Question de M. FISCHER Guy (Rhône - CRC-SPG) publiée le 23/12/2010

M. Guy Fischer appelle l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur la fermeture annoncée de dix laboratoires de qualification biologique des dons (QBD) sur les quatorze que compte actuellement l'Établissement Français du sang (EFS).

Le contrat d'objectif et de performance, signé en septembre dernier entre l'EFS et le ministère de la santé, prévoit en effet un regroupement sur quatre sites seulement des plateaux de qualification biologique des dons qui sont actuellement au nombre de quatorze, soit un par établissement régional de l'EFS.

Cette décision très contestable, tant sur le plan de l'emploi que de la sécurité sanitaire, a été annoncée brutalement aux représentants du personnel. Si elle était appliquée, elle conduirait à la disparition des laboratoires de Marseille, Strasbourg, Bordeaux, Saint-Étienne, Besançon, Rennes, Tours, Rungis, Nancy et Rouen qui emploient 260 salariés. Les tubes-échantillons provenant de toute la France seraient acheminés par fourgons spécialisés dans les quatre laboratoires restants, soit : Montpellier, Angers, Lille et Annecy qui totaliseraient après regroupement 190 emplois contre 159 aujourd'hui. Il est en effet impossible d'utiliser une poche de sang non validée par un laboratoire de QBD.

Les conséquences négatives de ce regroupement seraient considérables, avec, notamment :
- la suppression de près de 250 postes occupés par des salariés hautement qualifiés ;
- la généralisation, pour les salariés, du travail en 2x8, de 4h à 21h.
- la transformation de ces quatre laboratoires en énormes usines dans lesquelles, si survenait un incident grave, un quart de la collecte quotidienne nationale serait bloquée ;
- des difficultés particulières pour les plaquettes dont la durée de conservation n'est que de cinq jours.

Considérant qu'il est inacceptable de démanteler un service public aussi performant que l'EFS dont l'activité permet de soigner un million de malades par an, il lui demande de surseoir à ce projet qui ne manquerait pas d'engendrer d'importants risques sanitaires.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé de la santé publiée le 19/01/2011

Réponse apportée en séance publique le 18/01/2011

M. Guy Fischer. Madame la secrétaire d'État, j'ai souhaité attirer l'attention sur la fermeture annoncée de dix laboratoires de qualification biologique des dons sur les quatorze que compte actuellement l'Établissement français du sang, l'EFS.

Le contrat d'objectifs et de performance signé au mois de septembre dernier entre l'EFS et le ministère de la santé prévoit, en effet, un regroupement sur quatre sites seulement des plateaux de qualification biologique des dons, qui sont actuellement au nombre de quatorze, soit un par établissement régional de l'EFS.

Cette décision, très contestable sur le plan tant de l'emploi que de la sécurité sanitaire, a été annoncée brutalement aux représentants du personnel. Si elle était appliquée, nous assisterions à la disparition des laboratoires de Marseille, Strasbourg, Bordeaux, Saint-Étienne, Besançon, Rennes, Tours, Rungis, Nancy et Rouen, qui emploient 260 salariés.

Les tubes-échantillons provenant de toute la France seraient acheminés par fourgons spécialisés dans les quatre laboratoires restants, soit Montpellier, Angers, Lille et Annecy, qui totaliseraient, après regroupement, 190 emplois, contre 159 aujourd'hui. Il est en effet impossible d'utiliser une poche de sang non validée par un laboratoire de qualification biologique des dons.

Les conséquences négatives de ce regroupement seraient considérables. Relevons, notamment, la suppression de près de 250 postes occupés par des salariés hautement qualifiés ; la généralisation du travail en 2x8, de quatre heures à vingt et une heures ; la transformation de ces quatre laboratoires en énormes usines avec le risque, si un incident grave survenait dans l'une d'elles, de voir un quart de la collecte quotidienne nationale bloqué ; des difficultés particulières pour ce qui concerne les plaquettes, dont la durée de conservation n'est que de cinq jours.

Je ne comprends pas que l'on prenne le risque de transporter, dans des délais très courts, la masse des tubes-échantillons sur 500 kilomètres, voire davantage. De plus, comment serait-il possible aux deux laboratoires restants d'absorber un tel surcroît d'analyses ?

J'estime qu'il est inacceptable et irresponsable de démanteler un service public aussi performant que l'EFS, dont l'activité permet de soigner un million de malades par an.

Je vous demande donc instamment, madame la secrétaire d'État, de surseoir à ce projet, qui ne manquerait pas d'engendrer d'importants risques sanitaires et qui est incompatible avec la raison d'être de l'Établissement français du sang, dont le personnel travaille sur du matériau humain bénévole : les donneurs de sang.

C'est un véritable cri d'alarme que je lance, madame la secrétaire d'État !

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Nora Berra, secrétaire d'État auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de la santé. Monsieur Fischer, la mutualisation des plateaux de qualification biologique des dons est prévue à l'article 12 du contrat d'objectifs et de performance signé le 2 septembre 2010 par l'Établissement français du sang et les ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale et du budget.

Ce contrat comporte une réduction du coût du processus de qualification biologique des dons de 15 % à son échéance.

Les quatorze plateaux existants actuellement relèvent tous d'une organisation différente et nécessitent des mesures d'harmonisation. Le coût de leur fonctionnement est connu ; il est d'autant plus élevé que le maillage territorial est important.

Le contrat d'objectifs et de performance ne définit pas le nombre de plateaux qui devront faire l'objet d'une mutualisation, mais il prévoit, je le répète, une réduction de 15 % du coût de l'organisation réalisant la qualification biologique des dons à l'échéance du contrat.

L'EFS, après avoir mené une étude portant sur plusieurs scénarios comportant un nombre final de plateaux allant de trois à huit, a en dernier lieu retenu l'hypothèse du passage de quatorze à quatre plateaux interrégionaux. Pour ce faire, un groupe de travail a étudié le dossier jusqu'au mois de juillet dernier. Des études complémentaires ont été rendues à la fin du mois d'août et des propositions de localisations géographiques ont enfin été émises au mois d'octobre.

Les régions retenues en raison de leur intérêt logistique sont Pyrénées-Méditerranée, avec Montpellier, Nord-Pas-de-Calais, avec Lille, Rhône-Alpes, avec Annecy, et Pays-de-la-Loire, avec Angers.

Le premier regroupement sur Montpellier aura lieu en deux temps : au cours de cette année seront fermés d'abord le plateau de Saint-Étienne, puis celui de Marseille. Les autres regroupements se feront en 2012 et bénéficieront des enseignements de celui qui aura été effectué à Montpellier.

L'Établissement français du sang a présenté un plan de mutualisation des plateaux de qualification biologique des dons le 10 novembre dernier à son comité des directeurs et l'a transmis le même jour aux organisations syndicales siégeant au comité central d'établissement. Une première information officielle du CCE a eu lieu le 16 décembre 2010.

Le ministère chargé de la santé suit bien entendu de très près les modalités de mobilité des personnels de l'EFS, dont la direction a garanti qu'il n'y aurait ni licenciement ni mobilité forcée du personnel. Toutes les situations seront étudiées au cas par cas et une proposition de reclassement sera faite à chaque personne concernée. L'EFS mettra en place des mesures d'accompagnement pour les candidats à la mobilité, afin de ne pas perdre leur expertise. Les mesures seront définies avec les partenaires sociaux.

Pour les personnels non repris dans les activités de qualification biologique du don, des formations de reclassement seront proposées, notamment en vue d'un renforcement ou d'un développement des activités sur les sites qui perdront leur plateau.

Il faut également souligner que l'activité transfusionnelle va augmenter dans les prochaines années. L'EFS conserve donc des perspectives d'augmentation d'emploi et de budget. Ainsi, 152 emplois supplémentaires seront créés en 2011.

Les amplitudes horaires sur les nouveaux plateaux de qualification biologique des dons seront étudiées dans le cadre des discussions entre la direction et les organisations syndicales, et l'expertise d'un consultant sera requise.

Enfin, les différents scénarios étudiés prévoient tous des situations dégradées qui permettent néanmoins au système de fonctionner même avec un plateau de moins en cas d'incident provoquant sa fermeture. L'EFS est aujourd'hui préparé à ce genre d'exercice ; de tels plans de sécurisation fondent l'autosuffisance en produits sanguins labiles de la France.

D'autres pays européens comparables ont déjà fait l'expérience du regroupement de tels plateaux. Aucune difficulté particulière n'est remontée de ces opérations et la disponibilité des produits est assurée sans problème.

Le plan sera mis en œuvre avec toutes les garanties nécessaires en termes de sécurité et de qualité des produits sanguins labiles.

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Madame la secrétaire d'État, vos propos ne m'ont malheureusement pas convaincu.

Cette suppression de dix laboratoires sur quatorze est un coup très rude porté à l'Établissement français du sang, alors même que notre système garantit tant le respect de l'éthique que le plus haut niveau de sécurité possible. Notre pays est en effet le seul où la collecte soit entièrement médicalisée, ce qui fait la spécificité de la France par rapport aux autres pays de l'Union européenne.

J'ai déjà eu l'occasion d'évoquer devant notre assemblée différents renoncements, tels que l'acquisition par le Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies d'un groupe autrichien qui collecte du plasma sanguin contre rémunération. (Mme Nathalie Goulet s'exclame.)

Ces renoncements préludent la fin du système transfusionnel français, qui est aujourd'hui un modèle international sur les plans éthique et sanitaire, pour le plus grand profit sans doute des multinationales qu'un tel « marché » fait rêver.

Le regroupement des laboratoires de l'EFS me semble également remettre en question les activités de recherche de l'établissement.

En effet, à côté des laboratoires de qualification biologique des dons existe sur chaque site de l'EFS un laboratoire des examens immuno-hématologiques, outil exceptionnel de dépistage et de prévention pour une série de maladies, dont la leucémie.

Trois cents chercheurs y travaillent sur la médecine transfusionnelle du futur en développant des activités d'ingénierie cellulaire et de nouvelles techniques de soins en vue d'élaborer des traitements contre le cancer du sang, le diabète ou la maladie de Parkinson.

Je le redis, il me semble irresponsable de casser un tel outil !

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