramétrage des machines à voter préalable aux opérations de vote à proprement parler. Bien que le protocole de préparation avant l'élection est strict, avec notamment l'intervention d'un huissier, et que les machines ne sont pas connectées à internet ni à aucun réseau, cela n'exclut pas le risque de fraude ou de piratage lié aux logiciels de paramétrage développés par les sociétés privées et implantés dans les machines à voter avant chaque scrutin. Au regard de l'ensemble de ces éléments techniques, le Gouvernement réexaminera pour les prochains scrutins le cadre applicable aux machines à voter, y compris pour ce qui concerne l'homologation et l'autorisation de nouveaux modèles. Dans le même temps, les conditions de réalisation d'un vote électronique ne reposant pas sur de tels dispositifs seront étudiées, conformément aux engagements du Président de la République. Par ailleurs, le réexamen concomitant des modalités d'exercice du vote sur machine et du vote par internet est nécessaire pour garantir, de manière cohérente, la sécurisation des deux dispositifs à laquelle vous faites référence. Cependant les deux procédés de vote demeurent différents sous de nombreux aspects et de ce fait leur mise en place plus large peut s'effectuer à des rythmes différents. Tels sont les engagements que traduit la feuille de route du ministère de l'intérieur communiquée en septembre 2017.

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