Question de Mme BONNEFOY Nicole (Charente - SOC) publiée le 13/11/2014

Mme Nicole Bonnefoy attire l'attention de Mme la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité au sujet de l'état de la couverture en téléphonie mobile sur notre territoire.

Lorsqu'ils obtiennent une autorisation d'utilisation de fréquences, les opérateurs de téléphonie mobile doivent, en contrepartie, respecter des obligations de couverture de la population et du territoire. Il apparaît que les opérateurs remplissent, pour chacun d'entre eux, leurs obligations de desserte en réseau, avec des taux de couverture de population très élevés, au-delà des 98 % dans la plupart des cas et selon les différentes générations de réseaux.

Par ailleurs, le programme « zones blanches », qui vise à couvrir les communes autrefois non desservies en associant État, collectivités et opérateurs, remplit globalement bien ses objectifs.

Pourtant, très nombreux sont les citoyens qui continuent, dans les territoires peu densément peuplés, à souffrir d'une couverture inexistante ou d'une très faible qualité de service. Cette situation, a priori paradoxale, s'explique très largement par le caractère inadéquat des critères retenus pour considérer comme couvert un territoire et, ainsi, établir les objectifs de couverture. Par exemple, au sens du programme « zones blanches », une zone est réputée couverte quand au moins 50 % des appels passés dans le centre-bourg sont acceptables.

Quelle que soit la taille de l'agglomération, les mesures seront limitées à un cercle d'un rayon de 500 mètres centrés sur le bourg, sur des appels passés à l'extérieur et en position statique. Dans les communes étendues ou dont le bourg est poly-centré, ces critères de couverture se révèlent inopérants. Ces communes sont ainsi nombreuses à être, de jure, couvertes, tout en étant, de facto, insuffisamment bien desservies en réseau pour que leurs habitants puissent avoir une utilisation fiable de la téléphonie mobile.

Cette situation est préoccupante tant le défaut d'accès au téléphone mobile et, plus généralement, aux technologies d'information et de communication, relègue les territoires et entrave profondément leur développement économique et la qualité de vie de leurs résidents.

C'est pourquoi, sachant le Gouvernement extrêmement attaché à la réduction des inégalités territoriales, elle souhaiterait connaître ses intentions pour résoudre les situations persistantes d'enclavement et assurer une couverture de qualité en téléphonie mobile sur l'intégralité du territoire.

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Transmise au Secrétariat d'État, auprès du ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargé du numérique


Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargé du numérique publiée le 17/12/2014

Réponse apportée en séance publique le 16/12/2014

Mme Nicole Bonnefoy. Madame la secrétaire d'État, ma question portera également sur l'état de la couverture en téléphonie mobile de notre territoire.

Vous venez de le rappeler, les opérateurs de téléphonie mobile doivent, en contrepartie de leur autorisation d'utilisation de fréquences, respecter des obligations de couverture de la population et du territoire.

Or, vous l'avez également souligné, il apparaît que les opérateurs remplissent, pour chacun d'entre eux, leurs obligations de desserte en réseau, avec des taux de couverture de la population très élevés, au-delà des 98 % dans la plupart des cas et selon les différentes générations de réseaux. Par ailleurs, le programme « zones blanches »remplit globalement bien ses objectifs.

Pourtant, très nombreux encore sont les citoyens qui continuent, plus particulièrement dans les territoires peu densément peuplés, ce qui est le cas dans mon département de la Charente, à souffrir d'une couverture inexistante ou d'une très faible qualité de service. Cette situation, qui paraît paradoxale, s'explique très largement par le caractère inadéquat des critères retenus pour considérer comme couvert un territoire. En effet, au sens du programme « zones blanches », une zone est réputée couverte quand au moins 50 % des appels passés dans le centre-bourg sont acceptables.

Quelle que soit la taille de l'agglomération, les mesures seront limitées à un cercle d'un rayon de 500 mètres centrés sur le bourg, sur des appels passés à l'extérieur et en position statique. Dans les communes étendues ou dont le bourg est polycentré - en milieu rural, c'est le cas -, ces critères de couverture se révèlent inopérants : on considère que la commune est couverte, alors que, en pratique, elle ne l'est pas. Cette situation est très préoccupante, d'autant qu'elle relègue ces communes et ces territoires, entrave profondément leur développement économique et la qualité de vie de leurs résidents.

Sur ces problèmes de critères d'éligibilité, madame la secrétaire d'État, je souhaite connaître vos intentions.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Axelle Lemaire,secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique. Madame la sénatrice, l'aménagement numérique du territoire est une priorité pour le Gouvernement. Nous avons engagé un plan très ambitieux pour le déploiement des réseaux fixes, à hauteur de 20 milliards d'euros, qui devrait permettre de placer notre pays en tête des États européens les mieux connectés. Le lancement de ce programme était urgent. Il est désormais sur de bons rails, et il est temps de considérer ce qui peut être fait pour améliorer la couverture des territoires ruraux en téléphonie mobile.

Votre question est double. Vous vous interrogez à la fois sur les obligations imposées aux opérateurs mobiles et sur les critères utilisés par le régulateur et les pouvoirs publics pour déterminer les zones couvertes.

À l'heure actuelle, les opérateurs mobiles ont déployé près de 40 000 antennes sur l'ensemble du territoire. Dans ce domaine, comme dans celui du fixe, la France est plutôt mieux lotie que ses voisins européens, en dépit du ressenti des consommateurs. Ses opérateurs sont soumis à des obligations de couverture nationale en 2G et en 3G, ainsi qu'à des obligations plus spécifiques pour la couverture des zones blanches. Au titre de ce programme, désormais réalisé à 97 %, ils doivent couvrir les centres-bourgs de 3 300 communes rurales.

En Charente, je l'ai vérifié, trente-sept communes sont concernées par ce programme. Il est essentiel que ces différentes obligations soient respectées. Or elles ne le sont pas encore suffisamment à ce jour. C'est la raison pour laquelle nous avons rétabli le pouvoir de sanction de l'autorité de régulation, l'ARCEP. Nous attendons d'elle qu'elle fasse preuve de rigueur et de fermeté. Cette demande sera réitérée à l'occasion de la prise de fonctions de son prochain président.

D'ores et déjà, l'ARCEP a ouvert trois enquêtes administratives en mai 2014, qui concernent la couverture 3G de Free et de SFR et la mise en œuvre de l'accord de 2010 pour le déploiement de la 3G dans 3 500 communes rurales. Je l'ai dit, ce programme aurait dû être terminé à la fin de l'année 2013, mais il ne l'est pas encore. Le Gouvernement est très vigilant s'agissant de son exécution par les opérateurs.

Les méthodes de mesures, sur lesquelles vous m'avez également interrogée, madame la sénatrice, peuvent être modernisées, je vous l'accorde, afin de mieux informer les utilisateurs, qui comprennent mal la manière dont la couverture est mesurée, et de mieux refléter la réalité de leur expérience quotidienne.

Des vérifications régulières sont déjà réalisées et font l'objet de publications annuelles, mais je souhaite que, sur le sujet de la couverture mobile, on ait beaucoup plus recours à l'open data, c'est-à-dire aux données publiques, ainsi qu'au crowdsourcing. Il s'agit de permettre aux utilisateurs de reporter leur expérience dans une base de données, afin que nous disposions de données autres que celles des pouvoirs publics, des opérateurs et du régulateur. Cela permettrait de définir de nouveaux outils de mesure.

Il demeure encore trop de communes dans lesquelles la couverture en réseau mobile est insatisfaisante. La question des bourgs polycentrés que vous avez évoquée, madame la sénatrice, n'avait pas été envisagée au moment de la conception du programme « zones blanches » en 2003. Cette question montre bien la difficulté d'appréhender les réalités locales et le vécu des utilisateurs.

Comme l'indique l'Agenda des réformes publié la semaine passée par le Premier ministre, le Gouvernement entend définir de nouveaux moyens afin de permettre aux collectivités territoriales d'assurer la couverture des zones blanches du mobile, en offrant une réponse inscrite dans la durée. Cela implique de traiter non seulement les communes ayant déjà été identifiées comme n'étant toujours pas couvertes, mais également d'offrir des solutions pour les zones grises et des solutions de financement - un guichet pérenne - aux communes qui auraient échappé aux différents recensements réalisés et pourraient, après s'être signalées, bénéficier d'un soutien de l'État.

C'est un nouveau chantier qui s'ouvre à nous. Soyez assurée, madame la sénatrice, que le Gouvernement souhaite améliorer de manière pérenne et ferme la couverture mobile, en particulier dans les zones les plus enclavées et les plus éloignées des centres urbains.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.

Mme Nicole Bonnefoy. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, de ces éléments de réponse. Je prends acte bien évidemment du volontarisme dont fait preuve le Gouvernement afin d'améliorer la couverture en téléphonie mobile de notre territoire.

Pour autant, je rappelle qu'il est nécessaire de revenir rapidement sur les critères d'éligibilité de l'ARCEP. On ne peut considérer qu'une commune est couverte que lorsqu'elle l'est totalement, et non lorsqu'elle l'est uniquement en un point donné, à savoir 500 mètres autour de la mairie, ce qui est aujourd'hui l'unité de mesure de l'ARCEP.

Je rappelle qu'il est impossible pour les collectivités d'agir auprès des opérateurs. Sous la pression des usagers, elles sont donc contraintes d'envisager de pallier elles-mêmes les problèmes qu'elles rencontrent, afin de répondre aux besoins de leurs administrés, et bien que cela ne relève pas de leurs compétences.

Ainsi, dans mon département, certaines collectivités envisagent d'installer des pylônes, sachant qu'un pylône coûte 100 000 euros. À l'heure où les crédits des collectivités sont comptés, surtout ceux des plus modestes d'entre elles, dans nos territoires ruraux, une telle solution n'est pas envisageable.

Il serait bien évidemment plus simple de contraindre les opérateurs en modifiant les critères d'éligibilité et la fameuse règle des 500 mètres. Si cette distance était portée ne serait-ce qu'à un kilomètre, la couverture en téléphonie mobile des territoires serait tout à fait différente.

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