Question de M. LAURENT Pierre (Paris - CRCE) publiée le 01/03/2018

M. Pierre Laurent attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la situation des personnes sans domicile fixe (SDF) à Paris et ailleurs sur le territoire national.
Dans la soirée du jeudi 15 au vendredi 16 février 2018, les quelque 2 000 fonctionnaires et bénévoles qui ont participé à la « nuit de la solidarité » ont recensé au moins 3 624 personnes SDF dans la capitale, selon la mairie de Paris.
Il est à rappeler ici que l'article L. 345-2-3 du code de l'action sociale et des familles dispose que « toute personne accueillie dans une structure d'hébergement d'urgence doit pouvoir y bénéficier d'un accompagnement personnalisé et y demeurer, dès lors qu'elle le souhaite, jusqu'à ce qu'une orientation lui soit proposée. Cette orientation est effectuée vers une structure d'hébergement stable ou de soins, ou vers un logement, adaptés à sa situation. »
Or la mairie de Paris estime qu'il manque au moins 3 000 places pérennes dans les accueils d'urgence et en appelle à conjuguer les efforts de l'État et de la ville.
La grande vague de froid qui s'annonce va rendre la situation de plus en plus dramatique.
Devant cette situation il faut prendre, dès maintenant, des mesures transitoires d'urgence en faveur des sans-abri, en particulier pour leur logement.
La capitale tout comme le reste du territoire national ont besoin d'une politique volontariste en matière d'exclusion munie de moyens bien plus conséquents que ceux actuellement consentis.
Il lui demande quelles mesures le Gouvernement compte prendre pour mettre celle-ci en place.

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Transmise au Ministère de la cohésion des territoires


Réponse du Ministère de la cohésion des territoires publiée le 09/08/2018

Depuis 2008, la France fait face à une forte tension sur le logement pour les personnes défavorisées et sur l'hébergement d'urgence, compte-tenu de la hausse de la précarité liée à la crise économique, du contexte migratoire mais aussi des difficultés pour permettre aux personnes hébergées d'accéder à un logement pérenne. Face à cette situation, l'État a apporté d'une part, une réponse de court terme, en augmentant le parc de places d'hébergement d'urgence qui accueille de manière inconditionnelle les publics en situation de détresse médicale, psychologique ou sociale, et engagé d'autre part, une réforme structurelle de moyen et long terme du dispositif d'hébergement dite du « Logement d'abord ». Tout d'abord, pour répondre à l'urgence et au court terme, l'État a ouvert et financé cet hiver jusqu'à 153 000 places d'hébergement d'urgence, à comparer aux 134 000 de la campagne précédente, dont 133 000 places ouvertes toute l'année et plus de 20 000 places hivernales et exceptionnelles « Grand froid ». Cette mobilisation représente un effort sans précédent de l'État. À titre d'illustration, le plan Grand froid a été activé à la date du 27 février dans 72 départements afin de permettre la plus grande mobilisation compte tenu de la baisse des températures. Pendant la période hivernale, les maraudes sont intensifiées en lien avec les associations et les collectivités. En outre, le ministre de la cohésion des territoires a mis en place un suivi et un pilotage resserré, au travers notamment de visio-conférences hebdomadaires avec les 13 préfectures de région métropolitaines et des remontées quotidiennes d'informations. Priorité du Gouvernement, l'accès au logement et à l'hébergement des plus démunis bénéficie d'un budget 2018 en hausse de 11 % par rapport au budget initial 2017. Ce budget était déjà marqué par 3 ouvertures de crédits supplémentaires en juillet, novembre et décembre 2017 pour un total de 276 M€ ouverts en complément des crédits initiaux 2017, pour un total d'environ 2 milliards d'euros. 89 M€ supplémentaires ont été ouverts en loi de finances rectificatives 2017 pour la fin de l'exercice. Enfin, le dispositif d'accueil des demandeurs d'asile a permis également de répondre aux besoins avec 90 000 places dédiées aux demandeurs d'asile et publics migrants. Ce parc sera augmenté avec 4 000 places supplémentaires en 2018 et 3 500 en 2019. Au-delà de cette réponse forte et rapide aux enjeux immédiats d'hébergement d'urgence, le Gouvernement a engagé des actions de moyen et long terme afin d'améliorer les conditions de logement pour les personnes défavorisées. Malgré l'action déterminée des acteurs et des efforts importants d'ouvertures de places ces dernières années, les dispositifs d'hébergement d'urgence restent en effet saturés. Ce parc d'hébergement peine à jouer son rôle de tremplin vers le logement et ne peut donc absorber la demande de plus en plus pressante à l'entrée. Dans l'idée de réformer ce système qui a laissé s'installer l'idée d'un accès au logement à l'issue d'un parcours en escalier, entre rue et centres d'hébergement, le Président de la République a annoncé le 11 septembre 2017 à Toulouse, le plan pour le logement d'abord (2018-2022). Ce plan ambitieux fixe une réforme structurelle de l'accès au logement pour les personnes sans-domicile. Le plan Logement d'abord marque la volonté du Gouvernement d'adopter une approche globale de la politique de lutte contre le sans-abrisme et de trouver des solutions concrètes, pragmatiques et efficaces pour améliorer l'action publique. L'approche logement d'abord signifie que les personnes sans domicile bénéficient d'un logement stable rapidement avec un accompagnement adapté à leurs besoins et ce avant toute autre chose, sans pour autant laisser de côté les différents accompagnements connexes que nécessitent certaines des personnes ayant une expérience de vie dans la rue ou dans des conditions extrêmement dégradées (accompagnement médical et en particulier psychiatrique, accompagnement vers l'emploi etc.). Cette approche permet, outre une prise en charge digne des personnes sans domicile, une prise en compte plus efficace et globalement moins coûteuse du sans-abrisme. Le plan Logement d'abord a pour objectif une baisse significative du nombre de sans-domicile sur les 5 ans. Il vise au développement de solutions pérennes de retour au logement, tout en maintenant un parc d'hébergement d'urgence pour répondre aux situations de détresse. Les objectifs sur les 5 ans sont les suivants : - ouverture de 40 000 places en intermédiation locative (gestion par des associations de logements du parc privé à des fins de sous-location à des ménages défavorisés) ; - ouverture de 10 000 places en pensions de famille (résidences sociales destinées à l'accueil de personnes dont la situation sociale ne permet généralement pas d'assumer une vie en logement autonome. Les résidents des pensions de famille ont un accès à des espaces de vie collective animés par des accompagnateurs) ; - porter l'objectif de production de 40 000 logements très sociaux par an dès 2018 (logement sociaux ayant pour cible les ménages les plus démunis se caractérisant par un très faible loyer) ; - mise en place du plan « Logement d'abord » dans 24 territoires de mise en œuvre accélérée dès 2018 ; - recentrage de l'hébergement d'urgence sur sa fonction de réponse immédiate et inconditionnelle aux situations de détresse ; - prévention des expulsions et des « sorties sèches » d'institution (aide sociale à l'enfance, prisons…), et mise en place d'un second plan national de prévention des expulsions. Cette réforme s'inscrit dans une dynamique innovante d'investissement social qui sort de la gestion en urgence maintes fois dénoncée pour ses effets négatifs sur les personnes et sur les finances publiques. La politique du logement d'abord s'inscrit dans une double temporalité : elle vise à permettre la réponse rapide aux situations de détresse et elle investit dans des solutions de logement ordinaire ou adapté, dignes et pérennes pour les personnes en difficulté. C'est la réforme structurelle du logement d'abord qui permettra de sortir progressivement de l'augmentation continue du nombre de places d'hébergement et de nuitées d'hôtel, et d'apporter une réponse digne aux personnes aujourd'hui sans logement stable.

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