Question de Mme LHERBIER Brigitte (Nord - Les Républicains) publiée le 01/03/2018

Mme Brigitte Lherbier attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur l'impossibilité pour un policier municipal de consulter les fichiers adéquats dans l'exercice de ses fonctions.
Ces dernières années, les missions dévolues par les municipalités à leur police municipale ont eu tendance à s'étoffer en raison des événements survenus en France. Les policiers municipaux ont incontestablement gagné en professionnalisme et assurent une sécurité de proximité indispensable et complémentaire des missions de la police nationale.
Pourtant, ils ont les plus grandes difficultés à assurer ces missions dans des conditions décentes car ils ne disposent pas des mêmes prérogatives que celles des policiers nationaux. Par exemple, lors d'un contrôle de vitesse, ils n'ont pas accès au fichier national des permis de conduire (SNPC) pour s'assurer de la détention effective et de la validité du titre présenté, ni au fichier des véhicules volés (FVV) avant de procéder à la mise en fourrière d'un véhicule, ni au système d'immatriculation des véhicules (SIV) pour notifier l'immobilisation ou l'annulation de l'immobilisation d'un véhicule, ni au fichier des personnes recherchées qui permet également de garantir des conditions d'intervention plus sûres lors d'éventuels contrôles.
Ils sont donc dans l'obligation de faire appel à leurs collègues de la police nationale et de la gendarmerie pour pouvoir faire toutes les vérifications d'usage qu'impose un banal contrôle de vitesse. Il s'agit incontestablement d'une grande perte de temps pour la police nationale comme pour la police municipale, qui ne dispose pas de tous les moyens indispensables au bon accomplissement de ses missions.
C'est pourquoi elle lui demande si le Gouvernement envisage de faire évoluer la législation afin de permettre aux policiers municipaux d'avoir accès à l'ensemble des fichiers nécessaires à l'accomplissement de leurs missions.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 23/05/2018

Réponse apportée en séance publique le 22/05/2018

Mme Brigitte Lherbier. Je m'adresse à vous, madame la garde des sceaux, mais cette question était effectivement destinée à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, et à son ministre, Mme Gourault.

Au cours des dernières années, les missions dévolues par les municipalités à leur police municipale ont eu tendance à s'étoffer, en raison des événements survenus en France et de la menace terroriste qui pèse sur notre pays. Les policiers municipaux ont incontestablement gagné en professionnalisme et assurent une sécurité de proximité indispensable et complémentaire à l'intervention de la police nationale.

Pourtant, ils ont de grandes difficultés à assurer ces missions dans des conditions décentes, car les moyens dont ils disposent sont limités.

Par exemple, lors d'un banal contrôle de vitesse, ils n'ont pas accès au fichier national des permis de conduire – le FNPC – pour s'assurer de la détention effective et de la validité du titre présenté, ni au fichier des véhicules volés – le FVV – avant de procéder à la mise en fourrière d'un véhicule, ni au système d'immatriculation des véhicules – le SIV – pour notifier l'immobilisation ou l'annulation de l'immobilisation d'un véhicule, ni au fichier des personnes recherchées – le FPR –, qui permettrait également de garantir des conditions d'intervention plus sûres, notamment dans cette période de menace terroriste.

Les policiers municipaux sont donc dans l'obligation de faire appel à leurs collègues de la police nationale ou de la gendarmerie pour pouvoir effectuer toutes les vérifications d'usage qui s'imposent, même pour un banal contrôle de vitesse.

Il s'agit incontestablement d'une perte de temps et d'efficacité pour la police nationale, comme pour la police municipale, qui ne dispose pas de tous les moyens indispensables au bon accomplissement de ses missions.

C'est pourquoi de nombreux élus m'ont demandé d'intervenir ce matin. Ils souhaiteraient que l'État puisse revoir sa position concernant l'accès des policiers municipaux à l'ensemble des fichiers qu'ils doivent pouvoir consulter dans le cadre de leurs missions.

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Comme vous le savez, madame la sénatrice Lherbier, les fichiers comportant des données à caractère personnel font l'objet d'un encadrement très strict. Bien évidemment, la loi du 6 janvier 1978 doit être respectée, sous le contrôle de la Commission nationale de l'informatique et des libertés – la CNIL –, mais comme nous l'avons vu ensemble dans cet hémicycle, le droit relatif à ces fichiers s'inscrit également dans un cadre constitutionnel et dans un cadre européen, avec l'entrée en vigueur de nouvelles directives le 25 mai prochain.

Une personne ne peut donc légalement consulter un fichier que si cette consultation est nécessaire et proportionnée à raison de sa fonction.

Dès lors que les policiers municipaux, agents de police judiciaire adjoints, ne disposent pas de la possibilité de réaliser des actes d'enquête, il n'y a pas nécessité de leur ouvrir un accès direct aux fichiers sur lesquels ces actes pourraient notamment se fonder.

Ainsi, au regard des missions dévolues aux policiers municipaux, il n'a pas été jugé nécessaire de leur permettre un accès direct au fichier des personnes recherchées, le FPR. Je tiens à vous rappeler qu'en application des dispositions en vigueur les policiers municipaux peuvent déjà être rendus destinataires, sous certaines conditions, d'informations issues de ce fichier, notamment afin de parer à un danger pour la population.

Pour des raisons similaires, un accès direct des policiers municipaux au fichier des objets et des véhicules signalés, le FOVeS, qui a remplacé le fichier des véhicules volés, n'est pas prévu.

Dans la pratique, les agents de police municipale peuvent avoir accès à un extrait actualisé du fichier en saisissant la plaque d'immatriculation sur leur terminal personnel, afin de savoir si un véhicule est volé ou utilise des plaques aux numéros usurpés avant mise en fourrière.

En outre, le Gouvernement ne peut que vous rejoindre sur la nécessité d'ouvrir aux agents de police municipaux un accès direct au système d'immatriculation des véhicules et au système national des permis de conduire, compte tenu de leurs prérogatives en matière de constatation des infractions au code de la route.

Cette évolution est déjà engagée, puisqu'un projet de décret en ce sens a été préparé par mes services. Ayant fait l'objet d'avis favorables du Conseil national d'évaluation des normes et de la CNIL, il est actuellement en phase d'examen devant le Conseil d'État.

Enfin, je suis sûre que la mission parlementaire en cours sur le continuum de sécurité, portée par les députés Jean-Michel Fauvergue et Alice Thourot, nous apportera un éclairage intéressant sur l'adaptation des conditions d'accès des policiers municipaux à ces fichiers.

M. Loïc Hervé. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Lherbier.

Mme Brigitte Lherbier. Merci de cette réponse, madame la ministre, et de cette perspective d'amélioration des possibilités d'action de la police municipale. Pendant des années, j'ai présidé chaque vendredi matin une cellule de veille et de partage d'informations à Tourcoing et très souvent, de tels dysfonctionnements remontaient dans ce cadre : perte de temps, obligation d'avoir recours à la police nationale pour des petits renseignements. Vous nous avez rassurés, vous allez prendre en main cette évolution et tout le monde, je pense, aura à y gagner.

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