Question de M. MAZUIR Rachel (Ain - SOC) publiée le 16/10/2014

M. Rachel Mazuir appelle l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social sur les difficultés rencontrées par les collectivités territoriales pour recruter et former leurs apprentis. Une question écrite (n° 08484 JO Sénat du 10 octobre 2013) avait déjà été posée sur ce sujet mais n'a pu obtenir de réponse avant le terme du mandat de son auteur.
La loi n° 92-675 du 17 juillet 1992 portant diverses dispositions relatives à l'apprentissage, à la formation professionnelle et modifiant le code du travail prévoit que des personnes morales de droit public dont le personnel ne relève pas du droit privé peuvent conclure des contrats d'apprentissage et que ces contrats sont des contrats de droit privé.
Dans ce cadre, le département de l'Ain emploie des apprentis qui suivent une formation pratique dans les cuisines de restauration collective des collèges.
Les règles applicables en matière d'hygiène et de sécurité dans les services des collectivités sont celles définies par les livres premier à V de la quatrième partie du code du travail et par les décrets pris pour leur application.
Les apprentis peuvent être amenés à effectuer certaines tâches qui, du fait de leur minorité leur sont interdites. Au regard des dispositions des articles R. 4153-40 et R. 4153-41 du code du travail, l'employeur, ou le chef d'établissement de formation, peut présenter une demande de dérogation à l'inspection du travail pour être autorisé à affecter ces jeunes à certains travaux nécessaires à leur formation professionnelle.
Or, l'unité territoriale de la direction régionale des entreprises de la concurrence de la consommation du travail et de l'emploi (DIRECCTE), saisie d'une demande de dérogation pour des apprentis mineurs employés par le département de l'Ain, s'est déclarée incompétente. L'analyse juridique reste discutable.
Certes, les apprentis sont employés par des collectivités territoriales mais leurs contrats de travail ressortissent bien du droit privé et les articles 17 et 18 de la loi de 1992 mentionnée plus haut considèrent bien que, dans ses relations avec ses apprentis, la collectivité territoriale est un employeur de droit commun : à ce titre, l'inspection du travail devrait donc être habilitée à délivrer ces dérogations.
La récente loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale ne prévoit aucune disposition permettant de mettre fin à ce vide juridique. C'est la raison pour laquelle il souhaite connaître les mesures qu'entend prendre le Gouvernement pour résoudre cette anomalie.
Par ailleurs, les dispositions de la directive européenne n° 94/33/CE du 22 juin 1994 relative à la protection des jeunes au travail ont été évoquées pour permettre ainsi aux employeurs d'évaluer eux-mêmes les risques encourus par leurs apprentis et mettre en place les mesures nécessaires sous le contrôle de l'inspection du travail. Il souhaiterait également recueillir son avis sur ce point.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargé de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie publiée le 22/10/2014

Réponse apportée en séance publique le 21/10/2014

M. le président. La parole est à M. Rachel Mazuir, auteur de la question n° 880, adressée à M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. C'est encore Mme Laurence Rossignol qui apportera la réponse...

Il faudrait tout de même que les ministres à qui les questions s'adressent s'habituent à venir répondre en personne devant la Haute Assemblée.

M. Rachel Mazuir. Je ne doute pas, monsieur le président, que Mme la secrétaire d'État chargée de la famille me répondra de manière tout à fait pertinente.

J'ai souhaité appeler l'attention du Gouvernement sur les difficultés rencontrées par les collectivités territoriales pour recruter et former leurs apprentis.

Françoise Laurent-Perrigot avait posé à ce sujet une question écrite en date du 10 octobre 2013, mais elle n'a pu obtenir de réponse avant la fin de son mandat.

La loi du 17 juillet 1992 portant diverses dispositions relatives à l'apprentissage, à la formation professionnelle et modifiant le code du travail prévoit que des personnes morales de droit public dont le personnel ne relève pas du doit privé peuvent conclure des contrats d'apprentissage. Elle dispose également que ces contrats relèvent du droit privé.

Dans ce cadre, le département de l'Ain emploie des apprentis qui suivent une formation pratique dans les cuisines de restauration collective des collèges.

Les règles applicables en matière d'hygiène et de sécurité dans les services des collectivités sont définies par les livres Ierà V à de la quatrième partie du code du travail et par les décrets pris pour leur application.

Les apprentis peuvent être amenés à effectuer certaines tâches qui, du fait de leur minorité, leur sont interdites. Au regard des dispositions des articles R. 4153-40 et R. 4153-41 du code du travail, l'employeur ou le chef d'établissement de formation peut présenter une demande de dérogation à l'inspection du travail pour être autorisé à affecter ces jeunes à certains travaux nécessaires à leur formation professionnelle.

Or l'unité territoriale de la direction régionale des entreprises de la concurrence de la consommation du travail et de l'emploi, la DIRECCTE, saisie d'une demande de dérogation pour des apprentis mineurs employés par le département de l'Ain, s'est déclarée incompétente.

Pourtant, même si ces apprentis sont employés par des collectivités territoriales, leurs contrats de travail ressortissent bien au droit privé. De la même manière, les articles 17 et 18 de la loi de 1992 précitée prévoient que, dans ses relations avec ses apprentis, la collectivité territoriale est un employeur de droit commun. À ce titre, l'inspection du travail devrait donc être habilitée à délivrer ces dérogations.

Cette déclaration d'incompétence conduit en outre à créer une discrimination entre les apprentis mineurs employés par des entreprises privées, qui peuvent obtenir des dérogations au titre des articles R. 4153-40 et R. 4153-41 du code du travail, et ceux embauchés par les collectivités territoriales, pour lesquels toute dérogation est interdite.

La récente loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale ne prévoit aucune disposition permettant de mettre fin à ce vide juridique ; c'est la raison pour laquelle je souhaite connaître les mesures qu'entend prendre le Gouvernement pour résoudre cette anomalie.

J'ajoute que, dans sa question, Mme Laurent-Perrigot invoquait les dispositions de la directive européenne du 22 juin 1994 relative à la protection des jeunes au travail pour autoriser les employeurs à évaluer eux-mêmes les risques encourus par leurs apprentis et mettre en place les mesures nécessaires sous le contrôle de l'inspection du travail. Il y a là de quoi être un peu surpris : cela donne à penser que la directive européenne serait plus souple que notre droit ! Faut-il croire que, en France, on laverait plus blanc que blanc ?

Je souhaite donc recueillir l'avis du Gouvernement sur cet autre point.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Laurence Rossignol,secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, qui est retenu par une réunion à l'Organisation internationale du travail.

Pour faire suite à votre remarque, monsieur le président, je me permettrai d'observer simplement que, au cours de cette séance de questions orales six ministres et secrétaires d'État se seront succédé au banc du Gouvernement pour répondre à dix-huit questions, ce qui me paraît témoigner du respect que celui-ci porte à la Haute Assemblée.

Monsieur Mazuir, les dispositions relatives à la quatrième partie du code du travail sur la santé et la sécurité au travail s'appliquent, conformément à l'article L. 4111-1, aux employeurs de droit privé ainsi qu'aux travailleurs. Elles sont également applicables aux établissements publics à caractère industriel et commercial, aux établissements publics administratifs lorsqu'ils emploient du personnel dans les conditions du droit privé, ainsi qu'aux établissements de santé, sociaux et médico-sociaux.

En conséquence, ces dispositions ne trouvent pas à s'appliquer aux collectivités territoriales. Ces dernières n'ont donc pas à demander une dérogation à l'interdiction d'emploi à des travaux dangereux d'apprentis mineurs, comme la DIRECCTE l'a indiqué à bon droit.

Dans le rapport remis en février dernier par les missions d'inspection sur les freins non financiers au développement de l'apprentissage, il a été préconisé d'encadrer les conditions d'emploi des apprentis mineurs.

Comme cela a été précisé dans le plan de relance de l'apprentissage annoncé à l'issue de la grande conférence sociale des 7 et 8 juillet derniers, un travail sera engagé sur cette question. Il devra naturellement tenir compte des règles applicables aux employeurs privés.

M. le président. La parole est à M. Rachel Mazuir.

M. Rachel Mazuir. Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d'État. Je souhaite seulement que les choses aillent vite, car je suis impatient de voir nos petits apprentis en mesure de se former !

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