Question de Mme MÉLOT Colette (Seine-et-Marne - Les Indépendants) publiée le 09/03/2018

Question posée en séance publique le 08/03/2018

Mme Colette Mélot. Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, la libération de la parole des femmes que nous vivons actuellement et les nouvelles mesures que vous allez mettre en place pour faire progresser l'égalité entre les femmes et les hommes donnent à cette journée du 8 mars un retentissement tout particulier dont nous ne pouvons que nous féliciter.

Mais il est un phénomène qui reste peu connu, mal combattu et particulièrement choquant, je veux parler de la prostitution des adolescentes.

Mon intervention repose sur un constat inquiétant, réalisé récemment en Seine-et-Marne : la recrudescence de cas signalés par les forces de police, dont j'imagine qu'il s'agit non pas de cas isolés mais d'une réalité nationale.

Des milliers d'adolescentes se prostituent en France dès le collège selon l'association Agir contre la prostitution des enfants, l'ACPE. Les profils sont multiples : la réponse à un besoin vital de se nourrir, de payer ses études, le fait de jeunes qui s'y adonnent « parce que ça se fait ». Ce sont principalement des jeunes filles de treize à dix-sept ans, fragiles et souvent déscolarisées.

Naïves car très jeunes, elles ne se considèrent pas forcément comme des victimes : elles ne voient pas le mal de ces actes sexuels tarifés. Or ce sont des victimes manipulées et exploitées, et les répercussions psychologiques dans leur vie future seront dramatiques.

Ne nous y trompons pas, c'est bien de protection des mineures et de dignité humaine qu'il s'agit.

Il n'est pas acceptable que, dans notre pays, des jeunes n'aient pas été mieux protégées, mieux orientées, mieux identifiées.

Certes, le législateur a fortement investi le domaine de la lutte contre la prostitution des mineurs en instaurant un véritable arsenal répressif, mais la répression ne suffit pas.

Aussi, madame la secrétaire d'État, je vous demande de lancer une étude d'envergure pour connaître plus précisément l'ampleur du phénomène, préalable indispensable à la mise en place de mesures de sensibilisation, de prévention, de formation tant des travailleurs sociaux,…


Mme la présidente. Veuillez conclure, chère collègue.


Mme Colette Mélot. … que des enseignants et des policiers, sans oublier la création de lieux d'accueil spécifiques et d'accompagnement, autant de mesures d'une urgence absolue. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires.)

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du Premier ministre, chargé de l'égalité entre les femmes et les hommes publiée le 09/03/2018

Réponse apportée en séance publique le 08/03/2018

Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes. Madame la sénatrice, nous avons connaissance du problème que vous soulevez.

La lutte contre la traite des êtres humains en général, et contre la prostitution des mineurs en particulier, fait pleinement partie de l'action que je mène avec la MIPROF, dont le nom développé est « mission interministérielle pour la protection des femmes victimes de violences et de lutte contre la traite des êtres humains ». Je me suis entretenue il y a quelques jours avec sa secrétaire générale, Élisabeth Moiron-Braud, avec qui je suis pleinement mobilisée pour mettre fin à ce système de prostitution des mineures.

Je crois qu'il y a au moins deux sujets : premièrement, l'augmentation du phénomène de la traite des jeunes filles dans certains quartiers, sujet qui est dans notre viseur dans le cadre du deuxième plan national de lutte contre la traite ; deuxièmement, le proxénétisme en ligne, sujet sur lequel je travaille en étroite collaboration avec le secrétaire d'État chargé du numérique, Mounir Mahjoubi.

Ce matin, lors de notre comité interministériel, cette question a été abordée sous l'impulsion de la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, Frédérique Vidal. Nous sommes donc pleinement mobilisés à l'échelon interministériel.

Par ailleurs, je rappelle que toute personne victime d'exploitation sexuelle peut bénéficier du parcours de sortie de la prostitution et d'insertion sociale et professionnelle. Quelque 2,4 millions d'euros sont mobilisés pour six cents personnes visées en 2018, contre seulement 25 parcours sur les 1 000 prévus en 2017. L'action du Gouvernement à cet égard a donc été considérablement renforcée.

La loi prévoit aussi la remise au Parlement d'un rapport sur sa mise en œuvre après deux ans d'application. Nous en profiterons donc pour nous assurer de l'effectivité et de l'efficacité de ces dispositifs légaux.

Enfin, je voudrais ajouter que ces sujets, et particulièrement celui de la prostitution des mineurs que vous évoquez, s'inscrivent pleinement dans le plan de protection de l'enfance qui sera présenté dans le courant de 2019 par ma collègue ministre des solidarités et de la santé.

Vous le voyez donc, tout le Gouvernement est mobilisé sur cette question cruciale. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

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