Question de Mme LEPAGE Claudine (Français établis hors de France - SOCR) publiée le 21/06/2018

Mme Claudine Lepage attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur l'aide publique au développement consacrée au Sahel qui regroupe cinq pays : la Mauritanie, le Burkina Faso, le Mali, le Niger et le Tchad.
Elle rappelle que cette région doit faire face à plusieurs défis ; un défi environnemental avec les conséquences du réchauffement climatique, un défi social avec 50 % de la population qui se trouve en dessous du seuil de pauvreté et une démographie en constance hausse, un défi culturel et éducatif d'accès à la connaissance et au savoir et bien entendu un défi sécuritaire avec la lutte contre le terrorisme qui frappe durement l'ensemble des pays.
Elle indique que si à court terme une réponse militaire doit nécessairement être apportée aux différents groupes terroristes, elle rappelle que seule une aide publique au développement efficace permettra de stabiliser l'ensemble de la région.
Le 13 juillet 2017 a été créé à l'initiative de la France et de l'Allemagne l'alliance Sahel avec comme objectif le développement à long terme du Sahel. Elle rappelle que la lutte contre la pauvreté, l'accès à l'éducation et à la santé en particulier des femmes et des jeunes filles et le développement économique sont des priorités de l'alliance Sahel qui s'est donné comme objectif de lancer une dizaine de projets pilotes dans la région.
Près d'un an après la mise en place de l'alliance Sahel, elle s'interroge sur son efficacité et plus largement sur l'avenir de l'aide publique au développement au Sahel.

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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 02/08/2018

Les membres de l'Alliance Sahel, désormais au nombre de 10 (France, Allemagne, Union européenne, Banque mondiale, Banque africaine de développement, PNUD, Royaume-Uni, Espagne, Italie, Luxembourg), ont pour objectif de mieux coordonner les actions des bailleurs afin d'obtenir des résultats rapides au bénéfice des populations, notamment dans les régions les plus vulnérables. L'Alliance concentre pour cela son action sur six secteurs (employabilité des jeunes, agriculture et sécurité alimentaire, accès à l'énergie, gouvernance, décentralisation et services de base, sécurité intérieure) en prenant compte de manière transversale la dimension genre (approche en cours de définition). L'Alliance représente aujourd'hui un portefeuille de plus de 500 projets, pour 7,5 milliards d'euros restant à mettre en œuvre sur le terrain. Au cours d'échanges menés avec les autorités des pays du G5 Sahel au premier semestre 2018, l'Alliance a identifié cinq zones d'action prioritaires, particulièrement vulnérables, où ses principes seront mis en œuvre, dès cette année dans la mesure du possible, au travers de projets multisectoriels et multi-bailleurs. Ces régions sont : les Hodh (Mauritanie), Konna (Mali), Tillaberi-Tahoua (Niger), le Nord Sahel (Burkina Faso) et le bassin du lac Tchad. Dans certaines régions, des projets existent et des échanges sont en cours pour mieux coordonner les efforts (Lac Tchad). Dans certaines de ces régions, l'attention portée par l'Alliance a déjà permis de réorienter des projets existants pour apporter une réponse rapide aux besoins (projet jeunesse pour Tillaberi). Dans d'autres cas, cet engagement des membres de l'Alliance les amène à identifier des projets ou cofinancements venant appuyer les initiatives déjà engagées (autour du projet Banque mondiale à Kona), ou encore à identifier de nouveaux projets (Hodh et Tillaberi) ou des projets nationaux pouvant être soutenus (Plan Urgence Sahel du Burkina Faso). Parmi les principes fondateurs de l'Alliance, se trouve également la recherche de modalités innovantes dans le but d'améliorer l'efficacité de nos actions au Sahel. En effet, l'objectif est non seulement de faire plus mais de faire mieux. Les membres de l'Alliance ont à cet effet engagé un travail d'identification des modes de faire (cofinancement, procédures d'instruction, suivi-évaluation, choix des maîtrises d'ouvrage, types de projets, etc.) les plus adaptés à la région dont les conclusions devraient être validées dans les prochaines semaines. Dans la continuité de ces échanges, l'AFD a par ailleurs lancé ses « États généraux du Sahel », exercice interne de réflexion sur l'évolution des modes de faire (conception de projets, procédures d'instruction, suivi-évaluation, etc.) de l'agence, en termes de design de projets mais également de procédures et d'organisation. Les conclusions de ce processus alimenteront les réflexions de l'Alliance. Enfin, les membres de l'Alliance reconnaissent les fortes attentes en termes redevabilité, tant du côté de la communauté des bailleurs qu'auprès des populations du Sahel. La redevabilité mutuelle est d'ailleurs un de ses principes fondateurs. La définition des indicateurs et le renforcement de la collecte des données sont deux enjeux majeurs auxquels l'Alliance doit faire face pour être en mesure de rendre compte de manière robuste. À cet effet, l'unité de coordination de l'Alliance est actuellement en train de mettre en place un système de redevabilité permettant le suivi des 36 cibles sectorielles adoptées par ses membres. S'agissant de l'aide publique au développement, le Sahel a bénéficié en 2016 d'une aide totale de 382,31 millions d'euros. Les données ne sont pas encore disponibles pour 2017 mais devraient évoluer dans une trajectoire de forte hausse grâce à la montée en puissance de la facilité d'atténuation des vulnérabilités. Cette dernière s'élève à 100 millions d'euros pour 2017, répartis sur quatre zones : le lac Tchad, la Centrafrique, le pourtour de la crise syrienne, et le Sahel via l'initiative Tiwara, qui mobilisera environ 200 millions d'euros additionnels sur la période 2017-2021 pour les cinq pays de cette zone. En adoptant la nouvelle stratégie française de réponse aux situations de fragilités « Prévention, Résilience et Paix durable », le comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) de février 2018 a fait du traitement des crises et des fragilités une priorité de la politique de développement française et, dans ce cadre, prévoit un renforcement de notre engagement financier au Sahel. Par ailleurs, le CICID a décidé d'une hausse sans précédent du volume d'engagements en dons projets de l'AFD, avec un saut quantitatif d'un milliard d'euros en 2019 par rapport à 2018. Dans le respect des cibles de concentration du CICID, cette activité subventionnelle se concentrera aux deux-tiers sur les 19 pays prioritaires (comprenant 18 PMA africains), dont les cinq pays sahéliens. Cet effort sera poursuivi sur l'ensemble du quinquennat afin d'atteindre la cible de 0,55 % du RNB alloués à l'APD en 2022. Il s'agit donc d'un effort financier démultiplié pour renforcer la crédibilité et l'efficacité de notre soutien au Sahel.

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