Question de Mme JOURDA Gisèle (Aude - SOCR) publiée le 18/01/2018

Mme Gisèle Jourda interroge Mme la ministre, auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur sur les conséquences de la perte de la compétence eau-assainissement pour des communes et des communautés de communes de l'Aude, telle qu'elle résulte de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République dite loi NOTRe.

En effet, les articles 64 et 66 de cette loi prévoient que, à compter du 1er janvier 2020, l'eau et l'assainissement gérés en régie municipale seront retirés de la compétence communale et confiés à l'intercommunalité.

La commune perdra alors la maîtrise de ce bien naturel qu'est l'eau de source qui naît sur son territoire, alimente sa population et participe fortement au développement de l'économie locale. L'application de la loi NOTRe se heurte ainsi aux pratiques et coutumes locales. C'est ainsi que les communes de Saint Just et le Bézu perdront cette compétence, au profit de la communauté de communes des Pyrénées Audoises.

Symétriquement, l'intercommunalité ne dispose pas toujours de personnel qualifié et ne peut se permettre des dépenses nouvelles dans un contexte de dépenses publiques contraint. Elle risque donc de mettre en fermage ce bien, et le coût plus important se répercutera sur le budget des collectivités et sur celui des usagers avec une hausse du prix de l'eau.

C'est le cas de la communauté de communes de la Montagne Noire qui se trouverait fragilisée financièrement par l'acquisition de cette compétence et ne pourrait l'exercer dans des conditions cohérentes.

Elle lui demande par conséquent si la loi NOTRe peut être aménagée afin de permettre aux élus, et notamment aux élus ruraux, de décider du transfert de la compétence eau-assainissement à l'échelle des communautés de communes au lieu d'y être contraints.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministre de l'économie et des finances publiée le 14/02/2018

Réponse apportée en séance publique le 13/02/2018

Mme Gisèle Jourda. Madame la secrétaire d'État, ma question porte sur les conséquences de la perte de la compétence eau-assainissement pour des communes et des communautés de communes de l'Aude et de son transfert aux intercommunalités.

Application des articles 64 et 66 de la loi NOTRe, ce sujet a fait l'objet d'une proposition de loi de nos collègues Les Républicains, adoptée unanimement par le Sénat le 23 février 2017, voilà presque un an. Renvoyée en commission par nos homologues députés, elle y a connu, disons-le, et de façon positive, une sorte de clonage puisque c'est désormais une proposition de loi de députés La République En Marche, à l'intitulé identique et au contenu quasi similaire, qui a été adoptée par l'Assemblée nationale le 30 janvier dernier.

Examinons, madame la secrétaire d'État, la problématique et les enjeux.

Par la loi NOTRe, la commune perdra obligatoirement, le 1er janvier 2020, la maîtrise de ce bien naturel qu'est l'eau de source qui naît sur son territoire, alimente la population et participe fortement au développement de l'économie locale.

Une telle application de la loi se heurte aux pratiques et coutumes locales. C'est ainsi que la commune de Saint-Just-et-le-Bézu, toute petite commune de l'Aude, perdra cette compétence au profit de la communauté de communes des Pyrénées audoises, tout comme la commune de Gincla, également concernée.

Symétriquement, l'intercommunalité ne dispose pas toujours du personnel qualifié et ne peut se permettre des dépenses nouvelles, dans un contexte de dépenses publiques contraint. Elle risque donc de mettre en fermage ce bien et le coût, plus important, se répercutera sur le budget des collectivités et sur celui des usagers, avec une hausse du prix de l'eau très importante pour certaines petites communes. C'est le cas de la communauté de communes de la Montagne noire, qui se trouverait fragilisée financièrement par l'acquisition de cette compétence et ne pourrait l'exercer dans des conditions cohérentes.

Madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, les deux propositions de loi que je viens de vous citer démontrent bien la volonté des parlementaires à trouver un aménagement. Elles donnent en effet la possibilité aux communes de s'opposer au transfert des compétences eau et assainissement avant le 1er juillet 2019, de sorte que ces compétences puissent demeurer de leur ressort.

Le Gouvernement compte-t-il, madame la secrétaire d'État, inscrire très rapidement ce texte à l'ordre du jour de la Haute Assemblée ou alors va-t-il faire en sorte que les dispositions portées par ces deux propositions de loi successives disparaissent dans les affres de la navette parlementaire ? Les élus, surtout les élus ruraux, attendent un engagement fort de sa part. (Mme Patricia Morhet-Richaud ainsi que MM. Daniel Gremillet et Olivier Cigolotti applaudissent.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.

Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances. Madame la sénatrice Gisèle Jourda, je vous prie de bien vouloir excuser Mme Jacqueline Gourault, qui n'a pu être présente ce matin.

Vous l'avez dit, la loi NOTRe attribue à titre obligatoire aux communautés de communes et aux communautés d'agglomération les compétences « eau » et « assainissement ».

Le législateur a souhaité accorder aux collectivités et établissements publics concernés un délai raisonnable, leur permettant d'organiser au mieux l'exercice de ces nouvelles compétences. Ainsi, pour les communautés de communes et les communautés d'agglomération, les compétences « eau » et « assainissement » demeurent optionnelles jusqu'au 1er janvier 2020.

Toutefois, le Sénat a adopté, le 23 février 2017, comme vous l'avez rappelé, une proposition de loi pour le maintien des compétences « eau » et « assainissement » dans les compétences optionnelles des communautés de communes et des communautés d'agglomération. Le Gouvernement est à l'écoute de cette préoccupation. Le Premier ministre a confié à Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur, le soin de conduire un travail de concertation approfondi pour identifier les difficultés liées à la mise en œuvre du transfert obligatoire de ces compétences.

De ce travail a émergé un accord, traduit dans la proposition de loi déposée le 21 décembre 2017 et adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale le 31 janvier 2018.

Ce texte donne tout d'abord la possibilité aux communes de s'opposer au transfert des compétences « eau » et « assainissement » avant le 1er juillet 2019, si un certain nombre d'entre elles s'expriment en ce sens, de sorte que ces compétences puissent demeurer de leur ressort.

Cette possibilité est ouverte aux communes membres de communautés de communes qui n'exercent pas déjà l'une ou l'autre de ces deux compétences, à titre optionnel ou facultatif. S'il en est fait usage, le transfert obligatoire des compétences « eau » et « assainissement » à la communauté de communes concernée est alors reporté au 1er janvier 2026, sans que les communes puissent de nouveau s'y opposer. En outre, si, après le 1er janvier 2020, une communauté de communes n'exerce pas les compétences relatives à l'eau et à l'assainissement, l'organe délibérant de la communauté de communes peut, à tout moment, se prononcer sur l'exercice de ces compétences par la communauté, mais les communes membres garderont la possibilité de s'y opposer en faisant jouer la minorité de blocage.

Vous formulez le vœu, madame la sénatrice, que ce texte soit rapidement présenté à la Haute Assemblée. Le Gouvernement aura à cœur d'aller en ce sens puisque la concertation visant à dégager une bonne solution a été menée avec une grande efficacité.

M. le président. La parole est à Mme Gisèle Jourda.

Mme Gisèle Jourda. Merci, madame la secrétaire d'État. Nous savons parfaitement dans cet hémicycle que Mme Gourault est très sensible à cette problématique, mais nous serons extrêmement vigilants sur le dispositif que vous nous avez présenté, car il suscite des interrogations. Nous en discuterons lors de l'examen du texte.

Nous aurons à cœur de défendre le texte tel qu'il résultait des travaux du Sénat, car il prévoyait des aménagements. Nous ne pouvons pas reculer. Les petites communes doivent pouvoir garder la maîtrise de la gestion de leur eau lorsqu'elles le souhaitent, des communautés de communes ou d'agglomération ne disposant pas des moyens leur permettant d'exercer la compétence

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