Question de Mme DUMAS Catherine (Paris - Les Républicains) publiée le 24/01/2018

Question posée en séance publique le 23/01/2018

Mme Catherine Dumas. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, c'est par voie de presse que les élus ont appris, ce week-end, l'abandon de la candidature de la France à l'Exposition universelle de 2025.

Cette décision unilatérale, précipitée et prise sans concertation préalable avec les promoteurs du projet est une mauvaise nouvelle pour la France et pour la région capitale, dont je suis élue.

Depuis le lancement officiel de l'association Expo France 2025, en 2013, lors d'une conférence au Grand Palais, à Paris, les soutiens politiques, les soutiens citoyens de tous bords sont venus renforcer cette formidable aventure collective.

Cette décision est regrettable et préjudiciable à la France, à plusieurs titres : un très grand nombre d'acteurs économiques étaient parties prenantes à ce projet, depuis la modeste PME jusqu'aux plus grands noms des réussites économiques de notre pays, et en permettaient le financement.

Organiser l'Exposition universelle de 2025 aurait permis de mettre en valeur les savoir-faire et la capacité d'innovation de notre pays. En un mot, monsieur le Premier ministre, cela aurait contribué à son rayonnement.

Enfin, doit-on comprendre que cette renonciation a pour corollaire l'abandon du projet de la ligne 18 du Grand Paris Express (Marques d'approbation et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.),…


Mme Marie-Noëlle Lienemann. C'est évident !


Mme Catherine Dumas. … qui doit relier en 2024 Orly à Versailles en passant par le plateau de Saclay, vitrine scientifique de notre pays ? Nous attendons votre réponse, car nous sommes inquiets ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Laurent Lafon applaudit également.)

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement publiée le 24/01/2018

Réponse apportée en séance publique le 23/01/2018

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Madame la sénatrice, ce projet d'exposition universelle est ancien. Il a été soutenu par des équipes qui y ont mis beaucoup de cœur, beaucoup d'énergie, beaucoup d'enthousiasme. Je ne méconnais ni la déception qui peut être la leur ni le travail qui a été réalisé.

Parce que l'échéance était fixée à 2025, parce que, au-delà de celle de ses promoteurs, ce projet engageait la parole de la France, nous nous y sommes intéressés très tôt, dès que ce gouvernement a été formé. Nous avons dit dès le début que, si le projet nous paraissait soutenable, si toutes les garanties étaient apportées quant au respect des lignes principales qui avaient été fixées – en particulier, il ne serait pas fait appel à des subventions publiques –, nous le soutiendrions.

Le 28 septembre dernier, nous avons franchi une étape supplémentaire avec le dépôt du dossier de candidature proprement dit. À ce moment-là de la procédure, j'ai dit très clairement, très précisément, après m'être rapproché d'un certain nombre d'acteurs élus locaux, que l'État se réservait l'entière possibilité de ne pas donner suite à ce projet si des garanties solides n'étaient pas apportées que ni l'État ni les collectivités territoriales n'auraient à participer à son financement.

Le 18 janvier dernier, les deux personnalités chargées de l'analyse et de l'accompagnement du projet m'ont remis leur rapport. Y était jointe une note de la direction générale du Trésor…

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Évidemment !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. … présentant une analyse approfondie du modèle économique transmis à la fin de décembre dernier par l'association Expo France 2025. L'ensemble de ces documents est, bien entendu, à votre disposition.

Cette note indiquait que le modèle économique du projet comportait plusieurs faiblesses structurelles. En particulier, l'équilibre économique reposait, au moins à hauteur d'environ 300 millions d'euros, sur l'hypothèse d'une cession gratuite du foncier par l'établissement public d'aménagement Paris-Saclay. Or, une cession gratuite de foncier par un établissement public, c'est une subvention publique… En outre, les chiffres de fréquentation retenus ne permettaient pas d'atteindre le montant de recettes prévu. Enfin, l'association souhaitait que l'ensemble des partenaires privés garantissent le projet, mais elle avait du mal – c'est le moins que l'on puisse dire ! – à obtenir de leur part cet engagement, sauf à ce que l'État lui-même apporte sa garantie.

Autrement dit, alors que nous devions définitivement engager la parole de notre pays, il nous est apparu que ce projet, si beau soit-il, n'était pas suffisamment solide. J'en ai tiré les conséquences. Si la situation budgétaire nous permettait de dire « on verra bien », il en serait peut-être allé autrement, mais tel n'est pas le cas. Depuis très longtemps, on a tendance, dans notre pays, à renvoyer à plus tard le traitement des difficultés. À mes yeux, ce n'est pas raisonnable, et c'est pourquoi j'ai pris la décision que vous regrettez. N'y voyez aucune autre raison que celle que je viens d'évoquer.

Vous avez posé la question d'un éventuel lien entre l'abandon de cette candidature et la réalisation des travaux prévus dans le cadre du Grand Paris Express, ce projet monumental et remarquable définissant de nouveaux modes de transports en commun dans toute la région d'Île-de-France. J'observe que, en la matière, les difficultés techniques sont majeures. La Cour des comptes pointe une dérive budgétaire considérable depuis la conception de ce projet. Nous ne pouvons pas faire comme si cela n'était pas grave, nous dire que l'on verra bien plus tard. Nous devons donc tous prendre en compte cette dimension budgétaire, pour faire en sorte que ce projet puisse être mené à son terme.

Je le dis très clairement, madame la sénatrice : mon objectif, c'est que le Grand Paris Express aboutisse, car c'est un bon projet. Mais, aujourd'hui, sa réalisation repose sur des bases fragiles. Vous connaissez comme moi les difficultés : les travaux du Grand Paris Express viennent croiser les travaux sur les infrastructures existantes, ce qui cause parfois des accidents perturbant le fonctionnement des réseaux du quotidien.

Nous devons donc examiner ensemble – c'est ce à quoi je me suis engag頖 dans quelles conditions nous pouvons faire réussir ce projet. Il s'agit là d'une discussion difficile, techniquement et budgétairement, mais j'y suis ouvert, et nous trouverons les solutions ! (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Dumas, pour la réplique.

Mme Catherine Dumas. Merci, monsieur le Premier ministre.

Concernant l'abandon de la candidature de la France à l'organisation de l'Exposition universelle 2025, je rappellerai simplement que le Président de la République lui-même avait dit que la France devait apporter sa contribution à une nouvelle ambition universelle. Tel ne sera pas le cas : c'est donc un mauvais message.

Pour ce qui concerne le Grand Paris Express, j'ai bien entendu votre réponse. Les élus franciliens et, plus largement, les élus de toute la France souhaitent que ce projet aboutisse dès 2024, car nous en avons vraiment besoin ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

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