Question de M. ADNOT Philippe (Aube - NI) publiée le 24/05/2018

M. Philippe Adnot attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur le fait que la directive 2009/72/CE du Parlement Européen et du Conseil du 13 juillet 2009 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et abrogeant la directive 2003/54/CE, si elle requiert des États membres la mise en place de systèmes intelligents de mesure en vue de favoriser la participation des consommateurs au marché de fourniture de l'électricité, ne stipule en aucun cas de disposition revêtue de la force obligatoire et contraignant les administrés à accepter l'installation pour eux-mêmes de ce type de compteurs.
Or, en France, alors même, d'une part, que la Cour des comptes, dans son rapport de février 2018, a rappelé le caractère non obligatoire de ce déploiement, citant nommément les pays de l'Union qui ont fait le choix de ne pas y procéder, et, d'autre part, que certaines personnes expriment leur refus d'installation d'un compteur Linky auprès d'Enedis par courrier recommandé ou pose de dispositifs bloqueurs d'accès, Enedis continue de poser des compteurs.
Des motivations économiques, écologiques ou liées au respect des données personnelles et de leur exploitation, peuvent expliquer le nombre croissant de ces refus, lesquels, en tout état de cause, ne devraient pas pouvoir être outrepassés.
Aussi, il lui demande de bien vouloir lui expliquer les mesures qu'il entend mettre en œuvre afin d'assurer le respect de la liberté de choix des usagers qui ont exprimé leur opposition.

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Réponse du Ministère de la transition écologique et solidaire publiée le 30/08/2018

La directive de 2009 sur le marché intérieur de l'électricité fixe des objectifs ambitieux de déploiement de compteurs communicants, visant à équiper 80 % des foyers de tels dispositifs d'ici à 2020. À la suite d'une phase d'expérimentation portant sur le déploiement de 300 000 compteurs dans les régions de Tours et de Lyon, la commission de régulation de l'énergie (CRE) a procédé en 2011 à une évaluation favorable du dispositif. Les pouvoirs publics ont donc décidé de procéder à la généralisation du déploiement des compteurs communicants sur l'ensemble du territoire national avec le déploiement de 36 millions de compteurs prévu entre 2016 et 2021. Plus de 11 millions de compteurs étaient installés mi-2018, soit environ un tiers du programme et environ 30 000 compteurs sont installés chaque jour. Linky doit jouer un rôle central dans la maîtrise de la demande d'énergie. Plusieurs études ont notamment montré qu'avec un accompagnement et une connaissance précise de ses consommations, il est possible de réduire jusqu'à 8 % ses consommations d'électricité. Le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, a récemment appelé l'ensemble des acteurs à se mobiliser tout particulièrement sur ce volet, par une meilleure communication et une meilleure information, notamment lors de la pose des compteurs. ENEDIS devra en particulier proposer un document explicatif type sur la maîtrise de l'énergie à remettre au moment de la pose du compteur. De nouvelles modalités d'accès aux données de consommation doivent être développées (internet, applications pour téléphone mobile…) afin de permettre un accès plus facile aux données pour les consommateurs qui le souhaitent. Concernant les effets sanitaires, plusieurs études ont été réalisées par l'Agence nationale des fréquence (ANFR) et l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) et montrent que les niveaux d'exposition sont très inférieurs aux normes réglementaires. Des campagnes de mesures de l'exposition aux ondes électromagnétiques ont en effet été menées en 2016 et 2017 par l'INERIS, le centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) et l'agence nationale des fréquences (ANFR) sur des compteurs en laboratoire et installés dans des logements. Ces mesures ont montré que les compteurs produisent un champ électromagnétique faible et très inférieur aux valeurs limites réglementaires. De plus, le niveau d'exposition décroît très rapidement avec la distance au compteur ou le long du circuit électrique à l'intérieur d'une habitation. Les mesures en laboratoire réalisées par l'ANFR montrent que le champ magnétique à 30 cm du compteur Linky est du même ordre de grandeur que celui d'un chargeur d'ordinateur et près de trois fois inférieur à celui d'un écran TV. Le champ électrique à 30 cm du compteur Linky est similaire à celui des anciens compteurs, comparable à celui d'un écran TV et dix fois moindre que celui d'une lampe fluo compacte. En juin 2017, l'Anses a rendu public son rapport d'expertise sur l'exposition de la population aux champs électromagnétiques émis par les « compteurs communicants ». Les principaux enseignements de cet avis sont : que les niveaux d'exposition générés par les compteurs communicants sont très faibles par rapport aux valeurs réglementaires, et sont comparables à ceux émis par les dispositifs électriques ou électroniques domestiques (écrans TV, perceuse électrique sans fil…) ; qu'il est peu probable que l'exposition aux ondes émises puisse engendrer des effets sanitaires à court ou long terme. Le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, a néanmoins demandé à ENEDIS d'être particulièrement attentif aux personnes électrosensibles. Depuis le 6 juin 2018, le dispositif national de surveillance et de mesure des ondes géré par l'ANFR a évolué et permet à tout citoyen de faire gratuitement mesurer son exposition associée à des objets communicants fixes comme le compteur Linky. L'Anses poursuivra ses études sur les évolutions à venir du compteur afin de continuer à mesurer ses impacts sur les utilisateurs. Concernant la protection des données, toutes les dispositions réglementaires sont en place pour garantir la confidentialité des données de tous les utilisateurs. L'accord du consommateur est ainsi une condition préalable à toute collecte par le gestionnaire de réseau ou à toute transmission à des tiers. Les conditions ne sont cependant pas toujours claires pour les consommateurs qui ne savent pas à quoi ils s'engagent. Le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, a demandé, lors d'une réunion avec l'ensemble des parties prenantes, le 26 juin 2018, aux fournisseurs et à ENEDIS de revoir leur communication sur le sujet, afin de faire preuve de la plus grande transparence et de plus de pédagogie. Concernant le financement, qui a été critiqué par un rapport de la Cour des comptes, le ministre a souhaité qu'un travail soit engagé avec la CRE et ENEDIS pour envisager les possibilités d'évolution des modalités de rémunération de l'opérateur,  en particulier de celles liées à l'avance de trésorerie consentie par ENEDIS au regard de l'évolution des taux d'intérêt. Il est de la responsabilité des pouvoirs publics de rémunérer au juste niveau ENEDIS pour ce déploiement industriel de grande ampleur, tout en garantissant les intérêts du consommateur. Le remplacement du compteur est de la responsabilité du gestionnaire de réseau, dans le cadre de ses obligations réglementaires et contractuelles. Dans le cadre de son contrat unique ou de son contrat avec le gestionnaire de réseau, le client s'engage à permettre l'accès au compteur pour le gestionnaire de réseau. En tout état de cause, ce dernier doit procéder au remplacement du compteur en respectant notamment le droit de la propriété lorsque le compteur n'est pas situé sur l'espace public ou dans un endroit accessible. Lorsque le client refuse l'accès au compteur, les équipes de pose ne pourront donc pas procéder au remplacement du compteur. Toutefois, un client ayant refusé la pose d'un compteur communiquant ne pourra prétendre à bénéficier des avantages tarifaires qu'il propose et les prestations actuellement gratuites, comme les relevés de compteur par les agents, lui seront alors facturées, conformément au catalogue des prestations validé par la CRE.

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