Question de Mme ASSASSI Éliane (Seine-Saint-Denis - CRCE) publiée le 19/10/2017

Mme Éliane Assassi interroge M. le ministre de l'action et des comptes publics sur l'effet de la réduction des dépenses publiques, amenant des centaines de trésoreries municipales a disparaître.
Contrairement aux promesses de sauvegarde de l'activité, suite à la mobilisation des élus et des habitants, la direction départementale des finances publiques de la Seine-Saint-Denis a annoncé en juillet 2017 la fermeture de la trésorerie municipale de Bagnolet, ainsi que la fusion de celles de La Courneuve et d'Aubervilliers en un seul et même site, à savoir celui d'Aubervilliers.
Ces fermetures sont dictées par une logique économique court-termiste dans les villes qui cumulent déjà de nombreuses difficultés d'accès aux services publics. Les habitants de Seine-Saint-Denis ont droit, au même titre que l'ensemble de la population, à un service public de proximité, de lien humain, que les services dématérialisés ne peuvent pas remplacer. Demain, les Courneuviens devront se déplacer à Aubervilliers -dont la trésorerie est surchargée- pour payer la cantine de leurs enfants ou acheter des timbres fiscaux. Les conditions d'accueil des usagers aussi bien que les conditions de travail des agents s'en trouveront fortement dégradées.
Aussi elle l'interroge sur les mesures qu'il envisage de prendre afin de permettre aux communes d'assurer le fonctionnement des services publics de proximité.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministre de l'économie et des finances publiée le 22/11/2017

Réponse apportée en séance publique le 21/11/2017

Mme Éliane Assassi. Sous l'effet de la réduction des dépenses publiques, des services publics, dont des trésoreries municipales, ont disparu de certains territoires de notre pays. La Seine-Saint-Denis n'échappe pas à cette cure d'amaigrissement. Des fermetures avaient été annoncées l'an dernier, mais, devant la mobilisation des élus et de la population, des promesses de sauvegarde avaient été faites par le ministre des finances de l'époque.

Or, en juillet dernier, la direction départementale des finances publiques de la Seine-Saint-Denis nous a informés que les trésoreries d'Aubervilliers et de La Courneuve fermeraient leurs portes le 1er janvier 2018 pour se regrouper sur un seul et même site, à savoir celui d'Aubervilliers. La trésorerie de Bagnolet, à la fois trésorerie municipale et centre des impôts, serait, quant à elle, déplacée à Montreuil. D'autres sites, à terme, seraient également concernés.

Ces fermetures sont dictées par une logique économique qui vise à supprimer la moitié des trésoreries d'ici à cinq ans pour, nous dit-on, alléger la facture de l'État. Cette logique n'est pas la nôtre. En Seine-Saint-Denis, nos villes cumulent déjà de nombreuses difficultés en matière d'accès aux services publics, comme La Poste ou les hôpitaux, pour ne citer que ces exemples.

Les Séquano-Dyonisiens ont droit, au même titre que l'ensemble de la population, à un service public de proximité, fondé sur des liens humains que les services dématérialisés ne peuvent pas remplacer. Demain, les Courneuviens devront se déplacer à Aubervilliers, où la trésorerie est surchargée, pour payer la cantine de leurs enfants ou acheter des timbres fiscaux. Cela vaudra également pour les usagers de Tremblay-en-France, de Stains ou encore d'Épinay-sur-Seine.

Dans tous les cas de figure, les conditions d'accueil de ces usagers aussi bien que les conditions de travail des agents s'en trouveront fortement dégradées. Je me permets donc, ce matin, de relayer la colère qui s'exprime dans mon département par la voix des élus et des populations, qui refusent la fermeture et la fusion de ces services publics de proximité, et vous demande, monsieur le secrétaire d'État, quelles mesures vous comptez prendre pour répondre à leurs revendications et respecter la promesse qu'avaient faite vos prédécesseurs.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.

M. Benjamin Griveaux, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances. Madame la sénatrice, vous le savez, une action publique et un service public modernes et efficaces adaptent leurs implantations physiques aux évolutions démographiques, aux nouvelles technologies, aux nouveaux usages et à la nouvelle pratique des services publics de nos concitoyens.

À l'évidence, cette pratique a évolué, au regard notamment du développement du numérique. Dans un monde où plus d'un contribuable sur deux déclare ses revenus en ligne, la qualité du service public ne se mesure pas strictement – cela ne veut pas dire que cet élément n'est pas important – à la seule présence physique sur le territoire.

Les efforts qui ont été réalisés ces dernières années par la Direction générale des finances publiques, la DGFiP, pour développer son offre de services à distance, avec notamment des permanences téléphoniques étendues, sont assez considérables. Les populations les plus fragiles ou les plus éloignées de ces moyens de communication font l'objet d'un accompagnement particulier : des solutions innovantes peuvent être trouvées, comme la mise en place de permanences ambulantes sur des parties de territoire qui seraient mal couvertes.

La DGFiP a en outre considérablement développé son offre de services à distance avec des permanences téléphoniques assurées selon des plages horaires étendues.

La Seine-Saint-Denis est l'un des premiers départements couverts par un centre de contact, dispositif qui a pour objectif de faciliter la gestion à distance de la relation avec les usagers. Les deux projets de regroupement de trésoreries sont des reports d'opérations présentées en 2016, avec une date d'effet initialement prévue en 2017. La maturité insuffisante des projets a dicté ce report, afin que ces deux opérations puissent se dérouler dans les meilleures conditions à la fois pour les usagers et pour les agents.

S'agissant de la trésorerie de La Courneuve municipale, son regroupement avec la trésorerie d'Aubervilliers s'inscrit dans une logique de rationalisation du réseau du secteur public local départemental. Compte tenu des distances réduites entre les communes de La Courneuve et d'Aubervilliers, l'incidence pour les usagers nous paraît limitée.

Le regroupement de l'activité « secteur local » de la trésorerie de Bagnolet avec la trésorerie spécialisée de Montreuil municipale permettra de renforcer la qualité des prestations de conseil apportées par le comptable public. Le passage en comptabilité commerciale de l'office public de l'habitat de la commune a notamment eu pour conséquence une baisse importante d'activité de cette trésorerie.

Par ailleurs, le regroupement au sein du service des impôts des particuliers de Montreuil et du recouvrement de l'impôt permettra aux usagers concernés de bénéficier d'un interlocuteur unique pour leurs questions portant sur l'assiette et le recouvrement de leurs impôts. Un site a déjà été identifié.

Enfin, comme pour l'opération précédente, compte tenu des distances réduites entre les communes de Bagnolet et de Montreuil, l'incidence pour les usagers nous paraît également limitée. La direction départementale des finances publiques a néanmoins manifesté son accord pour la mise en place d'une antenne locale, afin d'être au plus près des populations qui pourraient solliciter ses services.

J'espère avoir répondu en partie, sinon entièrement, à vos interrogations, madame la sénatrice.

M. le président. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, de veiller à ne pas dépasser votre temps de parole.

M. Benjamin Griveaux, secrétaire d'État. La Seine-Saint-Denis le mérite ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Monsieur secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. Je dois dire que je m'attendais à de tels propos, mais les faits sont têtus. Il y aura des fermetures de trésoreries en Seine-Saint-Denis ; cela va toucher des populations défavorisées, mais aussi les agents de ces structures, qui créent souvent du lien avec les populations et sont très à l'écoute des situations parfois difficiles que vivent des hommes et des femmes de ce département.

Votre réponse ne me satisfait pas, monsieur le secrétaire d'État. Je ne vous ai parlé ce matin que des centres des impôts, mais j'aurais également pu évoquer la fusion des hôpitaux, les fermetures de centres de sécurité sociale, de centres d'information et d'orientation, ou encore le refus de La Poste de livrer des colis dans certains quartiers. En conclusion, j'ai tout de même le sentiment que la Seine-Saint-Denis est quelque peu sacrifiée sur l'autel de la réduction des dépenses publiques. Ce n'est malheureusement pas nouveau.

Je connais bien la Seine-Saint-Denis pour y être née et y avoir toujours vécu. Les Séquano-Dyonisiens sont des hommes et des femmes d'une grande dignité, qui demandent à être respectés. Or nous avons le sentiment, depuis de trop nombreuses années, de ne pas l'être.

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