Question de M. ROBERT Didier (La Réunion - UMP) publiée le 24/07/2014

M. Didier Robert interroge M. le ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social sur la politique du Gouvernement en matière d'apprentissage.
Avec la suppression de l'indemnité compensatrice forfaitaire (ICF) et son remplacement par la prime à l'apprentissage d'une part et la suppression de la contribution au développement de l'apprentissage (CDA) remplacée par la mise en place de la fraction régionale d'autre part, le Gouvernement s'attaque à la problématique de l'apprentissage en France, mais avec une ambition difficile à comprendre. Ces deux mesures viennent en effet fragiliser le triptyque sur lequel repose l'apprentissage : un jeune, une entreprise, un centre de formation d'apprentis.
En premier lieu, la suppression de l'ICF a pénalisé non seulement les entreprises de plus de dix salariés qui ne bénéficieront plus de cette aide, mais également diminué de moitié le budget consacré à l'aide à l'apprentissage pour les entreprises de dix salariés et moins.
À La Réunion, l'aide destinée aux 2 800 entreprises de moins de dix salariés va passer en moyenne de 2 000 à 1 000 euros ; quant aux 850 entreprises de plus de dix salariés ayant recours à l'apprentissage, elles ne doivent plus attendre de soutien de l'État. Seulement, le conseil régional de La Réunion mène depuis 2010 une politique volontariste pour le développement de l'apprentissage qui a permis de voir le nombre d'apprentis progresser de près de 20 % chaque année. Aujourd'hui, ce conseil régional a décidé, contrairement à nombre de conseils régionaux de métropole, de maintenir intégralement le niveau des aides aux entreprises tel qu'il existait avant la suppression de l'ICF.
Or, la compensation versée par l'État au conseil régional dont le montant diminuera progressivement de 6,3 millions d'euros en 2014 à 4 millions en 2015 puis 3,5 millions en 2016 et 2017 n'aura de compensation que le nom puisque l'aide versée par le conseil régional aux entreprises réunionnaises pour favoriser l'apprentissage s'élève actuellement à 8 millions d'euros par an. À terme, ce sont donc 4,5 millions d'euros par an que la région devra prendre sur d'autres lignes budgétaires en raison du désengagement du Gouvernement.
D'autre part, le projet de loi de finances rectificatives pour 2014, adopté en nouvelle lecture par l'Assemblée nationale le 16 juillet 2014, prévoit qu'une fraction de 56 % de la nouvelle taxe d'apprentissage soit affectée aux régions, ce chiffre ayant été déterminé par rapport au produit actuel de la taxe d'apprentissage et de la CDA dont le Gouvernement a décidé la suppression. Mais ce nouveau dispositif ne permet aux régions ni de favoriser davantage l'apprentissage, ni d'être assurées du maintien du volume des recettes financières nécessaires pour pérenniser le financement des centres de formation d'apprentis.
Ainsi donc, le président de la République profite de la conférence sociale pour renouveler son souhait de voir le nombre d'apprentis franchir la barre des 500 000 alors même qu'il fragilise l'embauche d'apprentis par les entreprises tout en hypothéquant les financements des centres de formations d'apprentis sur les années à venir.
Au total, il semble que le Gouvernement propose aujourd'hui une modernisation de l'action publique de soutien à l'apprentissage qui consiste à demander aux régions de faire mieux ce que le Gouvernement ne fait plus, tout en diminuant leurs moyens actuels et en hypothéquant leurs moyens futurs.
Dans une situation de reprise économique fragile comme l'a décrite le président de La République le 14 juillet 2014, et compte tenu de la pertinence des dispositifs de soutien à l'apprentissage et à l'alternance dans la lutte contre le chômage des jeunes notamment, il lui demande de bien vouloir préciser ses intentions quant au soutien à l'apprentissage afin de garantir la pérennité des ressources des régions et des centres de formations mais également de préserver les entreprises sans l'intervention desquelles la formation d'apprentis n'a aucun sens.

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Transmise au Ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social


Réponse du Ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social publiée le 06/11/2014

Dans le cadre du plan de relance de l'apprentissage présenté à la grande conférence sociale des 7 et 8 juillet 2014, une ambition collective, partagée par l'éducation nationale, a été donnée pour soutenir le développement de l'apprentissage. Ce plan s'est d'ores et déjà traduit par la mise en place de mesures concrètes et notamment sur le plan financier avec le vote de 200 M€ permettant aux entreprises d'affecter plus de taxe d'apprentissage aux centres de formation des apprentis. Par ailleurs, le programme d'investissement d'avenir, doté de 80 M€, permettant notamment de construire des logements pour les apprentis est lancé. Les discussions menées lors de la journée de mobilisation du 19 septembre 2014, sur l'initiative du Président de la République, ont montré une réelle attente de l'ensemble des acteurs et un désir fort d'avancer concrètement et rapidement en vue de renforcer l'attractivité de l'apprentissage pour les employeurs, d'améliorer les conditions d'emploi de l'apprenti et d'adapter l'offre d'orientation et de formation. Elles ont aussi permis de s'accorder sur le fait qu'au-delà de l'objectif de 500 000 apprentis en 2017, il s'agit avant tout de renforcer la qualité des formations dispensées et de mieux accompagner, suivre les entreprises mais aussi les jeunes afin qu'ils accèdent à un emploi et disposent d'un véritable métier. Le relevé de conclusions, remis à l'issue de cette journée, décliné par un programme de travail précis, traduit la volonté de tous les acteurs - l'État, les partenaires sociaux, les régions, les chambres consulaires - de s'engager immédiatement et collectivement pour soutenir le développement de l'apprentissage. Différents chantiers vont être lancés très prochainement. Pour convaincre davantage d'entreprises, celles qui recourent traditionnellement à l'apprentissage mais aussi celles qui n'y recourent pas ou peu, l'aide au recrutement de 1 000 euros, annoncée dans le cadre de la grande conférence sociale, sera accessible sans condition aux entreprises de moins de 250 salariés qui embauchent un apprenti supplémentaire, à compter du 1er juillet 2014. Elle sera conditionnée à compter de la rentrée 2015 à la signature d'un accord de branche portant des engagements quantitatifs et qualitatifs. Pour les petites entreprises de moins de 11 salariés, l'aide sera de 2 000 euros du fait de son cumul avec la prime à l'apprentissage qui est également d'un montant de 1 000 euros. Ensuite, il s'agit de mettre en place un statut de l'apprenti, qui comprend un socle complet de droits et de prestations. L'accès à des prestations (aides au déplacement, permis de conduire, logement. . ) doit être garanti sur tout le territoire ; la rémunération des apprentis doit évoluer pour davantage tenir compte des qualifications des jeunes. De plus, les entreprises, comme les jeunes, doivent être mieux accompagnés dans leur recours à l'apprentissage, en amont du recrutement, pendant le déroulement de la formation mais aussi à son issue pour favoriser l'emploi. À cet égard, une offre de services doit être définie au niveau national et déclinée territorialement. Les maîtres d'apprentissage doivent être mieux valorisés dans les responsabilités qu'ils prennent pour former les jeunes. Les conditions d'emplois des apprentis doivent aussi évoluer pour donner à la formation en entreprise toute sa pertinence. La transparence des offres d'apprentissage pour permettre que l'offre rencontre la demande, doit également être une réalité à travers la mise en place d'une bourse de l'apprentissage. Le travail au sein de l'Éducation nationale doit aussi se poursuivre et un objectif d'accueil de 60 000 apprentis dans les établissements publics locaux d'enseignement, soit une progression de 50 %, de développement de l'apprentissage sur les premiers niveaux de qualification et les métiers en tension, a été fixé. Mais il faut aussi que les filières d'apprentissage soient mieux connues, des jeunes et des employeurs, mais aussi des enseignants et du personnel d'orientation : chaque jeune doit être sensibilisé à cette voie. La formation en alternance doit être mieux prise en compte dans les choix d'orientation proposés aux jeunes. L'État montrera aussi l'exemple et accueillera un plus grand nombre d'apprentis. Pour cela, un objectif de 10 000 jeunes a ainsi été pris et les freins au développement de l'apprentissage levés (plus de décompte dans les plafonds d'emploi budgétaire, 20 millions d'euros dégagés pour assurer les rémunérations et les formations nécessaires). Une concertation sera également menée au premier trimestre 2015 sur les conditions d'emploi des apprentis dans les fonctions publiques et la reconnaissance de l'engagement des maîtres d'apprentissage.

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