Question de M. LAURENT Daniel (Charente-Maritime - UMP) publiée le 27/02/2014

M. Daniel Laurent attire l'attention de M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur la simplification de la réglementation applicable à la géothermie dite de minime importance.

La géothermie est une filière d'avenir et s'inscrit parfaitement dans le cadre de la transition énergétique et de la création d'emplois. Il n'en demeure pas moins qu'il convient d'être vigilant quant aux incidences d'un développement incontrôlé de micro-projets de forages. En effet, la multiplication des petits forages géothermiques pourrait être source de contaminations potentielles des ressources locales en eau à partir de la surface, voire de possibles interconnexions de nappes de caractéristiques et de qualités différentes.

Il est actuellement procédé à une simplification de la réglementation applicable à la géothermie de minime importance. Or, il semblerait que les nouveaux textes ne tiennent pas suffisamment compte de l'impact sur les milieux aquatiques, en particulier les eaux souterraines. Les mesures de simplification portent sur les forages de géothermie de deux cents mètres de profondeur maximum permettant l'installation de pompes à chaleur (dans la limite de 500 kW) ou de sondes géothermiques (dans la limite de 250 kW) chez les particuliers, pour les petits locaux professionnels mais, également, dans les secteurs tertiaire ou résidentiel collectif. Dans ce dernier cas, les projets sont parfois portés par les aménageurs et remis aux propriétaires ou bailleurs qui méconnaissent souvent les enjeux liés à de telles installations.

Les collectivités responsables de la production d'eau potable sont également concernées parce que les nouveaux projets de textes en cours de discussion ne prévoient aucune possibilité de règlementer les forages de géothermie dans les périmètres éloignés de protection des captages, qui ne sont classés ni en « zone rouge » (autorisation nécessaire), ni en « zone orange » (avis d'expert). De plus, la faisabilité de projets géothermiques doit être prise en compte bien au-delà de la présence de périmètres de protection rapprochée et éloignée. En effet, les forages profonds d'eau potable en nappe captive bénéficient d'une protection naturelle efficace et leur protection est très souvent résumée, comme la réglementation le prévoit, à des périmètres de protection immédiate et rapprochée confondus. On peut légitimement craindre la réalisation de forages géothermiques privés mal isolés recoupant ces multicouches, définis comme stratégiques dans les schémas départementaux d'alimentation en eau potable. Il existe, alors, un fort risque de contamination de la nappe profonde de bonne qualité par une nappe superficielle de qualité médiocre.

Devant l'impossibilité de cartographier ces zones en orange ou en rouge, du fait de l'absence de périmètres éloignés et rapprochés, il serait pertinent de demander l'avis d'experts locaux pour tout projet de forage géothermique recoupant ces multicouches stratégiques. Le foreur ne pouvant être juge et partie, la garantie d'une bonne exécution des prestations des travaux de foration nécessite l'intervention d'un bureau d'études spécialisé en hydrogéologie mandaté par le maître d'ouvrage pour surveiller l'opération. Ce risque de multiplication de forages géothermiques dans ces nappes stratégiques, sans possibilité de contrôle, va s'ajouter au problème des forages privés déjà existants et mal isolés.

Afin de répondre aux enjeux environnementaux et de protection des ressources, il lui demande de bien vouloir lui faire part de ses observations en la matière et des propositions du Gouvernement.

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Transmise au Ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie


Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des finances et des comptes publics, chargé du budget publiée le 07/05/2014

Réponse apportée en séance publique le 06/05/2014

M. Daniel Laurent. Ma question porte sur la multiplication des petits forages géothermiques et les contaminations potentielles des ressources en eau locales à partir de la surface, voire des possibles interconnexions de nappes de caractéristiques et de qualités différentes.

La géothermie est une filière d'avenir qui s'inscrit parfaitement dans le cadre de la transition énergétique et de la création d'emplois. Il n'en demeure pas moins qu'il convient d'être vigilant quant aux incidences d'un développement incontrôlé de micro-projets de forages.

Les services du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie travaillent actuellement à une simplification de la réglementation applicable à la géothermie de minime importance. Or il semblerait que les nouveaux textes ne tiennent pas suffisamment compte de l'impact sur les milieux aquatiques, en particulier les eaux souterraines.

Les mesures de simplification porteraient sur les forages de géothermie de 200 mètres de profondeur au maximum, permettant l'installation de pompes à chaleur en circuit ouvert, dans la limite de 500 kilowattheures, ou de sondes géothermiques en circuit fermé, dans la limite de 250 kilowattheures, chez les particuliers, pour les petits locaux professionnels, mais également dans les secteurs tertiaire ou résidentiel collectif.

Ces projets sont parfois portés par les aménageurs et remis aux propriétaires ou bailleurs, qui méconnaissent souvent les enjeux liés à de telles installations.

Les collectivités responsables de la production d'eau potable sont également concernées, car les nouveaux projets de textes en cours de discussion ne prévoient aucune possibilité de réglementer les forages de géothermie dans les périmètres éloignés de protection des captages, qui ne sont classés ni en « zone rouge » - zone où une autorisation est nécessaire - ni en « zone orange » - zone où il faut un avis d'expert.

De plus, la faisabilité de projets géothermiques doit être prise en compte bien au-delà de la présence de périmètres de protection rapprochée et éloignée. En effet, les forages profonds d'eau potable en nappe captive bénéficient d'une protection naturelle efficace et leur protection est très souvent résumée, comme la réglementation le prévoit, à des périmètres de protection immédiate et rapprochée confondus.

On peut légitimement craindre la réalisation de forages géothermiques privés mal isolés recoupant ces multicouches, définis comme stratégiques dans les schémas départementaux d'alimentation en eau potable. Il existe alors un fort potentiel de contamination de la nappe profonde de bonne qualité par une nappe superficielle de qualité médiocre.

De même, il existe un risque de multiplication de ce type de forages dans les périmètres de protection, sans possibilité de contrôle, de sérieux problèmes causés par des forages réalisés sans précaution ayant déjà été constatés.

Aussi, afin de répondre aux enjeux environnementaux et de protection des ressources en eau, ne serait-il pas envisageable de compléter les textes sur les points suivants, monsieur le secrétaire d'État ?

Concernant la cartographie nationale des zonages réglementaires relatifs à la géothermie de minime importante dont les principes sont définis par l'article 22-7 du projet de décret, les « zones rouges » devraient inclure l'ensemble des périmètres de protection des captages d'eau destinés à la production d'eau potable- périmètres immédiats, rapprochés et éloignés - et les zones identifiées dans le règlement d'un schéma d'aménagement et de gestion des eaux, un SAGE, comme étant soumises à des règles particulières d'utilisation de la géothermie.

Les « zones orange » devraient inclure les zones où il apparaît nécessaire d'assurer la protection quantitative et qualitative des aires d'alimentation des captages d'eau potable d'une importance particulière pour l'approvisionnement actuel ou futur.

Concernant les travaux de réalisation des forages géothermiques de minime importance, il s'agirait de compléter les prescriptions générales figurant dans l'annexe de l'arrêté, à savoir l'isolement obligatoire des masses d'eau traversées, la vérification obligatoire, pour tout type d'ouvrage de géothermie - circuits ouverts ou fermés -, en fin de travaux de forage, de l'étanchéité entre les différents aquifères traversés, par une diagraphie ou une autre technique équivalente, dont les conclusions seraient jointes au rapport de fin de travaux- le paragraphe 5-1-3 relatif au rapport de fin de travaux. À défaut de vérification ou lorsque l'étanchéité n'est pas démontrée, l'ouvrage ne pourrait être réceptionné.

En conséquence, monsieur le secrétaire d'État, quelles sont les réponses que vous êtes en mesure d'apporter à la présente question, qui est un peu longue, je le concède ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Christian Eckert,secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget. Monsieur le sénateur, la longueur de la question n'est pas un obstacle à sa pertinence ! Permettez-moi de vous transmettre la réponse de ma collègue Ségolène Royal, empêchée ce matin.

La géothermie de minime importance représente, dans le contexte prioritaire de la transition énergétique, un véritable potentiel de développement de source d'énergie et d'emplois. Énergie renouvelable et sans aucune émission de gaz à effet de serre, elle peut être mise en œuvre sur tout le territoire français et elle est économiquement accessible à tous- particuliers, entreprises, collectivités territoriales -, afin de chauffer des maisons individuelles, des lotissements ou des bâtiments collectifs.

Le projet de décret élaboré par le Gouvernement auquel vous faites référence vise à simplifier les procédures réglementaires applicables à la géothermie de minime importance dans des conditions pleinement compatibles avec la préservation de l'environnement, particulièrement celle de la ressource en eau.

Pour ce faire, toutes les entreprises de forage qui seront amenées à intervenir devront être qualifiées et mettre enœuvre des prescriptions techniques générales visant à imposer les règles de l'art lors de la réalisation des ouvrages géothermiques. En particulier, comme vous l'avez évoqué, monsieur le sénateur, la cimentation des ouvrages géothermiques qui permet d'assurer une isolation des nappes d'eau sera rendue obligatoire dans tous les cas.

L'implantation des ouvrages géothermiques sera limitée dans les périmètres de protection immédiats et rapprochés des captages d'eau potable et, en cas de défaut d'instauration de périmètres de protection- c'est malheureusement encore trop souvent le cas -, une distance minimale avec le captage devra être respectée.

Ce dispositif ne s'oppose pas aux contraintes posées par les SAGE et les schémas directeurs d'aménagement et de gestion de l'eau, les SDAGE, ni aux prescriptions applicables dans les périmètres de protection des captages d'alimentation en eau potable. Il vient au contraire les compléter.

Enfin, sur certaines zones plus sensibles, un avis sur le projet envisagé sera remis au maître d'ouvrage préalablement aux travaux par un organisme d'expertise qui dispose des compétences nécessaires en hydrogéologie. C'était également, me semble-t-il, l'un de vos souhaits, monsieur le sénateur.

Les mesures prévues promeuvent, dans le cadre du développement attendu de la filière, un renforcement des exigences techniques lors de la réalisation et de l'entretien des ouvrages géothermiques, ainsi qu'une montée en compétence des professionnels.

Le dispositif réglementaire envisagé a été largement concerté, aussi bien avec les professionnels qu'avec les ONG, notamment au sein du Comité national de la géothermie ou du Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques. Ce dernier a donné un avis favorable au projet de décret, qui sera prochainement soumis à l'avis du Conseil d'État, en vue d'une prochaine adoption.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Laurent.

M. Daniel Laurent. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse, qui me satisfait pleinement. Vous l'avez dit, la géothermie de minime importance possède un vrai potentiel de développement. Il serait dommage de ne pas l'employer correctement.

Je vous sais gré du renforcement de ces exigences thermiques, dû à une réelle prise de conscience et à une collaboration étroite avec tous les intervenants.

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