Question de M. HOUEL Michel (Seine-et-Marne - UMP) publiée le 11/12/2014

M. Michel Houel attire l'attention de Mme la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité sur le fait que la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové dite « Alur » prévoit des évolutions significatives dans différents domaines du logement mais aussi sur l'instruction du droit des sols. Parmi les nombreuses mesures annoncées, l'État, pour des raisons budgétaires, a décidé de supprimer, à partir du 1er juillet 2015, l'appui aux communes de moins de 10 000 habitants actuellement assuré par la direction départementale des territoires (DDT).

Ainsi, les communes vont-elles devoir mettre en œuvre les moyens nécessaires pour reprendre à leur compte cette instruction de quelque manière que ce soit : soit en instruisant elles-mêmes la demande qui appelle une vraie compétence technique, soit en déléguant cette compétence à une autre commune ou un établissement public de coopération intercommunale (EPCI), ou encore en la confiant à une agence départementale, sachant que l'instruction des autorisations d'urbanisme ne peut être réalisée par un bureau d'études.

Les moyens des petites communes ne leur permettent pas d'instruire elles-mêmes les demandes sur une matière très complexe et, bien souvent, seules les DDT sont à même de leur rendre ce service. Le risque est donc d'aboutir à la délivrance de permis tacites.

Cette évolution qui marque, une fois de plus, le désengagement de l'État, engendre un transfert de charges financières non négligeable qui vient s'ajouter à la baisse drastique des dotations aux collectivités locales et au coût supplémentaire imposé par la mise en œuvre des nouveaux rythmes scolaires. Les collectivités n'ont pas de « trésor caché » sur lequel on peut prélever sans dommage.

Si l'État n'accepte pas de revenir sur une décision pénalisante pour les communes rurales, il ne reste qu'une solution : supprimer la gratuité du permis de construire et en fixer le prix en pourcentage du coût de la construction. La formule proposée aujourd'hui, permettrait d'assurer une véritable égalité entre les territoires, une fois de plus mise à mal, et une transparence financière vis-à-vis des contribuables qui, de toutes façons, auront à assumer ce transfert de charges. Il lui demande donc de lui préciser les éléments de sa réflexion sur cette proposition.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des finances et des comptes publics, chargé du budget publiée le 04/02/2015

Réponse apportée en séance publique le 03/02/2015

M. Michel Houel. La loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, dite« loi ALUR », prévoit des évolutions significatives dans différents domaines du logement mais aussi en ce qui concerne l'instruction du droit des sols.

Parmi les nombreuses mesures annoncées, l'État, pour des raisons budgétaires, a décidé de supprimer, à partir du 1er juillet 2015, l'appui aux communes de moins de 10 000 habitants actuellement assuré par les DDT, les directions départementales des territoires.

Ainsi, les communes vont devoir mettre en œuvre les moyens nécessaires pour parvenir, d'une manière ou d'une autre, à reprendre à leur compte cette mission : soit en instruisant elles-mêmes la demande, qui appelle une vraie compétence technique ; soit en déléguant cette compétence à une autre commune ou à un EPCI ; soit encore en la confiant à une agence départementale, sachant que l'instruction des autorisations d'urbanisme ne peut être réalisée par un bureau d'études.

Les petites communes ne disposent pas des moyens qui leur permettraient d'instruire elles-mêmes les demandes sur une matière très complexe. Bien souvent, seules les DDT - qui font très bien leur travail - sont à même de leur rendre ce service. Le risque est donc d'aboutir à la délivrance de permis tacites.

Cette évolution, qui marque le désengagement de l'État, engendre un transfert de charges financières non négligeable, qui vient s'ajouter à la baisse drastique des dotations aux collectivités locales et aux coûts supplémentaires engendrés par la mise en œuvre obligatoire des nouveaux rythmes scolaires. Les collectivités n'ont pas de « trésor caché » sur lequel on pourrait prélever sans dommage !

Si l'État, monsieur le secrétaire d'État, n'accepte pas de revenir sur une décision pénalisante pour les communes rurales, je ne vois qu'une solution : supprimer la gratuité du permis de construire et en fixer le prix à un certain pourcentage du coût de la construction.

La formule que je vous propose aujourd'hui permettrait d'assurer une véritable égalité entre les territoires et une transparence financière vis-à-vis des contribuables qui, de toute façon, auront à assumer ce transfert de charges.

Je saurais donc gré au Gouvernement de bien vouloir engager une réflexion sur cette proposition.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Christian Eckert,secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget. Monsieur le sénateur, vous interrogez Mme la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité sur les évolutions apportées par la loi ALUR concernant l'instruction du droit des sols.

L'article 134 de cette loi prévoit que la mise à disposition des services de l'État pour l'instruction des actes d'urbanisme sera réservée, à compter du 1er juillet 2015, aux seules communes compétentes appartenant à des établissements publics de coopération intercommunale de moins de 10 000 habitants, ou, si l'EPCI est compétent en matière d'urbanisme, aux seuls EPCI de moins de 10 000 habitants, la capacité des intercommunalités à assumer ces missions s'étant significativement renforcée. Il n'est donc pas question d'abandonner les communes ou les EPCI dont la population se situe en dessous de ce seuil.

Je souhaite par ailleurs souligner qu'il ne s'agit pas, en réalité, de l'abandon d'une mission de la part de l'État, mais d'une réorientation de celle-ci vers un« nouveau conseil aux territoires » - le NCT - ciblé sur l'appui à l'émergence de projets, l'aide à la gestion de situations difficiles ou imprévues, le portage de politiques prioritaires de l'État qui doivent s'inscrire sur le territoire, ou encore le concours en termes d'organisation de la sécurité des ouvrages d'art.

La généralisation de l'intercommunalité comme la création du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement, également effectives depuis le 1er janvier 2014, ont d'ailleurs facilité cette évolution.

Par ailleurs, il est important de rappeler que l'instruction des actes d'urbanisme est une compétence des collectivités territoriales. Si certains services de l'État étaient jusqu'à présent mis à disposition des collectivités pour les aider à instruire les actes, le maire, ou le représentant de l'intercommunalité, demeurait bien le signataire de l'acte.

Comme vous le rappelez, le code de l'urbanisme précise la liste des services habilités à instruire les actes d'urbanisme. Dans une instruction ministérielle du 3 septembre 2014 relative aux missions de la filière d'application du droit des sols dans les services de l'État et aux mesures d'accompagnement des collectivités locales, il est clairement précisé que, en l'état actuel des textes, une commune ne peut pas confier l'instruction des actes d'urbanisme à des prestataires privés.

La mutualisation de l'ingénierie au niveau intercommunal est la solution la plus adaptée pour répondre aux difficultés que vous signalez. C'est la solution préconisée dans l'instruction du 3 septembre 2014 précitée. En effet, la dissémination des moyens à l'échelle de chaque commune ne paraissait pas judicieuse.

Au-delà de l'aspect financier, la mutualisation permet d'assurer la prise en compte des préoccupations locales tout en capitalisant l'expérience et le savoir-faire avec un service d'instruction dédié au niveau intercommunal. Le maire reste par ailleurs signataire des actes.

Enfin, il n'est pas possible de faire payer les demandeurs des autorisations d'urbanisme, car cela dérogerait au principe - inscrit dans notre droit - suivant lequel l'instruction des autorisations d'urbanisme est considérée comme un service public administratif.

M. le président. La parole est à M. Michel Houel.

M. Michel Houel. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, de ces précisions. Il est évident que l'on ne peut s'engager aveuglément dans un tel bouleversement. Il reste que, pour l'avoir moi-même appliquée dans ma communauté de communes, je préconise la mutualisation. Il faudra bien que, in fine, quelqu'un supporte le coût de l'instruction du droit des sols...

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