Question de M. MARIE Didier (Seine-Maritime - SOCR) publiée le 15/03/2018

M. Didier Marie attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la lutte contre les déserts médicaux.
La Seine-Maritime est un département où la désertification médicale est endémique. Criquetot-l'Esneval, Cany-Barville, Eu, Caudebec-en Caux sont autant de territoires où les médecins se font de plus en plus rares et où la population est de plus en plus inquiète.
Ces secteurs viennent d'être identifiés par l'agence régionale de santé à partir d'un nouvel indicateur : l'accessibilité potentielle localisée. Toutefois, ce zonage élaboré au niveau national ne traduit pas toujours la réalité des territoires, à l'image de celui de Fécamp qui s'est vu déclassé en zone d'action complémentaire alors qu'il a perdu trois médecins et que cinq autres vont prochainement partir à la retraite.
En parallèle, les groupements hospitaliers de territoire visent à mutualiser l'offre hospitalière sur un territoire donné. Or on constate, le plus souvent, le déploiement d'une stratégie d'offre de soins très concentrée sur le plus grand établissement hospitalier, au détriment des plus petits.
L'État et les collectivités locales financent l'installation de médecins mais les résultats ne sont pas probants. Cela ne suffit pas à changer la donne.
Quant à la télémédecine, elle ne saurait être l'alpha et l'oméga de l'offre de soins dans les déserts médicaux.
Aussi voudrait-il savoir si le Gouvernement entend rendre public l'ensemble des financements locaux et nationaux destinés à l'installation des professionnels de santé, pour en mesurer l'impact et s'il envisage de recourir, en plus de ces mesures incitatives, à des mesures coercitives afin d'éviter à nos territoires de se retrouver dépourvus d'offre de soins et, en particulier, de médecins généralistes.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé publiée le 13/02/2019

Réponse apportée en séance publique le 12/02/2019

M. Didier Marie. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, ma question concerne les difficultés liées à l'existence de déserts médicaux dans le département qui est le mien, la Seine-Maritime.

La désertification médicale y est ancienne et connaît une progression exponentielle. Criquetot-l'Esneval, Cany-Barville, Eu, Caudebec-en-Caux sont autant de territoires où les médecins se font de plus en plus rares et où la population, souvent vieillissante, est de plus en plus inquiète.

Depuis mars 2018, ces secteurs sont désormais identifiés par l'agence régionale de santé via un nouvel indicateur : l'accessibilité potentielle localisée. Toutefois, ce zonage élaboré au niveau national ne traduit pas toujours la réalité des territoires, à l'image de celui de Fécamp, qui s'est vu déclassé en zone d'action complémentaire alors qu'il a perdu trois médecins et que cinq autres vont prochainement partir à la retraite.

Je souhaite attirer l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la question de la pertinence de ces zonages et sur la nécessité d'accompagner ces territoires pour y garantir une offre de soins de qualité. J'aimerais connaître les mesures que son ministère entendrait prendre à leur bénéfice.

En parallèle de ce nouveau zonage ont été créés les groupements hospitaliers de territoire, visant à mutualiser l'offre hospitalière. Or on constate trop souvent le déploiement d'une stratégie d'offre de soins très concentrée sur le plus grand établissement, au détriment des plus petits.

Pourriez-vous, madame la secrétaire d'État, nous fournir un premier bilan de l'action de ces groupements en Seine-Maritime et nous dire s'ils garantissent une offre de soins satisfaisante ?

Quant à la télémédecine, souvent évoquée, elle ne saurait être l'alpha et l'oméga de l'offre de soins dans les déserts médicaux. Pouvez-vous nous dire où en est son déploiement en Seine-Maritime ?

Il serait intéressant que le Gouvernement rende public l'ensemble des financements nationaux et locaux destinés à l'installation des professionnels de santé, afin de pouvoir en mesurer l'impact. Et j'aimerais savoir si vous envisageriez de recourir, en plus de ces mesures incitatives, à des mesures coercitives afin d'éviter à nos territoires de se retrouver dépourvus d'offre de soins, et, en particulier, de médecins généralistes.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur, le défi que nous avons à relever aujourd'hui est grand. En effet, le nombre de médecins généralistes ou spécialistes en accès direct exerçant en libéral est en baisse régulière depuis 2010 ; cette baisse est malheureusement susceptible de se poursuivre jusqu'en 2025.

Nous avons lancé, dès octobre 2017, le plan d'égal accès aux soins. Ce plan comporte un panel de solutions adaptables à chaque contexte local, car – nous en sommes tous convaincus – il n'y a pas une réponse unique aux difficultés démographiques.

La télémédecine fait bien sûr partie des leviers à mobiliser, mais ce n'est pas le seul.

Il faut aussi s'appuyer sur la réalisation de stages en cabinet, en maison ou en centre de santé au cours du cursus, ou encore sur le déploiement de l'exercice coordonné sous toutes ses formes, dont on sait qu'il représente un fort levier d'attractivité.

Dans ce cadre, un important travail méthodologique, largement concerté, a été mené pour permettre aux agences régionales de santé, les ARS, de mieux identifier les zones caractérisées par des difficultés d'accès aux soins, où sont mobilisées les aides à l'installation et au maintien des médecins.

Le fondement de ce travail est effectivement l'accessibilité potentielle localisée, l'APL, indicateur composite intégrant l'activité, l'âge des médecins généralistes exerçant sur le territoire ou encore le temps d'accès – afin de prendre en compte les spécificités locales, les ARS peuvent compléter par d'autres critères. Elles ont aussi la possibilité de réajuster régulièrement leur zonage ; un tel réajustement est d'ailleurs en cours en Normandie.

Le plan se déploie sur le terrain : le nombre d'étudiants ayant signé un contrat d'engagement de service public est en hausse de 13 % cette année; pour un total de plus de 2 800 bénéficiaires.

L'exercice coordonné sous toutes ses formes progresse aussi : le nombre de maisons de santé a augmenté de 18 % sur les neuf derniers mois, soit 1 209 structures ouvertes actuellement.

En Seine-Maritime, la dynamique est perceptible aussi, avec seize maisons de santé pluriprofessionnelles, ou MSP, ouvertes, et vingt-deux en projet.

Je comprends votre impatience, monsieur le sénateur, mais la contrainte à l'installation n'est pas la solution : introduire une coercition conduirait un grand nombre de médecins à retarder leur installation ou à s'orienter vers des solutions de contournement. Le risque serait ainsi d'aggraver encore davantage les problèmes d'accès aux soins.

Nous avons choisi de faire confiance aux acteurs.

La stratégie Ma santé 2022 annoncée par le Président de la République en septembre dernier nous dote de nouveaux leviers qui se déploieront progressivement en 2019 : la mise en place des communautés professionnelles territoriales de santé, la création de 4 000 postes d'assistants médicaux pour seconder et appuyer les médecins, le déploiement dans des territoires prioritaires de 400 médecins généralistes, en exercice partagé entre une structure hospitalière et une structure ambulatoire ou salariés d'un centre ou établissement de santé.

Pour réussir, nous aurons besoin que les élus soient à nos côtés ; en réunissant tous les acteurs, je suis convaincue que nous trouverons des solutions adaptées à chaque territoire.

M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour répondre à Mme la secrétaire d'État.

M. Didier Marie. Merci, madame la secrétaire d'État, de vos réponses.

Je souhaite que votre ministère accorde une attention toute particulière à la Seine-Maritime, qui compte 1,3 million d'habitants et où le nombre de médecins ne cesse de baisser, tant dans les territoires ruraux que dans les quartiers urbains.

Les élus sont mobilisés, comme en atteste la création d'un nombre significatif de maisons de santé. Nous espérons que les efforts conjoints du Gouvernement et des élus permettront d'améliorer la situation.

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