Question de M. DECOOL Jean-Pierre (Nord - Les Indépendants-A) publiée le 11/01/2018

M. Jean-Pierre Decool attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice à propos des interprètes affectés auprès des juridictions. D'après l'article 4 de la loi n° 2013-711 du 5 août 2013 portant diverses dispositions d'adaptation dans le domaine de la justice en application du droit de l'Union européenne et des engagements internationaux de la France, il est désormais prévu que : « Si la personne suspectée ou poursuivie ne comprend pas la langue française, elle a droit, dans une langue qu'elle comprend et jusqu'au terme de la procédure, à l'assistance d'un interprète, y compris pour les entretiens avec son avocat ayant un lien direct avec tout interrogatoire ou toute audience, et, sauf renonciation expresse et éclairée de sa part, à la traduction des pièces essentielles à l'exercice de sa défense et à la garantie du caractère équitable du procès qui doivent, à ce titre, lui être remises ou notifiées ».
Ces dispositions résultent de la transposition de la directive 2010/64/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2010 relative au droit à l'interprétation et à la traduction dans le cadre des procédures pénales . En décembre 2017, au tribunal de grande instance de Lille, un procès concernant deux Lituaniens suspectés de trafic international de voitures volées et risquant au moins cinq ans de prison a été annulé, faute de traducteurs dans cette langue. « Le tribunal n'a pas de solution » a déclaré dans la presse, le président du tribunal. Les deux prévenus seront donc convoqués pour une nouvelle audience, à leur adresse en Lituanie.
Face à ce type de situation, il lui demande s'il entend mettre en place des mesures pour éliminer ces hypothèses d'impunité quasiment institutionnelle.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 18/10/2018

Le ministère de la justice est très attentif à la thématique des effectifs d'interprètes travaillant auprès des juridictions.  S'agissant plus particulièrement du cas d'espèce évoqué, les deux prévenus d'origine lituanienne ont comparu le 18 décembre 2017 devant le tribunal correctionnel de Lille pour des faits de vols en réunion et de participation à une association de malfaiteurs. Faute d'interprète disponible, le tribunal a constaté la circonstance insurmontable liée à l'absence d'interprète en langue lituanienne pour assister les prévenus et a rejeté la demande de placement en détention, estimant qu'il n'était pas en mesure de respecter les dispositions de l'alinéa 1er de l'article 397-1 du code de procédure pénale qui lui imposaient de recueillir à la fois les observations des prévenus et celles de leurs conseils pour ordonner un éventuel renvoi de l'affaire. Le parquet de Lille a interjeté appel de cette décision le 27 décembre 2017. L'affaire est pendante devant la cour d'appel de Douai. En tout état de cause, les principes constitutionnels de séparation des pouvoirs et d'indépendance de l'autorité judiciaire interdisent à la garde des sceaux, ministre de la justice, d'interférer dans les procédures judiciaires. S'agissant de l'interprétariat judiciaire, la Chancellerie demeure attentive à ce que chaque cour d'appel puisse veiller à inscrire sur ses listes d'experts un nombre suffisant d'interprètes, dans différentes langues. Par ailleurs, le ministère de la Justice mène actuellement une expérimentation de recrutement interne de quarante-cinq interprètes au sein de seize cours d'appel, sélectionnés en fonction du besoin existant, dans les langues les plus usitées. La cour d'appel de Douai en est d'ailleurs bénéficiaire, à hauteur de cinq emplois. Enfin, le ministère de la justice travaille actuellement à la création d'une base de données nationale d'experts, comprenant notamment les interprètes-traducteurs, afin de faciliter les recherches d'experts par les juridictions.

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