Question de M. POINTEREAU Rémy (Cher - UMP) publiée le 20/03/2014

M. Rémy Pointereau attire l'attention de Mme la ministre de l'égalité des territoires et du logement sur les conséquences de l'intégration, dans les documents d'urbanisme, de différentes réglementations et sur l'insécurité juridique dans laquelle se trouvent désormais les communes à l'égard des recours de plus en plus fréquents. L'adoption d'un plan local d'urbanisme (PLU) suppose désormais l'intégration dans celui-ci du schéma de cohérence territoriale, la cartographie des zones humides, l'intégration des zones Natura 2000, la prise en compte des dispositions de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement. Ceci aboutit, pour les communes, à une lourdeur incontestable dans la réalisation de leur PLU. Du fait de sa complexité, les contentieux juridiques sont de plus en plus fréquents, non sur le fond mais sur la forme. Cette complexité s'accompagne d'un coût certain pour les communes, et crée aussi une insécurité juridique qui pèse sur les collectivités. Il souhaiterait savoir si le Gouvernement a pris la mesure de ces difficultés et ce qu'il envisage de proposer pour que l'élaboration des documents d'urbanisme puisse être simplifiée et sécurisée juridiquement, afin de revenir à l'objectif de documents d'urbanisme dont l'objet doit être de répondre aux enjeux de maintien de la vie dans nos territoires.

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Transmise au Ministère du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité


Réponse du Ministère du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité publiée le 11/09/2014

L'ordonnance n° 2012-11 du 5 janvier 2012 concernant la clarification et simplification des procédures de document d'urbanisme participe à l'objectif de simplification des procédures d'évolution des documents d'urbanisme, afin de remédier au manque de lisibilité et à la complexification qui s'est ajoutée au fil des évolutions législatives sans réelle cohérence. Elle a procédé à une simplification de ces procédures et à une clarification de leur champ d'application dans une logique de cohérence d'ensemble, afin de conforter d'une part la sécurité juridique des documents d'urbanisme et indirectement celle des autorisations de construire. Le champ des procédures est parfaitement délimité et cohérent entre ces documents, et les étapes de procédure sont à chaque fois identiques. Le champ de la procédure de modification simplifiée des documents d'urbanisme a d'ailleurs été étendu. D'autre part, la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) du 27 mars 2014 a clarifié le rôle des schémas de cohérence territoriale (SCOT) en tant que document intégrateur des schémas régionaux de rang supérieur comme notamment le schéma régional de cohérence écologique. Cela permet au PLU de n'être élaboré qu'au regard de sa comptabilité au SCOT, simplifiant fortement la démarche des maîtres d'ouvrage. Enfin, certaines dispositions permettent d'ores et déjà d'encadrer le contentieux des documents d'urbanisme. La loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové du 24 mars 2014 (ALUR), a ainsi mis en place un nouvel article L. 600-9 dans le code de l'urbanisme. Cet article permet au juge, sous certaines conditions, de surseoir à statuer lorsqu'il est saisi d'une demande d'annulation d'un document d'urbanisme mais que l'illégalité est régularisable. Le document d'urbanisme reste alors applicable dans l'attente de l'adoption d'un nouveau document dans un délai fixé par le juge. Le juge se prononcera ensuite et pourra valider le document puisque l'illégalité aura été régularisée. Il n'y aura ainsi pas de retour à l'application du document d'urbanisme précédent ou du règlement national d'urbanisme, ce qui est normalement le cas lorsqu'un document d'urbanisme est annulé, et pose de nombreux problèmes lorsque le document précédent est très ancien ou la commune fortement urbanisée. Par ailleurs l'arrêt du Conseil d'État « Danthony » (23 décembre 2011, n° 335033) consacre et étend le principe des formalités non substantielles déjà posé par l'article 70 de la loi n° 2011 525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit. L'arrêt expose qu'un vice affectant le déroulement d'une procédure suivie à titre obligatoire ou facultatif n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il a été susceptible d'exercer une influence sur cette décision, ou s'il a privé les intéressés d'une garantie. Il précise que l'application de ce principe n'est pas exclue en cas d'omission d'une procédure obligatoire, à condition qu'une telle omission n'ait pas pour effet d'affecter la compétence de l'auteur de l'acte. En application de cette jurisprudence, la Cour administrative d'appel de Lyon a refusé d'annuler un document d'urbanisme pour lequel le centre régional de la propriété forestière avait été consulté au lieu du centre national de la propriété forestière. L'omission d'une formalité pourtant obligatoire n'ayant pas eu d'influence sur la décision, ne privant pas les intéressés d'une garantie et n'affectant pas la compétence de l'auteur du plan local d'urbanisme (PLU), le PLU n'a pas été annulé (CAA Lyon, 24 avril 2012, n° 11LY02039). Cette jurisprudence, combinée aux dispositions de la loi du 17 mai 2011, ouvre ainsi des perspectives intéressantes en matière de contentieux pour des motifs liés à des vices de forme ou de procédure, et ce pour les autorisations de construire comme pour les documents d'urbanisme. Par ailleurs, les annulations partielles des documents d'urbanisme peuvent être mises en œuvre par les juridictions administratives. Cette technique purement jurisprudentielle est utilisée notamment lorsqu'un zonage ponctuel est contesté : elle permet de n'annuler le document d'urbanisme qu'en tant qu'il concerne les parcelles ou les zones en cause, le reste du document subsistant alors. Le juge a la possibilité de procéder à cette annulation partielle de sa seule initiative, mais les parties au contentieux peuvent également le lui demander. La loi pour l'ALUR donne d'ailleurs valeur législative à cette technique. En ce qui concerne un autre type d'illégalité, lié à l'insuffisance ou au défaut de motivation des rapports d'enquête publique, l'article R. 123-20 du code de l'environnement permet dorénavant à l'autorité responsable de l'enquête publique de saisir le tribunal administratif pour que ce dernier demande au commissaire enquêteur de compléter son rapport. L'autorité compétente dispose d'un délai de quinze jours pour saisir le tribunal et il importe donc qu'elle surveille attentivement la remise du rapport auprès de ses services. Le tribunal peut faire usage de cette faculté également lorsque le rapport lui est remis. Par ailleurs, il est possible pour une commune de saisir la juridiction compétente pour obtenir des dommages et intérêts du fait d'une requête qu'elle estime abusive contre son document d'urbanisme. Elle devra toutefois démontrer la faute, à savoir le caractère abusif de la requête, le préjudice qu'elle subit, et le lien de causalité entre les deux, conformément aux règles de droit commun en matière de recherche juridique de la responsabilité. Le législateur tout comme le Gouvernement partagent cette préoccupation de simplifier le droit de l'urbanisme afin d'en faciliter l'application opérationnelle.

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