Question de M. REBSAMEN François (Côte-d'Or - SOC) publiée le 21/10/2010

M. François Rebsamen attire l'attention de M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche sur les problémes que connaît la filière lait en Côte-d'Or, notamment sur le territoire de Saône Vingeanne.
Lors du vote de la loi de modernisation agricole, la contractualisation dans le cadre des interprofessions a été présentée comme le dispositif clef permettant de stabiliser les relations commerciales dans les filières agricoles.
Or, l'été nous a montré combien il est difficile de concilier les différents intérêts des producteurs et des industriels dans le secteur laitier et de faire respecter l'accord interprofessionnel datant de moins d'un an. Actuellement, les relations entre les différentes organisations représentatives des producteurs agricoles dans le secteur du lait sont très tendues puisque le syndicat majoritaire n'accepte pas de travailler avec les syndicats minoritaires dans l'interprofession laitière alors que le Gouvernement avait appelé de ses vœux cette évolution.
Pour le secteur laitier, on référence 85 000 producteurs pour 200 acheteurs, dont les 10 plus importants contrôlent 60 % de la collecte, et 4 centrales d'achat de la grande distribution qui contrôlent 70 à 80 % des ventes. Le climat est très tendu dans ce secteur pourtant choisi comme modèle dans la dernière loi, et des réponses ministérielles, voire de simples réactions, se font attendre.
Aujourd'hui, en pratique, le groupe Danone qui entretenait des liens commerciaux avec la coopérative de producteurs laitiers du territoire de Saône Vingeanne en Côte-d'Or vient d'annoncer la fin de ces dits liens commerciaux au printemps 2011.
Les raisons stratégiques de ce groupe industriel ont été justifiées, mais, en l'espèce, ce sont les producteurs laitiers qui seront directement impactés, voyant leurs efforts et leur volonté réduits à néant.
Dans ces conditions, que compte faire le Gouvernement pour maintenir sur nos territoires un tissu d'exploitations agricoles viables ? Comment rééquilibrer les relations commerciales afin que les industriels ne puissent pas imposer aux producteurs des prix inférieurs à leur coût de production en les menaçant de rompre leurs accords ?

La situation de la coopérative de Côte-d'Or en est une illustration. Le ministre a récemment annoncé qu' « il ne faut pas relâcher les efforts pour moderniser la filière et améliorer les relations entre les différents partenaires (…) nous avons passé un cap important. »
Mais la législation ne permet pas aux petites exploitations de sécuriser leurs relations commerciales. La loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche n'apportera pas plus de solutions, aussi souhaite-t-il savoir ce que le Gouvernement entend entreprendre pour que les exploitations locales ne continuent pas d'être pénalisées.

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Réponse du Ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche publiée le 25/11/2010

Le Gouvernement travaille aux plans communautaire et national pour renforcer la filière laitière et la préparer à la suppression du régime des quotas laitiers prévue à l'horizon 2015. Après le retournement des marchés laitiers au second semestre 2008 et du début 2009, un groupe à haut niveau sur le lait a été instauré au niveau communautaire en octobre 2009, afin de proposer des perspectives à moyen terme pour la filière. Après plusieurs réunions, ce groupe a rendu le 15 juin 2010 un rapport comportant sept recommandations, en faveur d'une nouvelle régulation des marchés. Le commissaire à l'agriculture, M. Dacian Ciolos, a indiqué lors du conseil agriculture du 12 juillet 2010 que certaines recommandations du groupe à haut niveau, concernant notamment la possibilité, pour les États membres, de rendre obligatoires des contrats écrits, le renforcement du pouvoir de négociation des producteurs de lait et le rôle des interprofessions, feraient l'objet de propositions législatives présentées par la Commission fin 2010. Au plan national, la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche du 27 juillet 2010 a pour objectif de stabiliser le revenu des agriculteurs, notamment grâce à des contrats écrits et de renforcer l'organisation des producteurs et des filières. Comme il avait été annoncé, la contractualisation entre les producteurs de lait et leurs acheteurs sera rendu obligatoire au 1er avril 2011. Un projet de décret a été rédigé dans ce sens et fait actuellement l'objet d'un examen au Conseil d'État. La mise en place de la contractualisation plus en aval dans la filière, en particulier entre les coopératives qui vendent leur lait et leurs acheteurs, fait l'objet d'une expertise technique en lien avec les professionnels sur les modalités possibles de sa mise en oeuvre dans le cadre des dispositions actuelles de la loi. Des projets de décret et d'arrêté concernant les conditions de reconnaissance et les missions d'organisations de producteurs laitiers font également l'objet d'une concertation avec les organisations professionnelles et devraient être finalisés avant la fin de l'année 2010. La mise en place d'organisations de producteurs dans ce secteur permettra aux producteurs de s'organiser et d'accroître leur pouvoir de négociation vis-à-vis des acheteurs de lait. Les relations commerciales entre les agriculteurs et leurs acheteurs seront également rééquilibrées par l'Observatoire des prix et des marges que le Gouvernement a lancé le 12 octobre 2010. M. Philippe Chalmin, économiste reconnu, spécialiste de l'agriculture, en sera le président. Cette transparence accrue et ce rééquilibrage des relations tout au long de la filière permettront de renforcer le rôle des différents acteurs. Ces dispositions ne peuvent être dissociées, comme cela a déjà été indiqué à de maintes reprises par les autorités françaises, de mécanismes de régulation des marchés permettant de prévenir et de gérer les crises qui seront défendus dans le cadre de la préparation de la politique agricole commune de l'après-2013. Enfin, le Gouvernement a marqué, le 14 septembre 2010, lors du salon des productions animales à Rennes, sa volonté de consolider l'avenir des filières d'élevage en débloquant 300 M€ sur trois ans. Le plan stratégique pour la filière laitière sera financé dans ce cadre. Il permettra notamment de moderniser les exploitations agricoles, d'encourager les investissements dans l'innovation pour les industries laitières et de valoriser les métiers du lait. Ce plan a également pour ambition de préparer la filière à la fin des quotas en faisant évoluer le régime actuel et en menant une réflexion avec tous les professionnels concernés sur le passage à une gouvernance par bassin, afin de préserver et conforter une production laitière sur l'ensemble du territoire.

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