Question de M. VAUGRENARD Yannick (Loire-Atlantique - SOC) publiée le 04/12/2014

M. Yannick Vaugrenard attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social sur une étude publiée le 22 janvier 2014 par le cabinet Technologia, spécialisé dans la prévention des risques professionnels, qui souligne que plus de trois millions d'actifs ont un risque élevé d'épuisement professionnel, le « burn-out ».
Cette expression s'est imposée dans le langage courant pour décrire l'épuisement professionnel des salariés. Cependant, elle ne permet ni de décrire ces affections ni de promouvoir leur reconnaissance en tant que maladie professionnelle.
Aujourd'hui, le « burn-out » peut être reconnu comme une maladie professionnelle au titre de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale. Cependant, seules quelques dizaines de cas par an le sont effectivement du fait des critères particulièrement restrictifs de cet article : la maladie doit entraîner une incapacité permanente de travail de plus de 25 %, et un lien « direct et essentiel » avec le travail doit être mis en évidence par un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.
Or, les critères réglementaires de recevabilité des demandes restent difficiles à réunir et le traitement par les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles est très hétérogène.
Selon l'étude du cabinet Technologia, le lien « direct et essentiel » avec le travail est établi et les pathologies que développent les personnes victimes de cette maladie ne concernent que la sphère professionnelle. Il lui demande donc quelle est la position du Gouvernement sur la reconnaissance du « burn-out » en tant que maladie professionnelle.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement publiée le 04/02/2015

Réponse apportée en séance publique le 03/02/2015

M. Yannick Vaugrenard. Depuis quelques années, le terme burn-out a fait une entrée fracassante dans le vocabulaire lié aux conditions de travail. Ce que l'on s'accorde à décrire comme l'épuisement professionnel des salariés ne dispose toutefois pas de définition officielle. À l'heure actuelle, il est donc impossible de savoir ce que recouvre cette pathologie, ni de décrire ses affections, ni de promouvoir leur reconnaissance en tant que maladie professionnelle.

Aujourd'hui, seulement quelques dizaines de cas par an sont effectivement reconnus comme maladie professionnelle au titre de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale.

Au gré des études publiées sur le sujet, le nombre de personnes touchées n'est pas le même, mais il est toujours beaucoup plus important que ces quelques cas reconnus !

Je citerai une étude réalisée par un cabinet spécialisé dans la prévention des risques professionnels. Aux termes de celle-ci, il est estimé que plus de 3 millions d'actifs présentent un risque élevé d'épuisement professionnel, appelé couramment burn-out. À la suite de cette étude, ce même cabinet a lancé un appel à la reconnaissance du burn-out en tant que maladie professionnelle, estimant établi le lien « direct et essentiel » avec le travail : les pathologies développées par les personnes atteintes de cette maladie ne concernent effectivement que la sphère professionnelle.

Au cours de l'année passée, de nombreuses voix allant dans le même sens se sont élevées pour demander la reconnaissance de cette maladie professionnelle. Une proposition de résolution a été déposée par notre groupe en juillet dernier au Sénat et, au début du mois de décembre, c'est une trentaine de députés de la majorité qui ont publié une tribune demandant la reconnaissance du burn-out comme maladie professionnelle.

Pour l'heure, ces initiatives n'ont pas permis de dissiper le flou sur la nature des pathologies visées, les facteurs de risques et le nombre de personnes concernées. Il est donc particulièrement difficile d'organiser une nécessaire prévention, mais il est avéré que le stress et la souffrance psychique au travail touchent plus de salariés aujourd'hui qu'hier.

Dans les prochains jours, M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social recevra le rapport du groupe de réflexion sur les risques psychosociaux et leburn-out mis en place par ses soins au début de l'année 2014. Nous souhaiterions d'ores et déjà être éclairés sur les conclusions de ce groupe de travail, ainsi que sur les orientations que prendra le ministère.

De plus, il est question que le département chargé des études et des statistiques au sein du ministère du travail lance, conjointement avec l'INSEE, une grande enquête sur les risques psychosociaux, comme cela avait été demandé par le collège d'expertise sur le suivi statistique des risques psychosociaux au travail en 2011. Le lancement de cette enquête peut-il nous être confirmé ? Dans quels délais celle-ci sera-t-elle menée ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Jean-Marie Le Guen,secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Je vous prie tout d'abord, monsieur le sénateur, de bien vouloir excuser l'absence de François Rebsamen, qui reçoit aujourd'hui les partenaires sociaux pour tirer le bilan des négociations sur la modernisation du dialogue social.

La question du burn-out est bien évidemment une problématique importante et difficile. Le ministre du travail est très sensible aux interpellations portées par certains acteurs- la vôtre, en particulier - et à l'écho que ces dernières suscitent dans le grand public.

Cet écho montre à quel point le travail et la place du travail doivent être au cœur de nos réflexions.

De nombreuses interpellations portent effectivement sur la reconnaissance de l'origine professionnelle du burn-out ou, plus précisément, de certaines pathologies psychiques telles que les dépressions, le burn-out n'étant pas actuellement conçu comme une pathologie en tant que telle, au sens des classifications médicales de référence.

Des travaux sont en cours entre les partenaires sociaux au sein de la commission des pathologies professionnelles du Conseil d'orientation sur les conditions de travail, le COCT, pour élaborer des typologies médicales et des recommandations permettant de faciliter la reconnaissance du burn-out au niveau du système dit« complémentaire ». L'impact de ces travaux dans le cadre du fonctionnement actuel des comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles, les C2RMP, doit maintenant être examiné de près, à l'aune des revendications et inquiétudes s'exprimant sur le sujet.

Toutefois, la priorité est bien évidemment la prévention.

Cette préoccupation rejoint les orientations proposées par les partenaires sociaux, ces derniers ayant souhaité que la prévention des risques psychosociaux figure dans les priorités resserrées du troisième plan Santé au travail, le PST3.

Des travaux sont en cours associant l'administration, des experts et les principaux organismes de prévention pour produire un premier document visant à mieux caractériser le syndrome duburn-out et, surtout, à produire des recommandations. Au-delà, le ministre du travail souhaite que le PST3 définisse un cadre d'action stratégique nous permettant de faire significativement progresser, dans les entreprises, et au plus près des situations de travail, la prise en compte de cet enjeu majeur en termes de prévention.

M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard.

M. Yannick Vaugrenard. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d'État.

D'une certaine manière, le burn-out est la nouvelle maladie des temps modernes. Comme vous l'avez reconnu, c'est une question extrêmement sérieuse. Il faut traiter les effets - une thématique à examiner avec beaucoup d'attention -, mais également les causes, qui peuvent naître de l'organisation du travail, dans les bureaux ou encore dans les ateliers.

Vous avez apporté un certain nombre d'éléments de réponse. Mais j'aimerais que, à un moment ou à un autre, nous ayons connaissance des délais dans lesquels le burn-out pourrait véritablement être reconnu, en particulier par la sécurité sociale. Qu'en est-il, donc, des délais effectifs ?

Par ailleurs, je partage votre point de vue quant à l'absolue nécessité d'imaginer des modalités de prévention. Bien entendu, ce sujet doit être discuté avec les organisations professionnelles concernées.

Mais s'il faut prévenir, il faut également guérir. Or pour permettre la guérison, il est important que cette pathologie soit reconnue comme une maladie professionnelle.

C'est pourquoi, monsieur le secrétaire d'État, je souhaite que nous puissions être informés, dans des délais extrêmement raisonnables, de la réalité effective de cette reconnaissance en tant que maladie professionnelle.

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