Question de Mme ESPAGNAC Frédérique (Pyrénées-Atlantiques - SOC) publiée le 06/03/2014

Mme Frédérique Espagnac attire l'attention de M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur la fermeture du centre Météo-France de Pau d'ici à 2016.

Ce centre est un des plus actifs de France et regroupe plusieurs missions. Celles-ci vont de la sauvegarde des personnes à la climatologie, en passant par l'expertise, l'observation du temps et de ses évolutions à 10 kilomètres près ou encore la production de quinze bulletins météo par jour.

Ce centre a encore montré toute son importance dans la prévision et la gestion des intempéries particulièrement importantes de cet hiver. Sa fermeture serait donc particulièrement préjudiciable pour cette partie du département des Pyrénées-Atlantiques, d'autant que la question de la répartition des tâches entre les centres de Bordeaux et de Biarritz se pose de manière importante, tout comme celle du reclassement des salariés concernés, tous Béarnais ou Pyrénéens.

Elle demande donc au Gouvernement quelles mesures il entend prendre pour le centre Météo-France de Pau, afin d'éviter que ne soit mis fin à plus de cent ans de présence météorologique à Pau.

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Transmise au Ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie


Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche publiée le 16/04/2014

Réponse apportée en séance publique le 15/04/2014

Mme Frédérique Espagnac. Monsieur le ministre, en 2013, le département des Pyrénées-Atlantiques a connu 4 jours de vigilance rouge pour avalanches et inondations, 20 jours de vigilance orange pour inondations, avalanches, fortes pluies, vents, orages et neige et 228 jours de vigilance jaune pour les mêmes phénomènes.

Nous savons que les objectifs de réduction des dépenses publiques et de modernisation de l'action publique que s'est fixés le Gouvernement sont courageux, mais toute vision globale manque de substrat sans une approche plus précise des cas particuliers qui la constituent.

Alors que la révision générale des politiques publiques engagée par l'ancienne majorité a prévu, de 2012 à 2017, la fermeture de 55 des 108 centres de Météo-France qui existent sur le territoire français, celui de Pau-Uzein semble condamné à l'horizon 2016.

Monsieur le ministre, ce cas particulier me semble devoir être observé avec davantage d'attention. Je vais m'en expliquer.

Tout d'abord, l'aéroport international de Pau-Pyrénées, qui a accueilli 600 000 voyageurs en 2012, est équipé pour l'atterrissage tout temps. Sa fiabilité est évidemment renforcée par la présence du centre météorologique.

En outre, comme vous le savez, il existe une forte activité militaire sur la plate-forme aéroportuaire paloise. Les unités militaires, notamment celles du 5e régiment d'hélicoptères de combat et de l'école des troupes aéroportées, ont besoin d'informations météorologiques précises, que seul le centre de météo de Pau peut leur délivrer.

Par ailleurs, le maintien du centre météorologique est une nécessité compte tenu des prévisions précises dont a besoin le site SEVESO de Lacq, site industriel très important que vous connaissez.

Le centre météorologique de Pau-Uzein trouve également son utilité en raison du caractère agricole du département, qui exige une bonne anticipation des évolutions du temps.

Enfin, dans notre département en partie montagneux, le centre départemental de météorologie est un maillon indispensable pour les secours en montagne et pour l'évaluation des risques d'avalanche, qui sont nombreux. Il l'est aussi pour les routes internationales, lesquelles desservent notamment l'usine Toyal Europe, située en haute montagne, ainsi que le territoire d'Aragon, en Espagne.

Monsieur le ministre, à Pau, Météo-France commença à enregistrer et à conserver ses premières données dès 1921, et le centre de Pau-Uzein fut créé en 1945. Autrement dit, Météo-France a plus de cent ans d'histoire commune avec le département !

Aujourd'hui, le centre est composé de sept agents, qui remplissent un grand nombre de missions, toutes plus importantes les unes que les autres, parmi lesquelles on trouve, en premier lieu, celle, bien connue, de l'observation du temps. Pour cela, il bénéficie d'un réseau climatologique local basé sur dix stations automatiques et quarante observateurs bénévoles.

La deuxième mission fondamentale du centre est le service public de la sauvegarde des personnes et des biens. Lors d'épisodes météorologiques importants, Météo-France met ses compétences au service de la préfecture et de la protection civile quasiment vingt-quatre heures sur vingt-quatre.

Le centre participe également aux rapports d'expertise pour les déclarations de catastrophe naturelle, ce qui demande une connaissance de la géographie locale extrêmement poussée, ainsi qu'à la confection des bulletins d'appui pour les écobuages, qui constituent une spécificité du département.

Enfin, il collecte et exploite les données permettant une meilleure connaissance du climat local.

Face à l'étendue de ces missions, remplies par des agents opérationnels tous les jours, de six heures à vingt et une heures, des questions évidentes se posent.

La première question tient à l'efficience de la réorganisation territoriale de Météo-France dans le cas où le centre de Pau-Uzein viendrait à disparaître. En effet, il semblerait que la répartition des missions entre les centres de Biarritz et de Bordeaux ne soit pas encore tout à fait établie. Il serait même question de transmettre la partie relative à la montagne au centre de Tarbes, dans les Hautes-Pyrénées.

Au regard de ces quelques éléments, on comprend bien les inquiétudes qui montent, ici ou là, dans cette partie du département des Pyrénées-Atlantiques, quant à la qualité des services. Nous entendons parfaitement que les outils utilisés sont de plus en plus performants. Il n'empêche, nous avons des doutes sur l'efficacité du service rendu aux utilisateurs et aux collectivités locales : il est difficile de croire que des outils, aussi performants soient-ils, puissent produire un rendu aussi précis et efficace qu'une équipe de sept agents, tous béarnais ou pyrénéens, travaillant sur ce territoire de façon continue depuis des années et ayant une connaissance poussée du terrain.

La seconde question qui reste en suspens, et qui est sans doute la plus importante, est celle de la situation des agents, lesquels pourraient se voir contraints à une mobilité. Monsieur le ministre, leur situation doit être clarifiée le plus rapidement possible !

Tous ces éléments nous conduisent à nous interroger sur la pertinence de la fermeture du centre de Météo-France de Pau-Uzein, en particulier si l'on considère le contexte actuel du département des Pyrénées-Atlantiques, qui, comme de nombreux départements de la façade atlantique, se relève doucement des épisodes climatiques particulièrement violents de l'été et de l'hiver derniers.

Pouvons-nous être certains que, sans le centre de Pau-Uzein, ces derniers mois, les informations auraient été transmises aux autorités compétentes avec la même rapidité et la même qualité ? En aucun cas ! Je crois même que, ces derniers temps, des vies humaines ont pu être sauvées grâce aux agents de ce centre, ce dont je les remercie.

Aussi, monsieur le ministre, je vous prie de bien vouloir m'indiquer l'état d'avancement réel de cette fermeture et, le cas échéant, les moyens qui seront mis en œuvre en vue du maintien en tous points de la qualité du service.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de Mme Ségolène Royal qui, empêchée, m'a demandé de répondre à votre question.

Météo-France joue un rôle-clé dans la prévision des événements climatiques et dans notre politique de prévention des risques. C'est un service public utile aux territoires, à leur économie et à l'ensemble des professions dont l'activité est dépendante des aléas climatiques. Mme Ségolène Royal est très attachée à la qualité de ses missions.

Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie entend l'inquiétude dont vous vous faites le relais : l'inquiétude légitime des personnels quant à leur avenir, la fermeture du centre météorologique de Pau, envisagée à l'horizon 2016, s'inscrivant dans le cadre d'une réorganisation du réseau de l'établissement public.

Toutefois, à la fin de cette même année 2016, l'établissement conservera 55 implantations territoriales et un réseau qui restera le plus dense d'Europe. La précision dans la prévision météorologique sera maintenue, grâce à d'importants progrès techniques en matière de prévision numérique, de systèmes d'observation météorologique et de technologies de communication.

Dans ce contexte, il n'est plus nécessaire de maintenir un centre météorologique dans chaque département : le maintien d'un centre compétent pour deux ou trois départements semble davantage approprié. En effet, un tel périmètre de responsabilité permet une connaissance fine des spécificités locales, tout en donnant aux centres météorologiques une taille pertinente, avec un encadrement renforcé et une expertise de qualité. Comme dans les autres régions, cette nouvelle organisation garantira une réponse rapide des cellules de crise mises en place auprès des préfets.

Au demeurant, les prévisions de Météo-France s'inscrivent, depuis de nombreuses années, dans un système national, piloté à Toulouse, le cadrage établi à partir de divers modèles numériques étant ensuite décliné et affiné progressivement à des échelons interrégional, régional et local.

Les fonctions exercées par le centre départemental de Pau seront reprises par le centre de Bordeaux, qui assure une permanence de service vingt-quatre heures sur vingt-quatre et s'appuiera, par ailleurs, sur le centre météorologique de Biarritz.

L'établissement a prévu, en concertation avec les organisations syndicales représentatives, un accompagnement individuel des agents concernés par une mobilité géographique ou professionnelle à l'occasion de cette réorganisation, pour définir une évolution de carrière correspondant à leurs attentes.

Les missions de service public continueront d'être remplies avec la même exigence qu'aujourd'hui, tout comme les prestations commerciales, au rang desquelles figurent les bulletins d'information que vous avez mentionnés. Le département des Pyrénées-Atlantiques continuera à bénéficier de prévisions météorologiques tenant compte de ses spécificités et des services d'appui et d'expertise nécessaires pour la gestion des événements météorologiques dangereux.

Madame la sénatrice, cette réorganisation met à profit les avancées techniques les plus pointues dans le domaine de la météorologie, pour maintenir un service de qualité en direction des acteurs locaux, tout en contribuant à l'optimisation des ressources que l'État alloue à Météo-France.

M. le président. La parole est à Mme Frédérique Espagnac.

Mme Frédérique Espagnac. Monsieur le ministre, vous le comprendrez, cette réponse ne peut évidemment pas me satisfaire.

Je tiens à souligner de nouveau l'importance du centre de Météo-France de Pau-Uzein pour l'ensemble du département des Pyrénées-Atlantiques. J'ai bien écouté votre réponse, mais je me dois de relayer, dans cet hémicycle, les inquiétudes qu'y suscite l'annonce de sa fermeture.

Il ne faut pas oublier que, comme toute la façade atlantique, les Pyrénées-Atlantiques se relèvent doucement des intempéries particulièrement violentes que le littoral a connues cet hiver. Monsieur le ministre, vous le savez bien, et je vous remercie d'ailleurs de vous être récemment déplacé à Anglet.

Or, c'est pendant cette convalescence que l'on annonce la fermeture d'un des acteurs majeurs de la protection des personnes lors de ces événements ! Cela soulève des interrogations. Au plus fort des intempéries, le centre de Pau-Uzein faisait un point toutes les deux heures avec la préfecture, le service des crues, les pompiers. À ce moment, croyez-moi, il était précieux d'avoir des femmes et des hommes au plus près du terrain, connaissant le moindre cours d'eau ! Et que dire des écobuages, pratiqués dans le département et si importants pour les terres agricoles ? C'est encore le centre de Météo-France de Pau-Uzein qui établit le bulletin météo d'appui pour la préfecture !

Monsieur le ministre, je vous assure que tout cela a un sens pour la population, et il me semble que le signal que l'on va envoyer, celui du retrait d'un nouveau service public de proximité, n'est pas le bon.

C'est tout de même à cent ans d'histoire commune entre Météo-France et les Pyrénées-Atlantiques que l'on s'apprête à mettre un terme. Ce n'est pas rien !

J'entends que les économies sont absolument nécessaires pour le redressement de notre pays, et vous savez que vous pouvez compter sur le groupe socialiste du Sénat pour vous aider dans cette tâche difficile. Toutefois, il est aussi de notre devoir de parlementaires de vous alerter lorsqu'il est procédé à certaines coupes budgétaires de manière aveugle. Il y va également de la légitimité des parlementaires, notamment des sénateurs, sur ces questions qui ont une incidence directe sur nos départements !

M. Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État. Merci, madame la sénatrice !

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