Question de M. BUFFET François-Noël (Rhône - UMP) publiée le 13/06/2014

Question posée en séance publique le 12/06/2014

Concerne le thème : Les territoires ruraux et la réforme territoriale

M. François-Noël Buffet. Madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, 10 milliards d'euros, 12 milliards d'euros, 25 milliards d'euros : telles sont les estimations, qui varient du simple au double, des prétendues économies que devrait induire votre réforme.

Pourquoi tant d'écart ? Comment avez-vous calculé ces chiffres ? Telles sont bien les questions que se posent aujourd'hui l'ensemble des élus locaux de notre nation.

Deux réponses sont possibles.

La première, c'est que vous n'avez réalisé aucune étude d'impact. Ou alors, vous en avez effectué une et vous ne l'avez pas portée à la connaissance des parlementaires : je m'interroge dans ce cas sur les raisons qui auraient pu vous conduire à la cacher.

Si vous avez des chiffres précis, pourquoi ne pas nous les transmettre, afin que nous puissions en débattre clairement ?

La seconde, c'est que vous avez dû revoir votre copie en urgence, compte tenu des réactions, y compris au sein de votre majorité, qu'ont provoquées vos annonces, notamment la suppression des départements.

Simples propos d'opposition, me direz-vous ? Sauf que l'agence Moody's, qui a étudié la réforme que vous avez présentée et que vous soutenez, est en train de battre en brèche toutes vos affirmations.

C'est sans surprise qu'elle confirme notre point de vue : votre projet de réforme territoriale ne saurait réduire sérieusement les coûts supportés par nos collectivités territoriales.

Pis, l'agence Moody's constate un risque d'aggravation de la dépense locale et confirme que ce projet de réforme n'aidera pas les collectivités territoriales à atteindre leurs objectifs budgétaires. Ces mesures annoncées ne font que redistribuer les coûts vers d'autres organes décentralisés. Cette agence insiste également sur la question des salaires.

Comment les collectivités territoriales vont-elles, demain, faire face à la pression de cette réforme qui coûtera encore plus cher ?

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, comment allez-vous donner aux collectivités locales la capacité de pouvoir faire face à toutes ces augmentations que vous imposez – après avoir prélevé tellement d'argent auprès des Français ! –, sans jamais leur permettre de pouvoir continuer à investir au service de la nation, comme elles l'ont fait jusqu'à présent ?

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale publiée le 13/06/2014

Réponse apportée en séance publique le 12/06/2014

M. André Vallini,secrétaire d'État. Monsieur Buffet, comme je l'ai indiqué à M. Mézard, cette réforme est conçue pour assurer plus de clarté dans les compétences, plus de compétitivité pour les régions, plus de proximité avec les intercommunalités. Permettra-t-elle de réaliser des économies ? Oui, bien sûr, mais à long terme ! Dans les premiers mois, voire les premières années, certains disent - avec raison, je crois -que le transfert des personnels va coûter un peu, notamment entre les départements et les régions.

Mme Catherine Procaccia. Il va coûter beaucoup !

M. André Vallini,secrétaire d'État. Mais peut-être pourrions-nous essayer, pour une fois, d'échapper au « court-termisme », à cette vision à courte vue des politiques que l'on peut mener et des réformes que l'on peut engager.

Il s'agit là d'une réforme structurelle, et Dieu sait si le groupe UMP appelle de ses vœux des réformes structurelles. Et quand on demande aux responsables de l'UMP quelle réforme ils jugent prioritaire, ils répondent toujours la réforme territoriale ! Or, précisément, nous nous engageons aujourd'hui dans une réforme structurelle qui va marquer l'organisation de la République pour trente ou cinquante ans, et dont les effets financiers se feront sentir dans cinq à dix ans.

Pour ce qui concerne les économies à attendre, je tiens à votre disposition le rapport Queyranne sur l'aide au développement économique, le rapport Malvy-Lambert sur toutes les économies que l'on peut réaliser dans la gestion territoriale, des rapports de l'OCDE, ainsi que des rapports de différents organismes d'État ou parapublics. Ils affirment tous la même chose : oui, des économies d'échelle sont possibles ; oui, la mutualisation permet aussi de faire des économies. Je vous ferai passer une note chiffrée de trois pages qui vous montrera à quel point ces économies pourront être réalisées si tout le monde se met au travail en termes d'économies de gestion, d'échelle et de mutualisation.

Quant aux chiffres que vous avancez, reprenant ceux que j'ai moi-même indiqués, je vous rappelle, monsieur le sénateur, que le budget global des collectivités locales- communes, intercommunalités, syndicats de communes, départements, régions - s'établit à 250 milliards d'euros. Si, sur dix ans, après avoir réformé l'ensemble des strates, et pas seulement fusionné les régions, on n'est pas capable d'obtenir 5 % d'économies, c'est-à-dire 12 milliards d'euros, mieux vaut changer de métier ! La politique, c'est du volontarisme, monsieur le sénateur !

M. le président. La parole est à M. François-Noël Buffet, pour la réplique.

M. François-Noël Buffet.Monsieur le secrétaire d'État, nous sommes favorables à la réforme structurelle de nos collectivités. Nous l'avons d'ailleurs soutenue ici même en 2010, et vous l'avez combattue fortement.

Quant à la clarté de votre projet, elle ne saute pas aux yeux !

Aujourd'hui, tout le monde ou presque s'accorde à dire que votre projet manque de cohérence, qu'il est segmenté et dépourvu de ligne claire.

Pour ce qui concerne la compétitivité, je vous rappelle que nous avons, en 2010, posé la question de la spécialisation des différentes collectivités locales, et que vous vous êtes opposés à cette perspective. Nous pensons effectivement qu'il faut attribuer aux collectivités des rôles spécifiques pour qu'elles soient efficaces et compétitives.

Pour ce qui concerne la proximité, nous avons mis en place le conseiller territorial, qui ancrait le conseiller régional sur un territoire déterminé et rapprochait le département de la région. Mais vous l'avez également combattu, pour ensuite vous empresser de le supprimer dès l'élection du Président de la République. Peut-être reviendrez-vous à terme sur cette décision. Ce serait une bonne chose, et nous pourrions même voter un texte qui irait dans ce sens !(Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

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