Question de M. GUÉRINI Jean-Noël (Bouches-du-Rhône - SOC) publiée le 04/09/2014

M. Jean-Noël Guérini appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur les graves conséquences de l'embargo que la Russie vient d'imposer à l'Europe pour les producteurs de fruits et légumes.
En effet, en rétorsion aux mesures européennes pour sanctionner son implication militaire dans l'est de l'Ukraine, la Russie a décrété jeudi 7 août 2014 un embargo sur l'importation d'un grand nombre de produits agroalimentaires en provenance de pays de l'Union européenne et des États-Unis. Or la Russie représente 8 % des exportations agricoles et agroalimentaires françaises, soit entre 700 millions et un milliard d'euros par an. De surcroît, les pays qui ne peuvent plus exporter vers la Russie cherchent d'autres débouchés et risquent d'inonder le marché français, en cassant les prix. La déstabilisation du marché européen met notamment en péril les producteurs locaux de fruits et légumes, frappés en plein cœur de la saison. À titre d'exemple, le directeur du marché d'intérêt national de Châteaurenard, dans les Bouches-du-Rhône, a constaté, du jour au lendemain, une baisse de 40 % des ventes de la poire de région, dont le prix a baissé de dix centimes au kilo. Beaucoup de sociétés ont été obligées de se séparer de leurs saisonniers et se retrouvent dans une situation économique catastrophique, avec des tonnes de fruits et légumes dans des réfrigérateurs, courant le risque imminent de devoir déposer le bilan.
En conséquence, face à la gravité de la situation, il lui demande quelles mesures urgentes peuvent être envisagées pour aider les producteurs de fruits et légumes à compenser leurs lourdes pertes ou à trouver des débouchés alternatifs pour les produits périssables concernés.

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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée le 27/11/2014

Les filières fruits et légumes, et tout particulièrement celle du melon, de la pêche-nectarine, de l'artichaut, de la pomme de terre primeur et de la tomate, ont connu une campagne d'été dans des conditions dégradées par l'abondance de l'offre et la superposition des calendriers de production de plusieurs pays producteurs européens. Les difficultés ayant été identifiées en amont de la campagne, des campagnes de promotion génériques s'appuyant sur FranceAgriMer et l'interprofession ont permis de relancer la consommation à un niveau supérieur, en début de campagne, à ce qui était observé pour la moyenne sur cinq ans. Ces difficultés ont néanmoins été amplifiées par l'entrée en vigueur de l'embargo russe le 7 août 2014. Des mesures ont ainsi été adoptées au niveau communautaire afin d'organiser l'intervention des opérateurs sur les marchés. Un premier dispositif, ouvert du 18 août 2014 au 3 septembre 2014 a permis aux organisations de producteurs, ainsi qu'aux producteurs non affiliés à des organisations de producteurs, de distribuer gratuitement à des organismes caritatifs agréés, de retirer du marché et/ou de procéder à des dispositifs de récolte en vert ou de non-récolte en bénéficiant d'un co-financement communautaire pour une liste de 14 fruits et légumes périssables. Un second dispositif, fixant un plafond en tonnage de produits pouvant être retirés par État membre exportateur vers la Russie, est applicable du 29 septembre jusqu'à fin décembre 2014. Au-delà des dispositifs d'aide temporaires adoptés au niveau communautaire pour certains produits périssables, l'ensemble des producteurs de fruits et légumes regroupés en organisations de producteurs peuvent procéder à des interventions sur les marchés à travers les programmes opérationnels. Dans la perspective de faire face à ces difficultés conjoncturelles, il a été acté lors de la réunion du 26 septembre 2014 avec les représentants de la filière que des mesures d'accompagnement des entreprises (prêts de trésorerie, fonds d'allègement des charges et prises en charge des cotisations sociales) seraient mises en œuvre au cas par cas, après instruction des demandes par les services compétents, pour permettre aux entreprises agricoles concernées de passer ce cap difficile. Ces mesures sont actuellement mises en œuvre sous l'égide des préfets en lien avec la mutualité sociale agricole, les établissements bancaires et l'ensemble des services de l'État concernés. En ce qui concerne les difficultés structurelles de la filière fruits et légumes, des mesures sont développées à plusieurs niveaux. Au niveau communautaire, le régime d'aide spécifique au secteur des fruits et légumes permet d'investir dans les entreprises agricoles et de concentrer l'offre par l'intermédiaire des organisations de producteurs, rééquilibrant ainsi le partage de la valeur ajoutée entre l'amont et l'aval dans la filière. L'effort du Gouvernement en ce qui concerne l'allégement des charges sociales à travers les dispositifs TODE (travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi) et CICE (crédit d'impôt compétitivité emploi) et les allègements de charges du pacte de responsabilité sera poursuivi. Ainsi, l'allègement supplémentaire de charges en 2015 dans le secteur des fruits et légumes lié au plein effet du CICE (taux à 6 %) et au pacte de responsabilité et de solidarité s'élèvera à 70 millions d'euros par rapport à 2014. Enfin, à l'initiative de l'interprofession des fruits et légumes frais (Interfelel), des assises des filières fruits et légumes se tiendront au printemps 2015 afin de mettre en perspective les difficultés rencontrées. Ces assises pourront être l'occasion de mener une analyse spécifique des dispositifs, notamment fiscaux, existants en matière de gestion des risques, et le cas échéant de réfléchir à des propositions d'amélioration dans le prolongement des travaux du groupe de travail sur la fiscalité agricole.

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