Question de M. de MONTESQUIOU Aymeri (Gers - UDI-UC) publiée le 17/01/2014

Question posée en séance publique le 16/01/2014

Concerne le thème : Devenir des élections prud'homales

M. Aymeri de Montesquiou. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Gouvernement envisage de supprimer les élections prud'homales.

En vertu du projet de loi sur la démocratie sociale, dont nous serons prochainement saisis, les conseillers prud'hommes seraient non plus élus, mais désignés. Cette évolution découle très naturellement de la loi du 20 août 2008, qui a fait du résultat des élections professionnelles le critère central de la représentativité syndicale.

Cette réforme a démocratisé la représentativité syndicale et, en conséquence, marginalisé l'intérêt pour la démocratie sociale de l'élection prud'homale, un scrutin au fort taux d'absentéisme, qui en affaiblit la représentativité et souligne le peu d'intérêt des personnes concernées. Il faut aussi en rappeler le coût anormalement élevé : 100 millions d'euros.

Dans ces conditions, la réforme s'inscrira dans une évolution cohérente et donc naturelle, à ceci près qu'elle sera menée par ordonnance. Monsieur le ministre, vous qui avez toujours protesté avec véhémence contre les ordonnances, quelle conversion ! (Sourires sur les travées du groupe CRC.)

En revanche, et plus fondamentalement, la vraie question nous semble porter moins sur le devenir de l'élection prud'homale que sur celui de l'institution prud'homale elle-même.

La nouvelle organisation pourrait s'inspirer du rapport de M. Didier Marshall, Premier président de la cour d'appel de Montpellier, qui préconise, d'une part, le regroupement du conseil de prud'hommes et du tribunal des affaires de la sécurité sociale en un tribunal social unique, et, d'autre part, la fin du caractère paritaire de ces juridictions, avec un recours beaucoup plus systématique à l'échevinage.

Monsieur le ministre, envisagez-vous de mettre en œuvre ces préconisations ? Dans l'affirmative, à quelle échéance, et qu'en attendre en termes d'efficacité de l'institution ?

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Réponse du Ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social publiée le 17/01/2014

Réponse apportée en séance publique le 16/01/2014

M. Michel Sapin, ministre. Monsieur le sénateur, je le dis très clairement : ce qui vous sera proposé, c'est de modifier le mode de désignation des conseillers prud'homaux en mettant fin à l'élection. Il n'est pas question d'autre chose dans ce texte : ni de fusion ni d'évolution. Seule la garde des sceaux, dans la plénitude de ses compétences, pourrait vous répondre sur ces sujets, qui sont soulevés par ailleurs.

Je veux conforter les prud'hommes, qui sont un lieu fondamental de régulation sociale lorsque surviennent des conflits au travail.

Depuis la création des conseils de prud'hommes et la mise en place de l'élection des représentants des salariés dans ces conseils - vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, ce dont je vous remercie -, a été votée la loi de 2008, qui a créé un mode de calcul de la représentativité des organisations syndicales extrêmement efficace et pertinent, lequel a permis à chacune d'entre elles de connaître son poids. Il m'est d'ailleurs revenu la responsabilité de mener jusqu'à son terme la réforme introduite par cette loi.

Pendant très longtemps, les élections prud'homales étaient le seul moyen pour les organisations syndicales de connaître leur importance respective. C'est l'une des raisons pour lesquelles elles y étaient très attachées. Aujourd'hui, tout cela est fini ; il existe un moyen que toutes considèrent comme beaucoup plus pertinent, plus efficace, plus fidèle à la réalité. Tout cela explique que l'attachement que pouvaient avoir certains pour les élections prud'homales n'a plus autant de raison d'être aujourd'hui, même si on peut parfaitement rester fidèle au principe lui-même.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous souhaitons faire évoluer le mode de désignation des conseillers prud'homaux.

Reste la question de la forme. Monsieur le sénateur, je ne me suis aucunement converti aux ordonnances ; simplement, elles font partie des mécanismes prévus par la Constitution la Ve République. En ce qui me concerne, peut-être en raison de mon âge, qui, s'il avance, n'est pas encore canonique (Sourires.), j'ai toujours considéré que notre Constitution n'était pas forcément un mauvais outil pour permettre à notre pays de faire vivre sa démocratie. Je conçois néanmoins que cela puisse donner lieu à débat.

Les ordonnances sont nécessaires en raison de la très grande complexité des mécanismes à mettre en œuvre. Le principe, vous le connaissez, c'est la désignation par les organisations syndicales en fonction de leur représentativité sur les territoires concernés.

M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou, pour la réplique.

M. Aymeri de Montesquiou. Monsieur le ministre, le fait est suffisamment rare pour que je souligne la convergence de nos analyses...

Mme Éliane Assassi. Ce sera de plus en plus fréquent !

M. Aymeri de Montesquiou. ... sur l'importance de ces élections prud'homales et sur la démocratisation de la représentation syndicale. Néanmoins, j'aurais souhaité que vous me répondiez plus précisément sur l'échevinage, sur l'efficacité espérée du nouveau système et sur la date d'entrée en vigueur de cette réforme.

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