Question de M. PIEDNOIR Stéphane (Maine-et-Loire - Les Républicains) publiée le 03/05/2018

M. Stéphane Piednoir appelle l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les conséquences que pourrait avoir le relèvement des seuils d'intervention du commissaire aux comptes dans les entreprises.
Issue d'une mission signée conjointement par le ministère de la justice et de l'économie, et menée par l'inspection générale des finances (IGF), cette proposition, si elle s'inscrivait dans le projet de loi « PACTE » (plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises), menacerait sérieusement la profession de commissaires aux comptes.
Relever les seuils de contrôle llégal pour les faire correspondre aux seuils préconisés, uniquement à titre indicatif, par le droit européen (Directive 2013/34/UE) ferait, de fait, perdre aux cabinets de commissaires aux comptes 80 % de leurs mandats et pourrait entraîner la disparition de plusieurs milliers de collaborateurs sur l'ensemble du territoire national.
Par ailleurs, en faisant sortir du champ de l'audit obligatoire un grand nombre de petites et moyennes entreprises, une telle mesure entraînerait un risque d'insécurité, non seulement financière mais aussi juridique et fiscale de l'ensemble de notre tissu entrepreneurial. Les avantages de la certification des comptes, même pour les entreprises de petite taille et de taille intermédiaire, sont, en effet, non négligeables : transparence, confiance des investisseurs, anticipation des défaillances des entreprises, etc.
Aussi, il lui demande de bien vouloir lui indiquer si des réflexions sont actuellement en cours, en concertation avec les parties prenantes, pour établir un seuil intermédiaire entre l'actuel seuil français et le seuil européen, qui soit pertinent au regard de notre tissu économique et qui ne remettent pas en cause toute une profession.

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Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 31/05/2018

Dans le cadre du plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE), le Gouvernement souhaite alléger les obligations pesant sur les petites entreprises, afin de faciliter leur développement. Parmi les mesures envisagées à cet effet, le relèvement de certains seuils réglementaires et fiscaux constitue une orientation importante pour réduire les charges administratives qui leur sont applicables. Dans ce cadre, le Gouvernement envisage, en effet, de relever les seuils de certification légale des comptes par un commissaire aux comptes au niveau prévu par le droit européen, c'est-à-dire 8 M€ de chiffres d'affaires, 4 M€ de bilan et cinquante salariés. Une analyse, conduite par l'inspection générale des finances, a en effet démontré que la pertinence de seuils d'audit légal plus faibles que ceux fixés par le droit européen n'est pas établie, tant du point de vue de la qualité des comptes des petites entreprises, que de leur accès au financement. Le rapport de l'inspection générale des finances démontre en outre que les coûts supportés par les petites entreprises françaises qui ne sont pas visées par l'obligation européenne de certification légale des comptes sont élevés (de l'ordre de 600 millions d'euros, soit en moyenne 5 511 € par an pour une entreprise située sous les seuils européens). Pour cette raison, il semble pertinent, au regard des enjeux financiers limités associés, de rendre facultative l'intervention d'un commissaire aux comptes dans les petites entreprises, alors que 75 % d'entre elles recourent en parallèle aux services d'un expert-comptable, qui concourt, d'ores et déjà, à la qualité comptable dans ces structures. Cette démarche est conforme à l'objectif fixé par le Premier ministre, dans la circulaire du 26 juillet 2017 relative à la maîtrise des flux réglementaires et de leur impact, d'identifier et d'éliminer les surtranspositions du droit européen dans notre droit national, alors qu'un nombre significatif d'États membres ont fixé des seuils identiques ou supérieurs à ceux prévus par le droit européen. Elle est également pleinement cohérente avec les orientations du Gouvernement visant à établir un nouveau contrat avec les entreprises fondé sur la restauration de liens de confiance mutuelle entre l'État et les acteurs économiques, et ainsi, une diminution du poids des contrôles et une responsabilisation individuelle accrue, comme en témoigne la création d'un droit à l'erreur, prévu par le projet de loi pour un État au service d'une société de confiance. Le relèvement des seuils d'audit constitue un défi pour la profession de commissaires aux comptes, impliquant une évolution en profondeur de son activité. Afin d'étudier de manière précise les conséquences de cette réforme et d'envisager les mesures d'accompagnement nécessaires, l'appui d'une mission présidée par Patrick de Cambourg, président de l'Autorité des normes comptables, a été sollicité sur l'avenir de la profession. Cette mission aura notamment pour objectif d'identifier des missions nouvelles, légales ou non, pouvant être confiées aux commissaires aux comptes ; de rechercher les moyens pour renforcer l'attractivité de cette profession et de permettre le maintien d'un maillage territorial suffisant de la profession dans les territoires ; de proposer des mesures d'aide aux professionnels les plus touchés par la réforme ; enfin, de formuler des propositions visant à favoriser le développement de l'expertise comptable et à enrichir ses missions d'appui et de conseil aux entreprises ne disposant pas d'un commissaire aux comptes. Les conclusions de cette mission permettront au Gouvernement d'adopter, d'ici à l'été 2018, un plan d'action visant à accompagner la mise en œuvre du relèvement des seuils d'audit.

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