Question de Mme GUILLOTIN Véronique (Meurthe-et-Moselle - RDSE) publiée le 22/03/2018

Mme Véronique Guillotin appelle l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur le cadre financier du sport sur ordonnance. Rendue possible par la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, la prescription sport est effective depuis le 1er mars 2017 pour les patients souffrant d'une affection de longue durée (ALD). L'activité physique adaptée (APA) peut ainsi être prescrite par les médecins, dans le cadre d'une consultation médicale. Sa réalisation, toutefois, reste à la charge des patients ; aucun cadre financier ne structure aujourd'hui le sport sur ordonnance au niveau national. Une quinzaine de villes s'est engagée à encourager la pratique sportive pour les patients en ALD, en mettant à disposition des équipements et du personnel dès lors qu'il y a prescription d'un médecin. Certaines associations, grâce à ces financements locaux et des partenariats privés, permettent également un accès gratuit à leurs infrastructures. Cependant, l'État demeure en marge de ces dispositifs. Compte tenu des bienfaits reconnus du sport et des enjeux en termes de santé publique, elle souhaite connaître les intentions du Gouvernement sur le financement de l'APA et, plus généralement, sur la mise en place d'une politique nationale de sport-santé.

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Réponse du Ministère de la culture publiée le 25/07/2018

Réponse apportée en séance publique le 24/07/2018

Mme Véronique Guillotin. Madame la ministre, la prescription du sport sur ordonnance est effective depuis le 1er mars 2017 pour les patients souffrant d'une affection de longue durée ; c'est une belle avancée. Mais si l'activité physique adaptée peut désormais être prescrite par le médecin traitant, l'État demeure en marge du financement.

Quarante-cinq villes se sont employées, au travers du réseau national des villes sport-santé sur ordonnance, à rendre ce dispositif accessible sur leur territoire. Elles mettent à la disposition des patients des équipements et du personnel. Certaines associations, grâce à des financements locaux et des partenariats privés, y contribuent également.

Pionnière dans le domaine, la ville de Strasbourg a engagé sur ses fonds propres 266 000 euros en 2016, sur un coût total de 372 000 euros consacrés à ce plan, sans compter la mise à disposition des équipements.

La région Grand Est a également décidé de se mobiliser en faveur du sport-santé. Le 12 juillet dernier, la ministre des sports, lors d'un déplacement en Meurthe-et-Moselle, a cosigné avec la région, le mouvement sportif et de nombreux partenaires un plan Activités physiques et sportives aux fins de santé. Elle en a salué l'exemplarité et a exprimé son souhait de voir émerger une véritable politique publique en la matière, une volonté que je partage bien sûr et que je défends tant les bénéfices de l'activité physique sur la santé sont réels.

L'Organisation mondiale de la santé, l'OMS, a même identifié l'inactivité physique comme le quatrième facteur de risque de mortalité à l'échelle mondiale et comme la première cause de mortalité évitable en Europe. La Haute Autorité de santé, la HAS, a défini l'activité physique comme une « thérapie non médicamenteuse », sans compter les nombreuses études du monde scientifique et médical qui prouvent les effets bénéfiques de l'activité physique et sportive sur de nombreuses pathologies chroniques.

Un député mosellan s'est intéressé à la question. Dans son rapport, il formule plusieurs propositions, dont celle d'un financement par la sécurité sociale, sous certaines conditions, une proposition que je partage. En effet, par son engagement, l'État enverrait un message clair aux Français, inciterait les médecins à s'approprier le dispositif, et les mutuelles à participer au financement.

À terme, le coût du sport sur ordonnance pourrait s'avérer bien moins élevé en raison de la réduction de la consommation médicamenteuse, de la baisse attendue du nombre d'arrêts maladie et des créations d'emplois induites.

Aussi, j'aimerais connaître, madame la ministre, les intentions du Gouvernement sur le financement de l'activité physique adaptée et, plus généralement, sur la mise en place d'une véritable politique nationale de sport-santé.

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la culture.

Mme Françoise Nyssen, ministre de la culture. Madame la sénatrice Véronique Guillotin, je vous prie de bien vouloir excuser Agnès Buzyn, qui m'a chargée de vous répondre.

Les bénéfices de l'activité physique en matière de réduction des complications et des risques de récidives des pathologies chroniques sont reconnus.

La prescription d'activité physique adaptée, l'APA, encourage l'orientation des patients souffrant d'affections de longue durée vers des structures adéquates. Le dispositif permet au médecin prescripteur d'être informé par les différents intervenants du déroulement de l'activité physique. Toutefois, les frais de pratique sportive, tels que la cotisation d'adhésion ou le coût de la licence, n'entrent pas dans le périmètre de prise en charge de la sécurité sociale, le sport ne constituant pas un acte de soin. Je vous confirme qu'à ce jour le Gouvernement n'envisage pas leur inscription parmi les actes remboursables, mais son implication reste totale au travers des actions menées en matière de sport-santé pour mobiliser l'ensemble des acteurs.

Le recours à l'activité physique s'inscrit dans la politique de santé que le Gouvernement conduit en matière de prévention des risques, et se traduit par des actions nécessairement coordonnées avec les initiatives engagées par les ministères chargés de la cohésion des territoires, des sports et de l'éducation nationale, en partenariat avec les collectivités territoriales notamment, afin de mobiliser les financements nécessaires.

Ainsi, sur le plan local, le sport sur ordonnance se combine avec les contrats locaux de santé et divers autres dispositifs relevant de la politique de la ville ou d'une autre politique publique. Diverses expérimentations coordonnées sont réalisées partout en France et bénéficient de subventions accordées par les services déconcentrés de l'État et les agences régionales de santé, les ARS, ainsi que par les collectivités territoriales. À ce titre, je citerai les expérimentations emblématiques du « sport sur ordonnance » à Strasbourg et d'« EfFORMip » à Toulouse.

Enfin, l'article 144 de la loi de 2016 de modernisation de notre système de santé, son décret d'application du 30 décembre 2016 ainsi que l'instruction de mars 2017 diffusant ces textes dans les agences régionales de santé et les services déconcentrés de l'État établissent un cadre juridique permettant la prescription de l'activité physique adaptée par le médecin traitant aux personnes atteintes d'affections de longue durée.

Ce dispositif national, qui s'est inspiré d'expérimentations locales innovantes, est en cours de déploiement.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour répondre à Mme la ministre.

Mme Véronique Guillotin. J'ai bien entendu dans la réponse de Mme la ministre qu'il n'était pour l'heure pas question que l'État participe au financement du sport-santé, ce que l'on peut regretter. Je ne parlais pas de la cotisation, éventuellement de la licence, mais de la consultation médicale qui permet de prescrire cette activité sur ordonnance. Avec une prescription, on touche aux soins et donc aux patients et non pas à la prévention. Il y a là deux volets : le sport-santé sur ordonnance s'inscrit vraiment dans un volet « santé », tandis que le sport adapté concerne plutôt le volet « prévention ».

Le sport sur ordonnance mériterait de faire l'objet d'une concertation avec la sécurité sociale, les partenaires et les mutuelles en vue de leur éventuelle participation financière, sous certaines conditions et pour ce qui concerne les pathologies pour lesquelles il est prouvé que l'activité sportive contribue à une réduction de la consommation médicamenteuse.

Une autre question est importante en la matière. Vous avez parlé de transversalité, madame la ministre : il est aujourd'hui essentiel de faire en sorte que l'ensemble des partenaires ne restent pas au milieu du gué. Depuis mars 2017, les médecins peuvent prescrire l'activité sportive, mais ils sont réticents à le faire, car la formation médicale ne les rassure pas complètement. Aujourd'hui, le monde sportif ne s'est pas totalement emparé de la question de la formation des effecteurs pour faire en sorte que ces derniers soient susceptibles de sécuriser les médecins prescripteurs ou, en tout cas, leur donnent confiance. Le plan sport-santé sur ordonnance mérite plus que ce simple décret. Mme la ministre des solidarités et de la santé s'étant engagée à soutenir un grand plan Sport santé, j'espère que cela ira mieux dans les années à venir et que les mentalités évolueront quant au financement.

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