Question de M. KARAM Antoine (Guyane - SOC-A) publiée le 12/12/2014

Question posée en séance publique le 11/12/2014

M. Antoine Karam. Ma question s'adresse à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Le conseil ministériel de l'Agence spatiale européenne, qui s'est tenu à Naples en novembre 2012, a abouti à un accord sur Ariane 6. Cet accord historique prévoit de développer un nouveau lanceur, sans passer finalement par Ariane 5 ME.

On le sait, la France est à la pointe de l'Europe dans le domaine spatial, grâce à ses entreprises et à son engagement pour renforcer les investissements et les projets. Mais c'est aussi grâce à la Guyane et au Centre spatial guyanais que nous pouvons offrir le lanceur le plus fiable du monde.

Madame la secrétaire d'État, cet accord couronne la dynamique que vous avez enclenchée. Grâce au Comité de concertation État-Industrie sur l'espace, le CoSpace, que vous présidez avec les ministres de la défense et de l'économie, vous avez réuni l'ensemble des acteurs de cette filière pour constituer « l'équipe de France du spatial ». Avec l'agenda stratégique France Europe 2020, vous avez remis l'État à sa place de stratège pour donner du sens aux projets de recherche, qui sont essentiels pour l'avenir.

Il y a quelques jours, le monde se tournait vers la sonde Philae, succès majeur pour l'Agence spatiale européenne, le CNES, ainsi que tous les laboratoires et les chercheurs qui ont contribué à sa conception. C'est un signe fort de l'investissement pour la recherche et nos universités, lequel doit être sanctuarisé et renforcé.

Toutefois, madame la secrétaire d'État, permettez-moi aussi de rappeler que la Guyane attend davantage d'engagements de la part de l'État et que les Guyanais ont besoin d'actes concrets et rapides.

Que dire aux Guyanais qui, à quelques kilomètres de Kourou, n'ont toujours pas accès à l'eau potable ou à l'électricité, et encore moins à Internet ou à un réseau mobile ? Que leur répondre quand, faute d'aménagements, la circulation des biens et des personnes est toujours extrêmement difficile ?

Faut-il rappeler, encore, que le taux de chômage y est trois fois plus important qu'au niveau national et qu'un jeune sur deux est sans emploi ?

Il y a, vous le savez, un grand paradoxe en Guyane : d'un côté, le Centre spatial de Kourou, qui est un fort levier d'attractivité ; de l'autre, des infrastructures qui ne suivent pas le développement démographique de la région. Ne sacrifions donc pas le développement de la Guyane sur l'autel de la réduction des déficits !

On ne comprendrait pas qu'Ariane 6 soit toujours, comme le disait François Mitterrand, une « fusée lancée sur fond de bidonvilles » et que le déséquilibre territorial entache l'image de la réussite du spatial en Guyane.

Pour conclure, madame la secrétaire d'État, pouvez-vous nous indiquer quelles sont les retombées attendues en termes d'emploi et de compétitivité pour nos entreprises installées en Guyane ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du groupe écologiste.)

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche publiée le 12/12/2014

Réponse apportée en séance publique le 11/12/2014

Mme Geneviève Fioraso,secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, tout d'abord, je tiens à féliciter l'ensemble des équipes d'Arianespace et du CNES, qui ont réussi avec succès le soixante-troisième lancement d'affilée d'Ariane samedi dernier à Kourou.(Applaudissements.)

M. Alain Gournac. Très bien !

Mme Geneviève Fioraso,secrétaire d'État. Vous l'avez dit, monsieur le sénateur, le conseil ministériel de l'Agence spatiale européenne a pris le 2 décembre dernier, à Luxembourg, une décision historique, celle de développer, sans passer par Ariane 5 ME, un nouveau lanceur Ariane 6, qui remplacera Ariane 5 à compter de 2020.

Vous le savez, le secteur spatial est extrêmement concurrentiel et nous nous devions de réagir au niveau européen. Cette décision est aussi le fruit de l'engagement sans faille de l'ensemble des acteurs du public et du privé, que, avec mes collègues Jean-Yves Le Drian et Emmanuel Macron, j'ai voulu réunir dans un conseil commun, le CoSpace. Il a ainsi étépossible de concevoir un nouveau lanceur dont les spécifications convenaient à tous, pour des vols tant scientifiques que stratégiques ou commerciaux, et qui nous permettait d'être concurrentiels.

Il était extrêmement important que nous prenions cette décision. Ce lanceur modulaire et compétitif nous permettra de rester en tête au niveau international.

Après un effort de conviction absolument déterminant auprès de nos partenaires allemands, cette décision prise à Luxembourg représente pour l'ensemble de la filière un investissement de 8 milliards d'euros dans les dix années à venir et de 4 milliards d'euros pour la seule filière Ariane 6.

En ce qui concerne le Centre spatial guyanais, il a pu en effet, à sa création, être considéré comme une enclave sur le territoire guyanais. Pourtant, aujourd'hui, la situation a changé : quelque 75 % de son personnel sont guyanais.

M. Alain Gournac. Oui !

Mme Geneviève Fioraso,secrétaire d'État. Le centre représente 9 000 emplois directs et indirects et 15 % du PIB du territoire. Ce développement profite donc directement aux Guyanais. De plus, de 30 % à 40 % des appels d'offres bénéficient à des entreprises guyanaises.

Le fait d'avoir décidé de lancer Ariane 6 nous permettra de réaliser un investissement de 600 millions d'euros dans les années à venir à Kourou. Les entreprises locales seront concernées et les collectivités territoriales devront, avec notre aide, davantage former les jeunes.

C'est la raison pour laquelle l'IUT de Kourou développe des filières de formation au spatial. Son président n'est autre que le directeur du Centre spatial guyanais, lequel s'engage également financièrement.

M. le président. Veuillez conclure, madame la secrétaire d'État.

Mme Geneviève Fioraso,secrétaire d'État. Par ailleurs, l'université de Guyane a été créée pour renforcer la formation et permettre aux jeunes de bénéficier de la filière du spatial, qui est une grande filière d'avenir.(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Philippe Dominati. Très bien !

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