Question de M. NÈGRE Louis (Alpes-Maritimes - UMP) publiée le 30/12/2010

Monsieur Louis Nègre attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la question des frais bancaires payés par les consommateurs.

L'UFC-Que Choisir a rendu publique une enquête sur l'évolution des tarifs bancaires entre 2004 et 2009. Le bilan dressé par l'association est inquiétant. Le manque de transparences des tarifs tend à s'aggraver avec le temps. Les brochures comptent en moyenne 24 pages et 303 tarifs, dont 9 nouveaux tarifs payants, auparavant gratuits, rien que pour les opérations sur compte. La comparaison, pourtant indispensable à la concurrence, est rendue malaisée par ce flot d'informations, d'autant que les libellés diffèrent d'un établissement à l'autre, et que les tarifs concernent des périodicités différentes (mensuelle, trimestrielle, annuelle…) ou sont appliqués à l'opération.

De plus, les banques ont multiplié les packages incluant des services dont l'utilité est parfois discutable ; un client prenant à l'unité les seuls services utiles -compte-chèques, carte bancaire et son assurance, accès Internet et téléphone- économise en moyenne 26 % par rapport au package. Mais l'inflation s'est surtout concentrée sur les frais sanction. En cinq ans, les incidents de paiement ont augmenté de 28 %. Les banques ont détourné à leur profit le plafond réglementaire des frais d'incidents de paiement des chèques pour accroître leur montant de 26 %. En parallèle, la qualité du service est loin de s'améliorer puisque le nombre de conseillers particuliers a diminué de 10 % en cinq ans.

Enfin, les baisses de coût ne sont pas répercutées. A titre d'exemple, le coût pour les banques d'un paiement carte ou chèque a diminué d'au moins 9 % depuis 2004 ; le prix de la carte bancaire a, lui, augmenté de 13 %.

Les clients et les français au sens large s'inquiètent et l'image des banques, déjà sérieusement écornée par la crise, se dégrade. Il apparait donc qu'une réforme d'ampleur s'impose donc, afin d'améliorer la transparence et de modérer la cherté des frais appliqués par les banques pour redonner confiance à nos concitoyens dans le système bancaire.

Il lui demande en conséquence de bien vouloir lui indiquer les mesures que compte prendre le Gouvernement pour faire évoluer les pratiques en la matière.

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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie publiée le 10/02/2011

Le Gouvernement est très attentif à la question des frais bancaires qui a fait l'objet d'un intense travail réglementaire ces trois dernières années : depuis le 16 mai 2008, les frais pour incident de paiement sont plafonnés (décret n° 2007-1611 du 15 novembre 2007 pris en application de la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale) ; depuis le 1er janvier 2009, les banques adressent chaque année un relevé annuel des frais perçus, permettant ainsi à chaque client d'en avoir une vision complète et détaillée (loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs) ; pour renforcer la transparence, un glossaire des termes employés par les banques a été élaboré dans le cadre du Comité consultatif du secteur financier (CCSF). Ce travail a été actualisé en juin 2010 et une attention particulière a été apportée à la définition des tarifs bancaires ; pour faciliter le changement de banque, un service d'aide à la mobilité a été mis en place dans chaque établissement. Les frais de clôture des comptes à vue, des livrets et assimilés ont aussi été supprimés ; les frais d'opposition sur carte bancaire ont été supprimés à compter du 1er novembre 2009 (ordonnance n° 2009-866 du 15 juillet 2009 relative aux conditions régissant la fourniture de services de paiement et portant création des établissements de paiement) ; enfin, pour faciliter l'accès des consommateurs à bas revenu aux services bancaires à des tarifs adaptés, une gamme de paiements alternatifs aux chèques (GPA) a été créée. Les banques la proposent pour environ 3 € par mois. Ce forfait ne comprend pas de chéquier mais une carte de paiement sans dépassement (carte à autorisation systématique), ce qui limite les incidents de paiement et les frais associés. Le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a cependant estimé que des efforts supplémentaires étaient nécessaires. Afin de disposer d'un constat et de propositions, il a demandé à Georges Pauget et Emmanuel Constans de conduire une mission d'analyse et de propositions sur les frais bancaires. La mission a rendu ses conclusions au ministre le 8 avril 2010 et son rapport a été rendu public le même jour. Il formule une trentaine de propositions. À la demande du ministre, le CCSF, qui regroupe l'ensemble des parties prenantes, en particulier les associations de consommateurs, s'est réuni le 12 juillet pour examiner les conclusions de ce rapport. Le ministre a demandé au CCSF de travailler à la mise en oeuvre concrète de ces propositions dans les meilleurs délais. Ces travaux ont porté leur fruit dès le 21 septembre 2010. Dans le cadre d'une réunion plénière du CCSF en présence du ministre, la profession bancaire a souscrit auprès de celui-ci une série d'engagements dans le domaine de la tarification bancaire. Ces engagements portent d'abord sur l'amélioration de la transparence et de la lisibilité des tarifs bancaires, condition de la bonne information du consommateur et de la comparaison entre les différentes offres disponibles : une liste standard de 10 tarifs bancaires figurera en tête des brochures (dès le 1er janvier 2011 sur Internet). Les brochures seront aussi présentées selon un sommaire-type dont les dénominations seront harmonisées ; à partir du 30 juin 2011, les relevés de compte mensuels feront figurer le total des frais bancaires perçus le mois précédent ; dans le cadre du Comité français d'organisation et de normalisation bancaires (CFONB), l'harmonisation des dénominations des tarifs bancaires sera renforcée. Les engagements que le ministre a obtenu des banques portent également sur la prévention et la diminution du coût des frais pour incident, qui peuvent représenter une charge excessive pour les consommateurs les plus fragiles. À compter du 30 juin 2011, un nouveau « forfait sécurité », plus complet que l'actuelle gamme de paiement alternatif, sera mis en place. Destiné aux clientèles les plus fragiles, il sera composé de moyens de paiement propres à maîtriser plus aisément le solde de leur compte (carte de paiement antidépassement, absence de chéquier) et prévoira des possibilités d'alertes sur le niveau du solde, notamment par SMS. Il sera enfin caractérisé par un plafonnement en nombre et en valeur des frais pour incident. Les banques se sont aussi engagées à développer une offre de forfaits (packages) plus adaptés aux besoins des consommateurs. Des forfaits personnalisables et modulaires seront mis en place, ce qui permettra aux consommateurs de s'assurer que leur forfait correspond effectivement à leurs besoins en matière de services bancaires. Les banques se sont aussi engagées à garantir que les forfaits prévoient toujours un avantage tarifaire par rapport à un achat à la carte. Les engagements pris par les banques devant le ministre portent également sur un important chantier de moyen terme : la simplification des paiements au quotidien et la modernisation des moyens de paiement. En alternative au chèque, souvent facteur d'incidents, la création d'un nouveau « virement de proximité » à la main des consommateurs permettra de faire des virements à des proches ou pour le paiement d'un achat ou d'une facture depuis un distributeur de billets ou un téléphone portable de manière sécurisée et simplifiée. Enfin, le ministre a souhaité s'assurer de l'effectivité et de la portée de ces engagements, pris dans le cadre du CCSF. Dans ce but, il a ajouté deux dispositions à la loi de régulation bancaire et financière adoptée en octobre : l'une confie au CCSF une mission d'observatoire des tarifs bancaires, ce qui permettra d'assurer un suivi régulier des résultats des mesures prises dans ce domaine et de disposer d'un constat public et objectif sur l'évolution des tarifs ; l'autre prévoit que le ministre en charge de l'économie pourra demander à l'Autorité de contrôle prudentiel (ACP) de vérifier le respect par les établissements des engagements souscrits dans le cadre du CCSF. Cet audit fera l'objet d'un rapport remis au ministre mais aussi au CCSF qui mentionnera, notamment, engagement par engagement, la proportion des établissements qui le respectent. Le ministre a décidé de faire usage pour la première fois de cette nouvelle procédure d'audit afin de vérifier que la profession bancaire a bien respecté les engagements qu'elle a pris en matière de mobilité bancaire en mai 2008.

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