Question de M. DANTEC Ronan (Loire-Atlantique - RDSE-R) publiée le 09/03/2018

Question posée en séance publique le 08/03/2018

M. Ronan Dantec. Ma question s'adresse à M. Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. (Nouvelles exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Une commission indépendante composée d'experts, mandatée par le Premier ministre et présidée par l'économiste Katheline Schubert, a remis, en septembre dernier, au Gouvernement un rapport l'alertant sur les impacts environnementaux, climatiques et sanitaires de l'Accord économique et commercial global entre l'Union européenne et le Canada, le fameux CETA.

Confirmant en partie les craintes qui s'étaient exprimées, les rapporteurs ont fait preuve d'inventivité en proposant la création d'un « veto climatique » face aux impacts de certaines dispositions envisagées quand les objectifs en matière de respect des enjeux liés au développement durable et des accords climatiques ne sont pas respectés et sont « loin d'être atteints ».

À la suite de ces recommandations, vous avez, monsieur le ministre d'État, intégré le principe du veto climatique dans le plan d'action du Gouvernement sur le CETA, sans toutefois en donner les conditions juridiques d'opérationnalité, ce qui a entraîné le scepticisme des ONG environnementales.

Aujourd'hui, les discussions sur les échanges commerciaux avec l'Amérique latine sont en cours dans le cadre du Mercosur. De nombreuses questions de compatibilité des modes de production et de consommation entre les parties prenantes sont là encore au cœur des débats, notamment concernant l'agriculture, et plus particulièrement l'élevage bovin. Le groupe radical du Sénat a d'ailleurs déposé une proposition de résolution, portée par le président Requier, sur ce volet.

Nous pouvons aussi aisément ajouter aux impacts sur l'économie de la viande bovine en France et en Europe les conséquences en termes climatiques, puisque cette production est, nous le savons, fortement émettrice de gaz à effet de serre et responsable de déforestation.

Monsieur le ministre d'État, nous partageons, me semble-t-il, la conviction que les négociations commerciales sont un des principaux leviers de mise en œuvre de l'accord de Paris sur le climat. Je souhaite donc vous poser une double question.

Premièrement, avez-vous défini les critères d'instauration du veto climatique, dont l'utilisation a été recommandée dans le cadre de ce rapport ? Deuxièmement, pourrait-on envisager que ce veto s'applique dans le cadre du Mercosur…


Mme la présidente. Merci !


M. Ronan Dantec. … si celui-ci entraîne, comme le CETA, des risques de fragilisation des objectifs de lutte contre le dérèglement climatique ? (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

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Réponse du Ministère de la transition écologique et solidaire publiée le 09/03/2018

Réponse apportée en séance publique le 08/03/2018

M. Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la présidente, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Ronan Dantec, je rêve d'un temps que j'espère proche où l'on parlera non plus d'accord ou de traité de libre-échange, mais d'accord ou de traité de juste échange.

Vous m'interrogez, monsieur le sénateur, à juste titre – vous savez que je partage votre préoccupation – sur la mise en œuvre du veto climatique dans le cadre du CETA et sur la prise en compte environnementale – ce point fait partie de la même réflexion – dans les accords commerciaux, notamment dans le cadre du Mercosur.

Pour ma part, je me fie aux propos du Président de la République et je fais mienne la ligne qu'il a définie : en matière de politique commerciale, on ne bradera ni nos intérêts ni nos valeurs et évidemment encore moins la planète.

Concernant le veto climatique dans le cadre du CETA, la Commission européenne – où j'étais encore récemment – s'est déclarée prête – il faut prendre en compte cette donnée avec prudence – à travailler à sa mise en place ; c'est une première avancée. Concrètement, cela prendrait la forme d'une nouvelle déclaration juridique interprétative, qui devrait être adossée à la partie consacrée aux investissements du CETA, mais il nous faut encore obtenir l'accord du Conseil avant de pouvoir finaliser le dispositif avec le Canada. Je ne vous le cache pas, nous devrons faire durant le printemps un véritable travail de conviction à la fois auprès de nos partenaires européens et évidemment de nos amis canadiens.

S'agissant du Mercosur, vous avez probablement entendu le Président de la République déclarer très clairement devant les jeunes agriculteurs le 22 février dernier : il y a des lignes rouges en matière d'indications géographiques, sanitaire et phytosanitaire, mais aussi de respect de l'accord de Paris. C'est bien parce que ces lignes rouges ont été affirmées que l'accord n'a pas encore été conclu. Le Président de la République avait alors aussi rappelé que l'accord entre l'Union européenne et le Mercosur n'entrerait pas en vigueur tant que l'Union n'aura pas renforcé ses normes sanitaires et environnementales et que l'on n'aura pas obtenu de garanties quant au respect de ces normes. La France s'opposera à la mise en œuvre du Mercosur si ce travail n'est pas fait en amont. L'accord n'entrera donc pas en vigueur si nous n'avons pas satisfaction sur ce point. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et sur plusieurs travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

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