Question de M. VAUGRENARD Yannick (Loire-Atlantique - SOC) publiée le 18/04/2014

Question posée en séance publique le 17/04/2014

Concerne le thème : L'accès au financement bancaire des petites, moyennes et très petites entreprises

M. Yannick Vaugrenard. Monsieur le ministre, si le financement bancaire est essentiel au fonctionnement de notre économie, il est crucial pour les PME – les petites et moyennes entreprises –, ainsi que pour les TPE – les très petites entreprises. En effet, celles-ci recourent très souvent au crédit bancaire pour financer leurs investissements sur le long et moyen terme, pour des crédits à court terme, ou encore plus fréquemment peut-être pour répondre à leurs besoins de trésorerie.

Le financement bancaire est donc la pierre angulaire du financement de nos PME et TPE, qui, employant plus de la moitié des effectifs salariés, sont fortement pourvoyeuses d'emplois et d'activités sur nos territoires. Les entreprises artisanales représentent 30 % des entreprises, leur personnel correspond à 14 % de l'emploi salarié et elles créent 10 % de la valeur ajoutée de notre pays. Or leurs dirigeants se plaignent, de manière récurrente, des difficultés qu'ils rencontrent en matière d'accessibilité au crédit bancaire.

Paradoxalement, les enquêtes trimestrielles de la Banque de France semblent démentir cela. Elles montrent que la demande de crédit des PME et TPE est majoritairement satisfaite : le taux d'obtention s'est globalement maintenu et demeure élevé pour les PME et les ETI, les entreprises de taille intermédiaire, puisque plus de huit entreprises sur dix verraient totalement ou en grande partie satisfaite leur demande.

Pour autant, je suis convaincu que la perception des chefs d'entreprise est fondée. Je pense, notamment, aux problèmes de trésorerie qui précarisent nos petites entreprises.

Comme l'a souligné Mme Prost, médiatrice du crédit, lors de son audition par la commission des affaires économiques au mois de février dernier, les banques commerciales doivent financer les petites entreprises. « Il faut que le système bancaire finance l'économie réelle. Nous devons veiller à ce que les banquiers ne s'égarent pas dans des activités spéculatives », précisait-elle.

Nous savons que le Gouvernement a mis en place de nombreux soutiens aux entreprises, notamment par le biais de la Banque publique d'investissement, ou BPI, mais les banques privées doivent aussi se mobiliser pour consolider la croissance, qui peut repartir.

C'est la raison pour laquelle nous aimerions connaître, monsieur le ministre, les actions que le Gouvernement compte mener dans cette direction.

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Réponse du Ministère de l'économie, du redressement productif et du numérique publiée le 18/04/2014

Réponse apportée en séance publique le 17/04/2014

M. Arnaud Montebourg, ministre de l'économie, du redressement productif et du numérique. Monsieur le sénateur, vous faites état des écarts entre le ressenti de terrain des dirigeants d'entreprise et les statistiques sur les encours et les octrois de crédit par le système bancaire.

Lorsque l'on ne se contente pas d'une analyse générale mais que l'on entre dans le détail, on réconcilie très vite ce ressenti et la réalité des statistiques. Je dispose du rapport de Mme Jeanne-Marie Prost, la médiatrice du crédit, destiné à son ministre de tutelle. Elle a énoncé une vérité assez claire : aujourd'hui, les taux d'obtention de crédits demandés par les dirigeants de PME ou de TPE pour leur trésorerie sont équivalents de ceux qui existent en Italie, voire en Espagne, pays dans lesquels le secteur bancaire n'est quasiment plus en état de fonctionner normalement. Ainsi, 68 % des PME obtiennent en partie ou en totalité les crédits de trésorerie qu'elles réclament, contre 74 % le trimestre précédent. On assiste donc à des phénomènes de tension pour ce qui concerne la distribution du crédit au sein du secteur bancaire.

Que fait le Gouvernement face à cette situation ? Lorsque le canal n'arrive plus, par irrigation naturelle, à desservir l'économie réelle, nous en creusons d'autres, à l'instar de la BPI. Cette banque, je l'ai toujours dit, a pour objet de concurrencer le secteur privé bancaire, qui s'est éloigné de l'économie réelle et ne fait pas son travail de façon satisfaisante.

À cet égard, un phénomène ne trompe guère : les personnels émérites des agences de terrain ne sont plus capables d'établir les diagnostics cliniques. Imaginez des médecins qui ne sauraient plus diagnostiquer et renverraient en permanence à de lointains laboratoires d'analyse médicale. Or aujourd'hui dans les banques plus personne ne diagnostique, n'accompagne, ne couvre le risque pour le compte de l'établissement bancaire. C'est cet éloignement du terrain des banques qui s'engagent dans des activités de marché purement spéculatives dans tous les domaines, laissant l'économie réelle à l'abandon, qui est dénoncé par la médiatrice du crédit ! La BPI a pour objet de suppléer cette carence.

Ce n'est pas le seul canal que nous souhaitons favoriser, mais il est important.

À cet égard, je souhaite vous communiquer un chiffre intéressant...

M. le président. Je vous prie d'être concis, monsieur le ministre, votre temps de parole étant épuisé.

M. Arnaud Montebourg, ministre. Les progressions d'encours sont de 6 % en 2013. L'objectif fixé par le directeur général de la Banque publique d'investissement est de 30 % en 2014. Nous disposons là d'un outil qui permet de progresser.

Il en est d'autres, dont je dirai un mot lors d'une prochaine réponse.

M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, pour la réplique.

M. Yannick Vaugrenard. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse, même si elle est partielle pour ce qui concerne la Banque publique d'investissement. Malheureusement, j'ai le sentiment que, aujourd'hui, ce sont les banques privées qui n'agissent pas, ce qui suscite une interrogation de ma part.

Comme vous le souligniez fort justement, les centres de décision sont de plus en plus éloignés des responsables des petites et moyennes entreprises ou des très petites entreprises. La plupart d'entre eux sont installés à Paris ou sont centralisés. Ce n'est plus le directeur d'agence qui délivre le crédit, notamment pour faire face aux besoins de trésorerie. La relation de confiance qui existait auparavant a disparu. C'est fort dommageable.

Je souhaite donc que des interventions soient faites au plus haut niveau auprès des grands établissements bancaires afin que cela cesse.

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